Rapport du président de la Commission sur les activités du Comité ad hoc de haut niveau de l'UA sur la situation en Libye

26 Avril 2011
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African Union (Addis Ababa)
communiqué de presse

I. INTRODUCTION

1. Le présent rapport est soumis en application des communiqués adoptés par le Conseil lors de ses 261ème et 265ème réunions, tenues respectivement le 23 février et le 10 mars 2011. Il donne un aperçu des activités entreprises par le Comité ad hoc de haut niveau de l'UA sur la situation en Libye depuis sa création, en mars 2011. Le rapport couvre également les autres efforts internationaux relatifs à la crise dans ce pays. Il se conclut par des observations sur la voie à suivre en ce qui concerne la mise en oeuvre du mandat du Comite ad hoc et la poursuite des efforts de l'UA.

II. HISTORIQUE

2. Le Conseil a été saisi, pour la première fois, de la situation en Libye, lors de sa 261ème réunion tenue le 23 février 2011. Dans le communiqué publié à cette occasion, le Conseil a exprimé sa profonde préoccupation face à l’évolution de la situation dans ce pays, et a fermement condamné l'utilisation indiscriminée et excessive de la force et d’armes contre des manifestants paisibles, en violation des droits de l’Homme et du droit international humanitaire. Le Conseil a lancé un appel aux autorités libyennes pour qu’elles assurent la protection et la sécurité de leurs concitoyens, ainsi que la fourniture d’une assistance humanitaire aux blessés et autres personnes dans le besoin. Le Conseil a souligné la légitimité des aspirations du peuple libyen à la démocratie, à la réforme politique, à la justice et au développement socio?économique. Le Conseil a, en outre, souligné la nécessité de préserver l'intégrité territoriale et l'unité de la Libye.

3. Le même jour, j'ai publié un communiqué de presse dans lequel j’ai condamné l'usage disproportionné de la force contre les civils et déploré vivement les nombreuses pertes en vies humaines alors enregistrées. J'ai réitéré l'appel lancé par le Conseil en vue de l'arrêt immédiat de la répression et de la violence, et j’ai souligné que seuls le dialogue et la concertation permettront aux Libyens de trouver des solutions idoines aux défis auxquels leur pays est confronté et d’engager les réformes nécessaires pour répondre aux aspirations populaires.

4. Le 10 mars 2011, le Conseil, lors de sa 265ème réunion tenue au niveau des chefs d'Etat et de Gouvernement, a examiné l'évolution de la situation en Libye. Dans le communiqué publié à l’issue de ses délibérations, le Conseil a réitéré la préoccupation de l'UA face à la situation qui prévaut en Libye, estimant que celle?ci fait peser une grave menace sur la paix et la sécurité dans ce pays et dans la région dans son ensemble, ainsi que face à ses conséquences humanitaires; souligné la légitimité des aspirations du peuple libyen à la démocratie, à la réforme politique, à la justice, à la paix et à la sécurité, ainsi qu’au développement socio économique, et la nécessité de veiller à ce que ces aspirations soient satisfaites de façon pacifique et démocratique; et réitéré la condamnation ferme et sans équivoque, par l'UA, de l'utilisation indiscriminée de la force et d’armes mortelles, d’où qu’elle vienne, de même que la transformation de manifestations pacifiques en rébellion armée. Le Conseil a réaffirmé son ferme attachement au respect de l'unité et de l'intégrité territoriale de la Libye, ainsi que son rejet de toute intervention militaire étrangère, quelle qu’en soit sa forme.

5. Par ailleurs, le Conseil a exprimé sa conviction que la situation actuelle en Libye appelle une action africaine urgente s’articulant autour des points suivants :

(i) la cessation immédiate de toutes les hostilités ;

(ii) la coopération des autorités libyennes concernées pour faciliter l'acheminement diligent de l'aide humanitaire aux populations dans le besoin ;

(iii) la protection des ressortissants étrangers, y compris les travailleurs migrants africains vivant en Libye ; et

(iv) l'adoption et la mise en oeuvre des réformes politiques nécessaires pour l'élimination des causes de la crise actuelle. Le Conseil a décidé de mettre en place un Comité ad hoc de haut niveau de l’UA sur la Libye comprenant cinq chefs d'Etat et de Gouvernement, ainsi que le Président de la Commission, avec pour mandat:

(i) d’interagir avec toutes les parties en Libye et d'évaluer continuellement l'évolution de la situation sur le terrain;

(ii) de faciliter un dialogue inclusif entre les parties libyenne sur les réformes appropriées à entreprendre; et

(iii) d’interagir avec les partenaires de l'UA, en particulier la Ligue des Etats arabes, l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), l'Union européenne (UE) et les Nations unies, afin de faciliter la coordination des efforts et de solliciter leur appui pour le règlement rapide de la crise.

