Madagascar: Relation entre les Malgaches - Plus d'un siècle d'animosité

La majorité des notables et des hauts dignitaires de la région du Nord et Nord Ouest entretiennent plus un lien d'amitié avec les Français qu'avec leurs compatriotes Merina. Ce choix leur semble évident. Considéré comme libérateur, l'Hexagone est un allié naturel des élites Tavaratra. Les Antakarana et les Sakalava du nord sont entièrement persuadés qu'ils ont connu le goût de l'éducation grâce à la mère patrie. Logique s'ils lui adressent une grande allégeance. Entre 1950 et 1990, la méfiance à l'égard des Merina oblige les originaires de la partie septentrionale de la Grande-Ile à se livrer dans la course à la bureaucratie dans l'objectif de démentir que l'administration est forcément réservée aux gens des Hautes Terres Centrales.

En vérité, l'idée est d'occuper en premier lieu les places importantes dans la jeune province comme en 1956 durant laquelle les conseillers provinciaux étaient majoritairement composés des enfants du terroir, à savoir Justin Bezara et Joseph Jaozandry, des noms qui ne commencent pas par « Ra- ». Malgré la mésentente qui rythme le mouvement politique, les élites ont tout de même trouvé un terrain d'entente, reprendre les sièges occupés par les « Borizano », (un nom attribué aux originaires des Hautes Terres Centrales)

Par contre, le défi s'avère ambitieux pour une zone dominée par ceux-ci depuis plus d'un siècle. Pôle d'attraction depuis les années 1920, Diego-Suarez est la destination favorable au commerce pour les marchands ambulants Merina et Betsileo. Accumulant des bénéfices avec leur vente de produits au micro-détail, ces groupes humains s'y installent définitivement. De fil en aiguille, ils arrivent à monter leurs magasins de gros qui gêneront le monopole des grandes boutiques créoles, françaises, indiennes. Cette ascension en l'espace de 20 ans crée une irritation auprès des anciens ravitailleurs de la ville.

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Par conséquent, ils incitent les clients à boycotter les produits vendus par ces nouveaux riches migrants. Jugées de qualité inférieure, les marchandises sont tout de même achetées par la masse populaire. Par ailleurs, ayant des ressources monétaires suffisantes, ces migrants inscrivent leurs enfants dans des écoles prestigieuses de Diego-Suarez. Ainsi, cette nouvelle génération se retrouve sur les mêmes bancs que les fils des bourgeois locaux. Certes, une entente se forme timidement dans l'établissement. Quoiqu'ils soient nés à Antsiranana, ces jeunes Merina ne se retrouvent pas dans la société. Cela semble contradictoire avec ce qui a été avancé antérieurement. N'empêche, Diego-Suarez est la cité où la cohabitation harmonieuse prédomine...

Du temps de la Deuxième République, la « bourgeoisie côtière » continue à réduire l'écart. En dépit de cette culture d'excellence tardive, certaines familles se heurtent à une difficulté, leur nom. Majoritairement de confession musulmane, les citoyens malgaches du Nord et du Nord-Ouest portent des prénoms arabes. Donc, bon nombre n'obtiendront pas des bourses à l'extérieur. Ce problème irrite les parents. Encore une fois, le sentiment profond de mal-être surgit.

Apparemment, la malgachisation se résume par la composition nominale. Hormis quelques exceptions, car il y avait tout de même des Mohamad et des Ismaël qui dirigeaient des départements, beaucoup ont été recalés. Aly Zawad étudiant de l'époque en était victime. « J'étais en perpétuelle intégration. Ma carte d'identité ne servait à rien », a-t-il témoigné... Entre frustration et découragement, les compatriotes musulmans forment une petite association communautariste. Les années se succèdent, les générations aussi. La pensée persiste encore. Les élites passent. L'histoire, quant à elle, est enracinée. Voulant briser la glace, La génération Z essaie de tourner la page...

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