Sénégal: Prise en charge des insuffisants rénaux - 910 patients dialysés gratuitement, 1510 sur la liste d'attente en 2023

15 Mars 2024

Le Sénégal compte 31 centres de dialyse où sont dialysés 910 patients. Malheureusement 1510 malades sont encore sur la liste d'attente. Ces chiffres sont donnés par le Conseil national du don et de la transplantation (Cndt), à l'occasion de la journée mondiale du rein, célébrée hier.

La Journée mondiale du rein, célébrée le 14 mars, est un moment de sensibilisation sur les ravages socioéconomiques causés par les nombreux décès dus à la Maladie rénale chronique (Mrc). Elle est instituée par l'Organisation mondiale de la santé. Au Sénégal, près de 910 patients ont été dialysés et 1510 inscrits dans la liste d'attente de dialyse au cours de l'année 2023.

La révélation est du Conseil national du don et de la transplantation (Cndt) qui répertorie 31 centres de dialyse présents dans les 14 régions du pays. « C'est pourquoi la transplantation rénale devrait être une alternative pérenne à ces traitements de suppléance », a indiqué, dans un communiqué, Pr El Hadji Fary Ka, président du Cndt. S'il précise que le taux de létalité au Sénégal est de 12 %, Pr Ka rappelle que le thème de cette année « la santé rénale pour tous : promouvoir un accès équitable aux soins et une utilisation optimale des médicaments » invite à une forte mobilisation pour l'amélioration de l'offre de soins.

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« L'accès équitable des malades au don et à la transplantation rénale, leitmotiv du Cndt, est une forte nécessité et une demande sociale. Le coût de la transplantation rénale est de moitié à la première année par rapport à la dialyse, et diminue exponentiellement avec le temps. Elle est un moyen efficace d'alléger les dépenses de santé dans la lutte contre la Maladie rénale chronique. La prise des médicaments immunosuppresseurs par les transplantés est la garantie de la viabilité du greffon », a-t-il relevé.

Dans un document semblable, le ministère de la Santé et de l'Action sociale a révélé que l'Etat a rendu gratuit la dialyse depuis 2012, faisant passer le montant de 1 à 5 milliards FCfa. Avec les premières transplantations rénales par donneur vivant en novembre 2023, le Sénégal est entré dans le cercle restreint des Nations où la transplantation rénale est une réalité.

De l'avis du Cndt, le pays a gagné la bataille de l'organisation pour la transplantation rénale, mais « il reste à relever le défi du financement, notamment la prise en charge des donneurs et des coûts liés aux médicaments immunosuppresseurs ». Désormais, le mot d'ordre est : « Ensemble tous unis, transformons en réalité l'espérance de ces nombreux patients en dialyse ou en attente d'une transplantation ». B. G. DIOP

PORTRAIT

ADA EDWIGE, ANCIENNE MALADE

La rédemption d'une transplantée rénale

Atteinte d'insuffisance rénale en 2011, Ada Edwige a subi avec succès une greffe rénale en novembre 2023 et retrouve le goût de la vie. Mariée et mère de trois enfants, la Thiessoise appelle l'État à faciliter la transplantation par la prise en charge du coût de l'opération.

« Je n'ai jamais cru dans ma vie que je pouvais reboire et remanger sans souci ». Ada Edwige revient de loin. Très loin même. En novembre 2023, à l'Hôpital militaire de Ouakam, la dame s'est débarrassée d'un calvaire qui a failli la faire passer de vie à trépas. Insuffisante rénale, elle a subi avec succès la transplantation pour donner une bouffée d'oxygène à son corps longtemps martyrisé par des douleurs, une soif folle, des heures interminables d'insomnie et des nuits à dormir debout.

Grâce à sa grande soeur qui a donné son rein, Mme Edwige a retrouvé une seconde vie. Une chance qu'elle savoure au jour le jour. Instant après instant. Jointe par téléphone, mercredi 13 mars, veille de la journée mondiale du rein, elle a remonté le temps pour se replonger dans les détails de ses souvenirs empreints de chagrin. « Le plus absurde, c'est d'interdire à l'individu de boire. Quand on a soif, on n'avait pas le droit de boire ou le médecin nous disait de ne pas dépasser 500 ml. On ne devait pas boire un litre d'eau par jour. Vous voyez pendant la période de chaleur ce que ça fait. Quand tu bois deux litres entre les deux séances de dialyse, tu ne pouvais pas dormir. J'étais obligée de me mettre debout la nuit et quand on se couche, on étouffe. Vivre sans manger ni boire correctement, c'est affreux », se rappelle-t-elle.

Au détour d'un rendez-vous chez le dentiste, Ada Edwige qui habite à Thiès, est appelée à consulter le médecin généraliste à cause d'une tension qui est montée à 21. La suite mène au choc : le diagnostic décèle une insuffisance rénale. « C'était en 2011 », soupire-t-elle, voix encline de tristesse. Mais la dame a foi en Dieu et prend la nouvelle avec philosophie. Les membres de sa famille, eux, n'en reviennent pas. « Je me suis dit que je n'avait fait de mal à personne pour mériter un tel sort. Donc, j'étais persuadée que Dieu un jour allait enlever cette maladie de mon corps », philosophe-t-elle, y croyant jusqu'au bout.

Coût de la greffe rénale

En attendant, il fallait souffrir, endurer, grimacer, supporter avec dignité. « C'était un vrai calvaire financièrement, psychologiquement et physiquement. Pour faire la dialyse, c'était compliqué. Deuxièmement, les médicaments coûtaient assez chers », insiste-t-elle. L'apparition de la Covid-19 au Sénégal en mars 2020 ne va pas arranger son cas. « Nous quittions Thiès pour aller à Dakar. Pendant la période de Covid-19, je dépensais 60 000 FCfa par semaine rien que pour le transport. Il y avait les restrictions et donc il fallait que je loue un véhicule qui me coûtait 20 000 Fcfa par séance et je devais en faire 3 par semaine », a-t-elle raconté.

Lassée des interminables séances de dialyse, Ada Edwige qui a longtemps refusé d'aller à l'étranger malgré les recommandations de la famille, se décide à faire la greffe rénale. Son médecin traitant l'encourage dans cette dynamique. « Chacun des membres de la famille voulait me donner un rein. Finalement, c'est ma grande soeur qui l'a fait. Je n'ai rien payé, c'est l'hôpital de Ouakam qui a pris en charge mon opération. Je ne vais jamais cesser de remercier la directrice de l'hôpital et son équipe », se félicite-t-elle.

Si elle a retrouvé sa vie d'avant, un moment chahutée par l'insuffisance rénale, Mme Edwige, mariée et mère de 3 enfants, demande à l'État de prendre en charge le coût de la transplantation pour les milliers de malades. « L'insuffisance rénale ne tue pas, c'est le manque de moyens qui tue parce que cette maladie coûte extrêmement chère. Si le gouvernement ne prend pas en charge le coût de la transplantation, il n'y aura pas beaucoup de malades qui subiront la greffe », conclut-elle.

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