Kara — 220 journalistes francophones rassemblés en un seul et même endroit. L'occasion était trop belle pour le président togolais Faure Gnassingbé, pour ne pas être saisie afin de s'exprimer sur la situation et la nouvelle politique de son pays.
Chose faite au détour d'une excursion organisée par la section locale de l'Union internationale de la presse francophone (UPF), à la faveur de ses 37èmes assises.
Ce dimanche 6 novembre à Kara (à environ 500km au nord de Lomé), sur les terres du clan Gnassingbé, c'est un chef de l'état décontracté mais à la mine très sérieuse qui a répondu à la série - limitée tout même - de questions allant de la réconciliation entre l'armée togolaise et les populations aux relations du pays avec les institutions financières internationales et la pratique de la démocratie version Lomé.
Faure Gnassingbé s'est réjoui de voir que " le Togo et son problème ne suscitent pas lassitude et indifférence de la part de ses amis. Le Togo n'est pas un cas désespéré " et pour lui, les difficultés de son pays ne sont pas différentes de celles des nations, même développées, faisant vite référence à la France et aux troubles sociaux qui l'agitent depuis deux semaines.
Expliquant les répressions sanglantes de l'armée avant, pendant et après les élections d'avril dernier, Faure Gnassingbé a reconnu que les militaires avaient été commis à une mission de restauration de l'ordre public, pour l'accomplissement de laquelle ils n'avaient ni la formation, ni les équipements. Il a regretté ces " incidents " dus au fait que " les difficultés survenues après la suspension de la coopération économique internationale ont entraîné une diminution des effectifs de la police et de la gendarmerie ". Réduits chacun d'environ deux tiers, ces deux corps se sont vite retrouvés débordés et l'armée, à ce stade, ne pouvait plus qu'intervenir, avec la suite que l'on connaît. Mais le président pense que l'armée n'étant pas " en dehors du peuple, sa réconciliation avec les populations entre dans le cadre d'un processus de réconciliation générale qu'il dit déjà en cours et qu'il voudrait mener à la marocaine, avec la mise en place de la Commission de réflexion et de réhabilitation. Le travail de cette instance, avec le concours du HCR devrait permettre de l'important flot de réfugiés - où le président compte tant des victimes que des bourreaux - ayant fui vers le Ghana et le Bénin voisins.
Au sujet des relations du Togo avec la finance internationale, Faure Gnassingbé a précisé qu'à l'heure actuelle, seule la Banque islamique de développement (BID) et la Banque africaine pour le développement économique (BADEA) soutiennent les programmes de son pays. Il a insisté sur le fait que le Togo a trop longtemps payé le prix de la suspension de la coopération occidentale et privilégie désormais la coopération sud-sud, notamment avec l'Inde et le Brésil.
Une coopération qui n'a pas à souffrir de la condition de d'application des principes de démocratie et de bonne gouvernance tels que dictés par l'Occident. Faure Gnassingbé estime que l'essentiel est de garantir la liberté d'expression, d'opinion, des médias libres. Dans le même ordre d'idées, il ne partage pas l'idée de l'alternance comme soutien de la démocratie. " L'alternance est nécessaire au début, mais pas tout le temps. Il faut laisser le choix au peuple d'accorder par exemple plus de deux mandats à un président. Ce qu'il faut, c'est mieux organiser les processus électoraux ".
La politique étrangère du Togo laisse transparaître cette volonté. Au moment où l'Union européenne s'ouvre à l'Est et réduit par conséquent le volume de son aide à l'Afrique, Faure Gnassingbé attend de coopérer avec ces pays en matière de santé, d'éducation et de transferts de technologie