Johannesburg — Le jeune Nkosi Johnson, âgé de douze ans, qui est devenu le symbole de la lutte contre le SIDA en Afrique du Sud, a eu un enterrement digne dun héros a Johannesburg, samedi durant une cérémonie à laquelle assistaient des milliers de personnes, dont lancien président Zambien, Kenneth Kaunda.
Nkosi a perdu son combat contre le SIDA le 1er juin, après être tombé dans le coma juste avant la nouvelle année. Sa mère adoptive, Gail Johnson, qui a recueilli le jeune orphelin du SIDA quand il avait deux ans, et sa grand-mère maternelle, Ruth Khumalo unies dans leur peine ont pleuré lorsque le cercueil blanc et dorée de Nkosi fut inhumé au cimetière de Westpark à Johannesburg.
Auparavant, il y avait eu des rumeurs de tension et de mésentes entre la mère adoptive blanche et la grand-mère Zulu, qui ont été dissipées grâce à lintervention de léglise.
Nkosi attira lattention et le soutien de la communauté internationale, l'année dernière lorsquil a été propulsé au devant de la scène par son discours d'ouverture à la 13ème conférence internationale des Nations-Unies sur le SIDA, qui sest tenue dans la ville portuaire de Durban en Afrique du Sud. Il implora les sud-africains daccepter les gens vivant avec le SIDA et le VIH et de les traiter avec dignité et amour. «Nous sommes tous des êtres humains. Nous sommes normaux», avait-il dit à laudience.
Frêle et émacié, mais avec un sourire éclatant, le jeune activiste avait également remis en cause la position ambivalente du gouvernement sud-africain sur le lien entre le VIH et le SIDA. Nkosi avait alors demandé au gouvernement de Pretoria de fournir des médicaments aux malades, particulièrement aux femmes enceintes infectées par le virus, afin d empêcher la transmission du virus à leurs bébés.
En son temps, l'ancien Président Nelson Mandela avait rendu hommage à Nkosi, en le qualifiant de jeune combattant courageux qui avait ouvert les yeux de l'Afrique du Sud sur la réalité, la douleur et sur l'impact du SIDA. Le porte-parole du gouvernement, Bongani Khumalo, a répété la même chose durant le service funèbre samedi. Il a presente Nkosi comme étant un « jeune guerrier». Quant à Mvume Dandala, l'évêque de l'église méthodiste qui présidait la cérémonie, il a ajouté que Xolani Nkosi Johnson était un exemple que chacun devrait suivre.
L'évêque Dandala a ensuite demandé aux sud-africains de continuer la lutte de Nkosi et dêtre responsables de leurs actes. «Quoi que nous fassions, la sexualité est sacrée. Soyons, sil vous plaît responsables avec notre sexualité. Si vous croyez que les préservatifs, ou d'autres pratiques vous aideront, utilisez les si vous voulez. Mais soyez prudents». Daprès Dandala, ceux qui sont opposés aux préservatifs devraient s'abstenir mais ne devraient pas être traités comme des victimes pour cela.
Dans ce que beaucoup ont perçu comme une réprimande envers le gouvernement sud-africain, l'évêque ajouta en criant presque " Quimporte votre position dans le débat sur le SIDA ou sur les anti-rétroviraux, mais montrez à ce pays, à ces enfants un peu de compassion ".
Le serment passionnant de lévêque Dandala a été vivement applaudi et suivi dhymnes à la fois tristes et joyeux, chantés en zulu et en anglais par le choeur et la congrégation, pendant que lassistance - noirs et blancs confondus- dansait et applaudissait dans l'église méthodiste dans le centre de Johannesburg.
Plusieurs personnes se sont effondrées et ont fondu en larmes lorsque les jeunes amis de Nkosi de l'orphelinat pour enfants séropositifs et femmes enceintes atteintes par le VIH, créé par sa mère adoptive, sont montés sur l'autel et lui ont dédié une chanson d' adieu qu'ils avaient spécialement composée pour lui.
Sa mère adoptive, Gail Johnson, dira pendant la cérémonie funèbre: " Nkosi m'a enseigné l'amour et le dévouement sans condition. Je demande aux sud-africains de faire la même chose ".
Dans un discours émouvant prononcé à l'église, sa grand-mère, Ruth Khumalo, a remercié «la femme blanche» (Johnson) pour s'être occupée de Nkosi après le décès de sa mère biologique emportée par le SIDA en 1997. Sexprimant en Zulu, Khumalo a indiqué que Nkosi et Johnson «avaient voyagé ensemble» et malgrè les obstacles, «le voyage prend fin aujourd'hui».
Des banderoles illuminées par le visage souriant et les yeux brillants de Nkosi Johnson portant une casquette de baseball, demandaient à tout le monde àléglise de «laisser lamour et le courage de Xolni Nkosi remplir votre cur de determination pour soccuper des orphelins infectés sur cette terre». Des douzaines dactivistes et de personnes vivant avec la virus portaient des T-shirts avec le slogan " mon ami ayant le SIDA est toujours mon ami ", un message souvent répété par Nkosi.
Hors de léglise, des membres de la «Campagne dAction pour le Traitement» (Treatment Act Campaign) brandissaient des posters de Nkosi demandant au gouvernement sud-africain de mettre en place, dès maintenant, un plan daction contre le SIDA», un mouvement soutenu par la mère de Nkosi et lun des arguments des discours de Nkosi, delivré dans une petite voix passionnée.
Le représentant du gouvernment sud-africain résuma l'humeur et les sentiments de ceux qui ont assisté à l'enterrement en cesmots: " ce jeune garçon na vécu quune douzaine dannées, mais son impact, et l'effet de sa vie est profond. Son impact est infini. Nous ne devrions pas parler de Nkosi comme si Nkosi nexistait plus. Nkosi est bien vivant "
Kenneth Kaunda, dont le fils a été emporté par le SIDA en 1986, lorsquil était encore président de la Zambie, a dit à allAfrica.com, " je peux dire sans crainte de me contredire, que ce jeune monsieur (Nkosi) a contribué énormèment au développement et à l'unité de la race humaine. Il a réuni deux races ; elles sont maintenant une famille. Ce n'est pas une chose facile à réaliser ".
Kaunda a rendu hommage à Nkosi pour avoir parlé ouvertement du SIDA, permettant ainsi de briser le mur du silence autour de cette maladie ".
Kaunda, qui dirige une organisation de lutte contre le SIDA en Zambie, a indiqué que Nkosi «avait souri face à l'obscurité. " VIH " est l'obscurité en elle-même a dit l'ancien président. «Mais il lui a souri et la vaincu seulement par cet acte «.
Kaunda a précisé que le SIDA est une maladie qui tue des millions de personnes, surtout sur le continent africain " et nous devons le combattre ". Il a dit que Nkosi Johnson était un combattant contre le SIDA " et je suis ici pour temoigner demon respect pour ce jeune homme ".
Environ 11 pour cent des sud-africains sont infectés par le virus du SIDA..