6. Dans sa décision, le Conseil m'a demandé d’entreprendre des consultations pour finaliser la composition du Comité ad hoc. En conséquence, et à la suite de consultations, j'ai annoncé, le 11 mars 2011, que le Comite ad hoc serait composé des chefs d'Etat des pays membres suivants de l'UA: République islamique de Mauritanie, République du Congo, République du Mali, République d'Afrique du Sud et République d'Ouganda.

7. D’autres organisations ont également pris des décisions en relation avec la situation en Libye. Le 26 février 2011, le Conseil de sécurité, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, a adopté la résolution 1970 (2011). Dans cette résolution, le Conseil de sécurité a décidé de:

(i) saisir le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de la situation qui prévaut en Libye depuis le 15 février 2011 ;

(ii) d'imposer un embargo sur les armes à destination de la Libye, ainsi que l'interdiction de voyager et le gel des avoirs à l’encontre de nombre de responsables libyens et/ou entités. Le Conseil de sécurité a également demandé à tous les Etats membres de faciliter et d’appuyer le retour des agences humanitaires et de mettre à disposition, en Libye même, une aide humanitaire et connexe.

8. Lors de son Sommet du 11 mars 2011, l’UE a déclaré que le dirigeant libyen doit se retirer et que son régime a perdu toute légitimité, considérant le Conseil national de transition (CNT) comme un interlocuteur politique. Le Sommet a indiqué que les Etats membres de l’UE examineraient toutes les options nécessaires afin d’assurer la protection des civils, à condition qu'il y ait un besoin avéré, une base juridique claire et un soutien de la région. Le 12 mars 2011, le Conseil de la Ligue des Etats arabes, lors de sa session extraordinaire tenue au Caire, en Egypte, a demandé au Conseil de sécurité d’assumer ses responsabilités au regard de la détérioration de la situation en Libye, y compris l'imposition immédiate d'une zone d'exclusion aérienne et la création de zones de sécurité, afin d’assurer la protection du peuple libyen et d'autres populations. L'appel pour une zone d'exclusion aérienne a également été soutenu par l'OCI.

9. Le 17 mars 2011, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1973 (2011). Dans cette résolution, le Conseil de sécurité a:

(i) exigé un cessez?le?feu immédiat et la cessation totale des violences et de toutes les attaques et exactions contre la population civile;

(ii) souligné la nécessité de redoubler d’efforts pour apporter une solution à la crise qui réponde aux revendications légitimes du peuple libyen, et a noté la décision du Secrétaire général des Nations unies de dépêcher son Envoyé spécial en Libye et celle du Conseil de paix et de sécurité de l'UA de dépêcher sur place son Comité ad hoc de haut niveau sur la Libye, aux fins de faciliter un dialogue qui débouche sur les réformes politiques nécessaires en vue d’un règlement pacifique et durable ; et a exigé des autorités libyennes qu’elles respectent les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, prennent toutes les mesures requises pour protéger les civils et satisfaire leurs besoins élémentaires et garantissent l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l'aide humanitaire.

10. Par ailleurs, le Conseil de sécurité a autorisé les Etats membres qui ont adressé une notification au Secrétaire général, agissant à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’accords régionaux, à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les populations et zones civiles menacées d'attaques en Libye, y compris Benghazi, tout en excluant le deploiement d’une force d'occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n’importe quelle partie du territoire libyen. Le Conseil de sécurité a, en outre, décidé d'interdire tous vols dans l'espace aérien libyen, afin d'aider à protéger les civils. La résolution a également abordé d'autres questions relatives notamment à l'application de l'embargo sur les armes, l’interdiction des vols et le gel des avoirs. Le Conseil de sécurité a reconnu le rôle important de la Ligue des Etats arabes et, gardant à l'esprit le Chapitre VIII de la Charte des Nations unies, a demandé aux Etats membres de la Ligue de coopérer avec d'autres Etats membres dans la mise en oeuvre des dispositions de la résolution 1973 (2011) relatives à la protection des civils.

