Tunisie: Projet du Code des eaux | Gestion des ouvrages hydrauliques - Une infrastructure obsolète à moderniser

17 Avril 2024

Une partie de l'eau gaspillée en Tunisie résulte de la situation des infrastructures et des réseaux d'eau. Les barrages tunisiens perdent, en effet, près de 20% de leur capacité de stockage à cause des sédiments et du manque d'entretien, s'accordent à dire experts tunisiens et internationaux.

Selon Hamza El Fil, chercheur en dessalement de l'eau et président du laboratoire du Centre de recherche et des technologies de l'eau, les ressources hydriques gaspillées sont de près de 30 % pour les réseaux de la Sonede et de plus de 40 % pour les canaux d'eau agricoles. Ce gaspillage de l'eau est dû, selon lui, à l'obsolescence des réseaux de distribution d'eau et au manque d'entretien, car le réseau de la Sonede s'étend sur plus de 55.000 kilomètres, dont 40% ont plus de 29 ans et 17 % plus de 49 ans. L'intervention tardive pour réparer les secteurs endommagés du réseau (près de 20.000 en 2019), les fuites d'eau au cours de l'année 2019 dans le réseau de la Sonede et l'absence de réseaux intelligents.

Le gaspillage se produit principalement dans les installations, plutôt que dans la consommation, c'est-à-dire au niveau des systèmes d'eau, en particulier dans les réseaux de production et de transmission de l'eau, donc en amont et non en aval. Ce déclin s'accentue chaque année avec l'obsolescence grandissante des installations, des équipements et des fournitures, couplée à des réductions dans les budgets d'entretien, de rénovation et d'expansion. La Sonede souffre de difficultés financières et ne peut compter que sur ses propres ressources.

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Pourquoi taxer les pauvres ?

La Tunisie a été secouée par des soulèvements populaires survenus dans plusieurs régions en raison de pénuries successives et fréquentes d'eau, a rapporté le directeur de la Banque mondiale en Tunisie, Tony Verheijen, en mars 2019 sur le site World Bank Blogs. « La raison principale est que les cinquante personnes les plus riches (...) utilisent l'eau potable pour laver les voitures et arroser les jardins », a-t-on précisé.

S'y ajoute également la pression supplémentaire sur la demande en eau due à l'augmentation du nombre de touristes. D'autant que les hôtels rechignent à réduire leur consommation d'eau. « L'eau est l'une des ressources naturelles les plus précieuses et les plus rares en Tunisie, mais elle est vendue pour des miettes (...) L'eau est la seule denrée très bon marché, ce qui n'incite pas les gens à être économes dans leur consommation », lit-on dans une étude de la Banque mondiale.

L'Instance économique internationale recommande plutôt la modification des tarifs pour les ramener à des niveaux permettant le recouvrement des coûts.

Mais la Banque mondiale n'est pas la seule à s'inquiéter des ressources en eau de la Tunisie. En décembre 2018, le Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) allemand avait signé avec le gouvernement tunisien un accord de prêt de 100 millions d'euros pour financer le « Programme d'appui aux réformes du secteur de l'eau - deuxième phase ». L'accord couvre la mise en oeuvre de 13 réformes, y compris l'approbation du nouveau « Code des eaux », l'augmentation du tarif de l'eau potable de 150 centimes par CBM, l'amélioration du taux des factures d'eau, l'augmentation de la facture de filtration de l'eau de 8% et du tarif de l'eau d'irrigation.

En outre, l'Agence française de développement (AFD) a signé un accord de prêt de 33 millions d'euros avec la Tunisie pour soutenir le deuxième programme de développement du secteur de l'eau Piseau II, dont l'objectif principal consiste à développer les réseaux d'eau dans les zones rurales. Pour assurer la « durabilité des implications du projet », l'AFD s'est attachée à «compléter le processus de transfert du risque de l'Etat aux utilisateurs finaux et l'approbation de tarifs adéquats ».

Soucieuse d'interagir positivement avec les préoccupations de ses partenaires internationaux, la Tunisie a augmenté le tarif de l'eau potable deux fois, et non une : la première en 2016 et la seconde en 2020. Jusqu'en 2015, la Sonede a adopté un tarif progressif pour la consommation : les 20 premiers MBC pour un prix « bas », le deuxième pour un prix plus élevé, etc. L'utilisateur final paie en fonction des différents tarifs. Par exemple, s'il consomme 30 MBC, il paiera les 20 premiers MBC à un prix bas et les 10 MBC supplémentaires à un prix plus élevé. A partir de 2016, le tarif de chaque niveau de consommation a été augmenté de 30 % et le tarif du niveau de consommation supérieur a été approuvé.

Il reste néanmoins un grand travail à accomplir, surtout avec l'approbation du nouveau code des eaux.

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