Tunisie: École publique - Ce grand chantier qui nous attend

7 Avril 2024

Enseignement primaire : Modification du calendrier des examens

Tout reste tributaire du Conseil supérieur de l'éducation. Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a fini d'analyser les résultats de la consultation nationale organisée récemment à propos de la réforme du système éducatif. La mise en place dudit conseil est une question de jours.

L'agression d'une enseignante dans une école primaire de Kairouan a été filmée et diffusée, récemment, sur les réseaux sociaux, suscitant l'indignation. Le syndicat de l'enseignement a confirmé l'authenticité de la vidéo, la mère de l'élève a été condamnée auparavant pour des faits similaires. Quelques heures après, les forces de l'ordre procède à son arrestation. La scène a choqué plus d'un, certes, mais malheureusement elle témoigne de la situation défaillante de l'école publique, pour certains il s'agit même de son effondrement.

L'enseignement est un dossier complexe qui revêt une importance extrême puisqu'il s'agit de la préparation des générations futures. Entre détérioration des infrastructures, obsolescence des programmes d'enseignement, essor du secteur privé et manque de moyens, l'école publique va mal très mal.

Aujourd'hui, les Tunisiens voient le bout du tunnel dans le programme de réformes engagé par le Président de la République et visant à sauver l'école publique. «Vous connaissez la situation dans un certain nombre de gouvernorats. Les élèves ne trouvent pas de bus pour les transporter.

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Certains d'entre eux sont même obligés d'abandonner l'école faute de moyens de transport. Puis on parle du taux élevé d'analphabétisme... C'est une honte pour la Tunisie que de compter deux millions d'analphabètes», c'est en ces mots que le Chef de l'Etat a dressé le bilan catastrophique de l'éducation en Tunisie annonçant que les choses sont prises au sérieux au plus haut niveau de l'Etat et que l'école publique sera sauvée.

Recevant récemment Saloua Abassi, nouvelle ministre de l'Education, Kaïs Saïed a réaffirmé que le secteur de l'éducation et de l'enseignement fait partie des domaines de souveraineté dans le sens où il n'y a pas d'avenir pour n'importe quel peuple sans un enseignement public offrant à tous, et sur un pied d'égalité, toutes les conditions d'apprentissage.

Mais actuellement, tout reste tributaire du Conseil supérieur de l'éducation. En effet, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a fini d'analyser les résultats de la consultation nationale organisée récemment à propos de la réforme du système éducatif. A titre de rappel, cette consultation avait mobilisé près de 680.000 participants. Un processus qui finira par la mise en place imminente du Conseil et en vérité, ses grands axes sont déjà connus : poser les bases de l'école du futur et réformer l'école publique.

Faut-il rappeler que ce Conseil a été énoncé dans la nouvelle Constitution du pays dans son article 35, chapitre IX. Cet article stipule que ce Conseil «émet son avis sur les grands plans nationaux dans le domaine de l'éducation, de l'enseignement et de la recherche scientifique, de la formation professionnelle et des perspectives de l'emploi. La loi fixe la composition de ce Conseil, ses attributions et les modalités de son fonctionnement».

Pourquoi l'école publique va mal ?

Dans de nombreux pays en développement, les écoles publiques ne reçoivent pas suffisamment de financement pour fournir une éducation de qualité. Cela peut entraîner un manque de ressources matérielles et humaines, telles que les manuels scolaires, les équipements de laboratoire, des enseignants qualifiés, etc. La Tunisie ne fait pas exception dans son contexte régional. Pour l'année en cours, le budget du ministère de l'Education représente près de 15 % du projet de budget de l'Etat, soit le plus élevé comparé aux budgets des autres départements ministériels.

Cependant, la part du lion de ce budget est absorbée par la gestion des affaires courantes et la masse salariale et non par les programmes de réformes.

Pour expliquer les principales raisons de la détérioration du système éducatif en Tunisie, l'expert en éducation Mourad Bahloul note que la manifestation de ce début d'effondrement de l'école publique n'est autre que «le problème du faible niveau des élèves».

Il détaille à La Presse qu«il existe des éléments fondamentaux responsables de la détérioration du système éducatif en Tunisie, confirmés par les standards internationaux, dont les plus importants sont l'obsolescence des programmes scolaires datant de plus de vingt ans, ainsi que d'autres raisons liées à la formation des enseignants et à leur capacité à travailler dans des situations éducatives conduisant à de bons acquis. En plus de l'infrastructure et des espaces scolaires qui ne sont plus adaptés à une école moderne, outre le calendrier scolaire mal planifié qui ne convient plus aux étudiants d'aujourd'hui».

Dans ce sens, l'expert en éducation a souligné que l'évaluation du système éducatif tunisien repose sur plusieurs questions fondamentales et qui doit s'étendre sur une période à long terme, «car le système éducatif est dynamique». «La première de ces questions est l'apprentissage qui ne répond pas aux normes mondiales de qualité, comme l'ont confirmé les enquêtes Pisa qui classent les établissements d'enseignement supérieur et ont montré que la Tunisie occupait les dernières places en termes de qualité de l'apprentissage en langues et en sciences de 2003 à 2015, proposant de revoir tout le système éducatif en ouvrant ses perspectives sur les nouvelles technologies.

Le décrochage scolaire, un dilemme

Dans notre pays, la détérioration de la qualité de l'enseignement explique d'une part l'essor du secteur privé, mais aussi le phénomène inquiétant du décrochage scolaire.

En effet, ce dilemme enfonce le clou dans un système éducatif de plus en plus faible. Il faut rappeler que ces dernières années, en moyenne plus de 100.000 élèves quittent l'école chaque année. Seulement 60 à 70% des décrocheurs rejoignent un cursus éducatif ou professionnel complémentaire, alors que les 30.000 jeunes restants ne bénéficient pas d'une «deuxième chance». C'est une bombe sociale à retardement, s'alarment les spécialistes et les sociologues d'autant plus que les écoles de seconde chance ne sont qu'un concept encore naissant en Tunisie et ne pourront en aucun cas remédier à la situation.

S'il est urgent, aujourd'hui, de réformer l'école publique-- d'ailleurs le Président de la République Kaïs Saïed en a fait une priorité, pour pouvoir offrir une meilleure éducation à nos enfants et jeunes-- il est également primordial d'offrir de nouveaux horizons à ces jeunes livrés à un avenir inconnu.

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