11. La campagne militaire pour faire respecter la zone d'exclusion aérienne a commencé immédiatement après le "Sommet de Paris pour le soutien au peuple libyen", qui s'est tenu le 19 mars 2011. Le 31 mars, l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) a pris le commandement des opérations aériennes internationales au dessus de la Libye, qui furent d'abord coordonnées par le Commandement américain en Afrique (AFRICOM) basé à Stuttgart. Une semaine plus tôt, l'OTAN avait décidé de lancer une opération visant à faire respecter l'embargo sur les armes contre la Libye. L'Alliance exécute toutes ces tâches dans le cadre de l'opération «Protecteur Unifié".

12. Dans l'intervalle, le 29 mars 2011, à Londres, les Ministres des Affaires étrangères et dirigeants des Nations unies, de la Ligue des Etats arabes, de l'OCI, de l'UE et de l'OTAN se sont réunis pour discuter de la situation en Libye. Ils sont, en particulier, convenus de créer un Groupe de contact sur la Libye avec pour objectif de fournir :

(i) une direction et des orientations politiques à l'effort international concernant la Libye,

(ii) un forum pour coordonner la réponse internationale sur la Libye, et

(iii) un point focal au sein de la communauté internationale pour assurer le contact avec les parties libyenne.

13. Au début du mois d'avril, le Conseil de l'Union européenne a adopté une décision stipulant que l'UE, à condition que l'Office des Nations unies pour la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA) en fasse la demande, entreprendrait une opération militaire dans le cadre de la Politique commune de défense et de sécurité (PCDS), afin de contribuer à:

(i) la circulation et à l'évacuation sûres des personnes déplacées, et

(ii) au soutien, avec des capacités spécifiques, des agences humanitaires dans la conduite de leurs activités. Au moment de la finalisation du présent rapport, aucune demande n'avait encore été adressée à l'UE pour qu’elle procède à l'opération projetée.

III. PREMIÈRE RÉUNION DU COMITÉ AD HOC

14. Le Comité ad hoc a tenu sa première réunion à Nouakchott, en Mauritanie, le 19 mars 2011. Ont pris participé à la réunion les Présidents Mohamed Ould Abdel Aziz de la République islamique de Mauritanie; Denis Sassou Nguesso de la République du Congo; Amadou Toumani Touré de la République du Mali et les Ministres représentants les Présidents Yoweri Museveni de la République d'Ouganda et Jacob Zuma de la République d'Afrique du Sud. J'ai également participé à la réunion, en même temps que le Commissaire à la Paix et à la Sécurité, l'Ambassadeur Ramtane Lamamra.

15. La réunion, qui a permis de procéder à un échange de vues approfondi sur la situation en Libye, ainsi que sur les modalités de mise en oeuvre du mandat du Comité ad hoc de haut niveau de l'UA, s’est tenue à un moment critique dans la situation en Libye, marquée par la poursuite des combats, avec les graves conséquences humanitaires qui en résultent, ainsi que par le début de la mise en oeuvre des dispositions pertinentes de la résolution 1973(2011). Dans ce contexte, le Comité ad hoc de haut niveau a réitéré la profonde préoccupation de l'UA face à la situation actuelle et à ses conséquences humanitaires. Il a souligné la grave menace que cette situation fait peser sur la paix, la sécurité et la stabilité dans la région dans son ensemble, et a réaffirmé la conviction de l'UA quant à la nécessité d'une action africaine urgente s’articulant autour des éléments de la Feuille de route adoptée le 10 mars 2011.

