Sénégal: MOU et REMOUS de la présidentielle

13 Mars 2024
analyse

Le MOU est l’acronyme de Memorandum of understanding, une expression anglaise qui signifie en français un protocole d’accord pour faire simple, ou généralement un document dans lequel on s’accorde pour aller ensemble sur un projet et qui en trace les grandes lignes.

En revanche le remous est un tumulte, un mouvement confus et massif. Selon le Larousse, il s’agit d’un tourbillon qui se produit parfois lorsque quelque chose empêche l'écoulement d'un liquide.

L’élection présidentielle sénégalaise, qui doit sceller la fin du magistère de 12 ans du Président Macky Sall, aura été marquée comme jamais dans un passé récent, par autant d’incertitudes sur sa tenue comme sur son épilogue.

Il faut le dire de manière nette et claire, on a comme l’impression qu’on est sous un régime de vents contraires, avec d’une part ceux qui sont favorables à la tenue de l’élection avec comme arbitre le Conseil constitutionnel, dont c’est la prérogative, et d’autre part, ceux qui estiment jusque-là sans aucune preuve, que ledit Conseil est disqualifié pour assurer cette mission, suspectée qu’il est de corruption en la personne de deux de ses membres.

Dans l’un comme dans l’autre camp, l’heure est aux grandes manœuvres. En tout cas le leitmotiv qui apparait de manière flagrante dans les éléments de langage bricolés au gré des circonstances, dans le camp du pouvoir sortant, est qu’il faut faire barrage à la vague des « jeunes qui n’ont jamais exercé aucune responsabilité d’Etat » et qui n’ont aucune expérience. Pour eux, l’arrivée de la bande à Bassirou Diomaye Faye toujours en prison, et interdit de campagne est lourde de dangers pour le pays.

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Face à ce « péril » aucun moyen ne sera de trop ; tout y passe : embastillement, recours abusifs, dilatoire, report, dialogue et de guerre lasse soupçon de corruption de juge impliquant, dit-on, le propre candidat   Amadou Ba de Benno Bokk Yaakaar ( BBY),  au pouvoir et ce n’est pas fini. La peur doit être grande au point que certaines vérités évidentes semblent hors de portée.

Tout le monde sait qu’une élection n’est jamais gagnée d’avance, quelque soit le résultat des sondages, et c’est ça qui fait son charme.

Mais aujourd’hui, la coalition Diomaye Président fait tellement peur qu’elle est en train de cristalliser les dignitaires de l’APR autour d’un mouvement qui ressemble fort à l’ARC Républicain en France pour barrer la route au Rassemblement National de Marine Lepen. Ce n’est pas exagéré de le dire, car les lignes sont en train de bouger pour parer au pire, et parachever le projet d’exercer le pouvoir pour 50 Ans.

La seule limite à ce MOU se trouve dans un leadership éclaté et conflictuel, non pas sur le plan des idées et des projets, mais plutôt sur des égos surdimensionnés, à l’origine de trois candidatures qui naguère étaient dans la mouvance de BBY ( Bonne Abdallah Dionne, Mame Boye DIAO, et Aly Ngouye Ndiaye) et qui ont contesté le choix de  l’ex- premier ministre Amadou Ba.

En face, la coalition Diomaye Président est challengée d’une part, avec la campagne de diabolisation, comme celle qu’avait subi Me Abdoulaye Wade à l’époque, et d’autre part sur la faiblesse supposée du leadership du candidat, perçu comme un candidat par défaut, entouré d’alliés qui n’ont pas renoncé à leur ambition, et qui lui font de la concurrence.

Cette bipolarisation qu’on veut installer sur l’échiquier électoral, reste néanmoins très aléatoire au regard de l’envergure de certains candidats qui, quoiqu’on dise, trainent une solide expérience électorale et administrative doublée d’une riche carrière politique comme Khalifa Ababacar Sall, et Idrissa Seck. Sans oublier les candidats embusqués comme Aliou Mamadou Dia du PUR voire Déthié Fall.

C’est dire qu’on va vers un scrutin très ouvert où les pronostics de victoire au premier tour apparaissent aujourd’hui comme totalement fantaisistes.

En revanche un tir de barrage risque de se produire et venant des tenant du « système » qui ont exercé ou qui exercent encore le pouvoir à tous les échelons, contre tous ceux qui se réclament de l’alternative et ils sont nombreux et qui pourraient en cas de 2ème tour s’allier pour faire échec à leur projet cinquantenaire. L’enjeu de cette élection se trouve des lors, dans le tracé de cette ligne de démarcation et de la capacité à fédérer de manière cohérente les ententes du second tour.

Comme qui dirait c’est MOU contre Remous

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