16. A leur réunion de Nouakchott, les membres du Comité ad hoc de haut niveau avaient prévu de se rendre en Libye, le 20 mars 2011, pour y rencontrer les parties, qui avaient, toutes les deux, marqué leur accord pour traiter avec lui. A cette fin, et conformément à la résolution 1973 (2011), le Comité, par l'intermédiaire de la Commission, avait demandé l'autorisation nécessaire pour les vols devant conduire ses membres en Libye, aux fins de mener à bien son mandat. Cette autorisation lui fut refusée. Le Comité a exprimé son regret de n’avoir pu se rendre en Libye, comme il l’avait envisagé.

17. Aux fins de contribuer activement à la recherche d'une solution rapide, qui s’inscrive dans le cadre de la légalité internationale telle que reflétée dans les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, le Comité ad hoc de haut niveau a:

(i) lancé un appel pressant à toutes les parties concernées, à savoir le Gouvernement libyen et le CNT, pour qu’elles observent sans délai une cessation totale des hostilités et prennent d'autres mesures destinées à désamorcer la tension et à assurer la protection de la population civile. A cet égard, le Comité est convenu de saisir, formellement et immédiatement, les deux parties de son invitation pressante à réagir positivement à cette demande ;

(ii) réaffirmé la pertinence des éléments de la Feuille de route articulée par le Conseil. Il a invité les autorités libyennes et le CNT à une rencontre, dans les plus brefs délais possibles, à Addis Abéba ou dans tout autre endroit qui conviendrait aux parties, pour discuter de cette Feuille de route, y compris la mise en place et la gestion d'une période de transition inclusive qui débouchera sur des réformes politiques répondant aux aspirations du peuple libyen;

(iii) demandé à la Commission de l'UA de prendre l’initiative d’une réunion, à Addis? Abéba, le 25 mars 2011, de hauts représentants de la Ligue des Etats arabes, de l'OCI, de l'UE et des Nations unies (Secrétariat et les cinq membres permanents), ainsi que d'autres partenaires et parties prenantes, aux fins de :

(a) s’accorder sur les voies et moyens d’une sortie rapide de crise, sur la base de la Feuille de route de l'UA, ainsi que du paragraphe 2 de la résolution 1973 (2011), et

(b) convenir d’un mécanisme de consultations continues et d’actions concertées à mettre en oeuvre; et (iv) décidé également d'organiser, sous l'égide des Ministres des Affaires étrangères de ses pays membres, ainsi que de la Commission de l'UA, une consultation régionale regroupant tous les pays voisins de la Libye et les différents partenaires concernés.

18. Par ailleurs, le Comité ad hoc de haut niveau a réitéré l'appel de l'UA aux Etats membres pour qu’ils apportent un soutien logistique et humanitaire aux travailleurs migrants africains désirant quitter la Libye, ainsi qu’aux pays voisins contraints de supporter un fardeau disproportionné, et aux pays d'origine pour faciliter la réinsertion de ces travailleurs migrants. A cet égard, le Comité a demandé à la Commission de prendre les mesures nécessaires pour sensibiliser les Etats membres et convoquer une conférence de mobilisation de ressources.

19. Le Comité ad hoc de haut niveau a réaffirmé sa détermination à accomplir sa mission, face aux développements préoccupants de la situation et au recours à une intervention armée internationale; a appelé à la retenue ; et s'est engagé à ne ménager aucun effort pour faciliter une solution pacifique, dans un cadre africain, prenant dûment en compte les aspirations légitimes du peuple libyen. Le Comité a souligné qu'il agirait dans le cadre de son mandat et de façon compatible avec, et complémentaire à, la résolution 1973 (2011) du Conseil de sécurité des Nations unies, et en a appelé à la communauté internationale dans son ensemble pour qu’elle apporte un appui sans réserve à ses efforts.

IV. SUIVI DE LA RÉUNION DE NOUAKCHOTT DU 19 MARS 2011

Réunion consultative sur la Libye.

20. En application des paragraphes pertinents du communiqué de la réunion de Nouakchott du Comité ad hoc de haut niveau sur la Libye, une réunion consultative sur la Libye s’est tenue à Addis Abéba le 25 mars 2011. Outre les membres du Comité ad hoc et du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, la réunion a regroupé les pays voisins de la Libye et les autres pays de la région, ainsi que des partenaires multilatéraux et bilatéraux de l’UA. J’ai présidé cette réunion, à laquelle a également pris part le Commissaire à la Paix et à la Sécurité.

21. La réunion a donné à l’UA l’occasion d’informer les participants des conclusions de la réunion de Nouakchott et des efforts qu’elle déploie en vue d’un règlement pacifique et rapide de la crise. Les participants à la réunion se sont félicités de ce que les efforts du Comité ad hoc de haut niveau, dont le rôle est reconnu par la résolution 1973(2011) du Conseil de sécurité des Nations unies, sont compatibles avec les, et complémentaires aux, dispositions pertinentes de ladite résolution. Ils ont été encouragés par la volonté du Comité ad hoc de haut niveau de s’acquitter pleinement de son mandat, y compris à travers la visite prévue en Libye et, le cas échéant, ailleurs, pour y rencontrer les parties libyennes.

22. La réunion est parvenue à un consensus sur les éléments de la Feuille de route de l'UA. Elle a souligné la nécessité et l'urgence de la protection effective des populations civiles et de la cessation immédiate des hostilités et de tous les actes de violence. Elle a encouragé l'UA, la Ligue des Etats arabes, les Nations unies, l'OCI et l’EU à envisager, avec l'urgence requise et dans le cadre de la résolution 1973 (2011), la mise en place rapide d'un mécanisme de suivi, notamment par l’organisation, à Addis Abéba, d’une réunion technique pour la planification et la mise en oeuvre de la cessation des hostilités d'une manière efficace et crédible. La réunion a apporté son soutien aux efforts en cours visant à promouvoir ces objectifs, et ce en facilitant le dialogue entre les autorités libyennes et le CNT, et a exhorté les deux parties à apporter leur pleine coopération

23. La réunion a exprimé sa préoccupation face à la situation humanitaire sur le terrain. Elle a réaffirmé l'obligation de toutes les parties prenantes de respecter le droit international humanitaire. La réunion a lancé un appel à tous les membres de la communauté internationale à apporter toute l'assistance nécessaire aux travailleurs migrants africains vivant en Libye, pour faciliter le rapatriement de ceux qui souhaitent quitter le pays, à soutenir les pays voisins contraints de supporter un fardeau disproportionné du fait de l’accueil de ces travailleurs migrants, et à contribuer financièrement aux efforts visant à faciliter la réinsertion socio économique des travailleurs migrants dans leurs pays d'origine.

24. La réunion a reconnu que la poursuite et l'aggravation de la crise actuelle en Libye a de graves conséquences pour les pays voisins et les autres pays de la région, ainsi que pour la sécurité et la stabilité régionales, en particulier en ce qui concerne la prolifération illicite des armes, le terrorisme et d'autres formes de criminalité transnationale organisée. Elle a enregistré l'engagement de l'UA à travailler avec les pays de la région, en particulier ceux de la bande sahélosaharienne, les organisations internationales compétentes et les partenaires intéressés, afin de relever, d'une manière satisfaisante, les problèmes existants.

25. Enfin, la réunion est convenue de la nécessité d'une consultation et d’une coordination sous l'égide de l'UA, de la Ligue des Etats arabes, de l'OCI, de l'UE et des Nations unies, pour faciliter l'impulsion, l'harmonisation et le succès des efforts internationaux pour le règlement rapide, juste et durable de la crise libyenne. Les pays voisins et les autres pays de la région, ainsi que des partenaires bilatéraux, participeront également à la consultation et à la coordination, afin d'améliorer leur efficacité. Deuxième réunion du Comite ad hoc au niveau ministériel.

26. Le 25 mars 2011, le Comité ad hoc a tenu sa deuxième réunion à Addis Abéba, au niveau des Ministres des Affaires étrangères, conformément aux dispositions pertinentes du communiqué du Conseil de paix et de sécurité du 10 mars 2011. A cet égard, il convient de rappeler que, lors de sa réunion de Nouakchott, le Comité ad hoc avait adressé des invitations aux autorités libyennes et au CNT pour participer à une réunion consultative à Addis Abéba. Alors que les représentants du Gouvernement libyen ont pris part à la réunion, ceux du CNT n’ont pu le faire. Le Commissaire à la Paix et à la Sécurité a représenté la Commission lors de cette réunion ministérielle du Comité, qu'il a présidée.

27. Au cours de l'interaction entre le Comité et les représentants de la Jamahiriya arabe libyenne, ces derniers ont réitéré l'acceptation sans condition de la Feuille de route de l'UA par le Gouvernement libyen. Ils ont, en outre, souligné l'engagement des autorités libyennes en faveur d’un cessez?le?feu crédible et efficace et, à cet effet, ont marqué leur volonté de faciliter la création et le déploiement d'un mécanisme de suivi et de vérification. La délégation a également exprimé la disposition du Gouvernement libyen à mettre en oeuvre les autres aspects de la Feuille de route de l'UA, y compris l'adoption et la mise en oeuvre, de manière pacifique et démocratique, de réformes politiques qui répondent aux aspirations du peuple libyen. Le Comité ad hoc a pris note de la position ainsi exprimée par la délégation du Gouvernement libyen, et l'a assurée de son engagement continu.

28. En conclusion, les Ministres et la Commission ont procédé à un échangé de vues sur les mesures à prendre en vue de la mise en oeuvre du mandat du Comité ad hoc et, à cet égard, sont convenus d’entreprendre rapidement la visite prévue du Comité ad hoc en Libye, au niveau des chefs d'Etat. En application de ce qui a été convenu, la Commission a pris des mesures pour obtenir l'autorisation de l'OTAN, en tant qu'organisation faisant respecter la zone d'exclusion aérienne au dessus de la Libye, pour les vols transportant les membres du Comité vers la Libye. La Commission a également assuré la liaison avec les parties libyennes, qui, toutes deux, ont confirmé leur disposition à recevoir la mission.

V. DEUXIÈME RÉUNION DU COMITÉ AD HOC AU NIVEAU DES CHEFS D’ETAT ET VISITE EN LIBYE

Deuxième réunion du Comité ad hoc au niveau des chefs d’Etat

29. Le Comité ad hoc de haut niveau sur la Libye a tenu sa deuxième réunion au niveau des chefs d'Etat à Nouakchott, le 9 avril 2011, sous la présidence du Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Les Présidents Denis Sassou Nguesso, Amadou Toumani Touré et Jacob Zuma, moi?même, ainsi que le Commissaire à la Paix et à la Sécurité, étions présents. Le Président Yoweri Museveni était représenté par le Ministre ougandais chargé des Relations internationales.

30. Le Comité a fait le point des activités entreprises dans l'exercice de son mandat et la promotion de la Feuille de route de l'UA pour le règlement de la crise libyenne. J’ai saisi l'occasion de la réunion pour informer les autres membres du Comité ad hoc de haut niveau des discussions que j'ai eues à Londres, notamment avec le Ministre britannique des Affaires étrangères, M. William Hague, le 4 avril 2011 ; à Bruxelles, les 4 et 5 avril, avec M. Herman Van Rompuy, Président du Conseil de l'UE, et Mme Catherine Ashton, la Haute Représentante de l'UE, ainsi qu'avec M. Anders Fogh Rasmussen, Secrétaire général de l'OTAN, et le Conseil des Ambassadeurs de l'OTAN ; et, enfin, à Rome, le 5 avril, avec le Ministre italien des Affaires étrangères, M. Franco Frattini. J'ai indiqué que, lors de ces rencontres, mes interlocuteurs et moi avons convenu de la nécessité de mettre fin à la violence par un cessez?le?feu effectif et vérifiable, pour protéger les civils et créer les conditions d'une solution politique qui réponde aux aspirations légitimes du peuple libyen. Nous sommes, en outre, convenus qu'une telle solution politique exige un processus inclusif de réconciliation nationale entre tous les Libyens. Nous avons également procédé à un échange de vues sur les activités futures du Groupe de contact sur la Libye, qui a été créé lors de la Conférence de Londres, ainsi que sur les initiatives du Comité ad hoc de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, et sommes convenus de rester en contact étroit pour continuer à échanger et à oeuvrer ensemble pour un règlement politique de la crise libyenne. Il convient de noter que, plus tôt, à la fin de mars 2011, le Commissaire à la Paix et à la Sécurité avait rencontré des représentants de l'UE, ainsi que le Comité Politique et de Sécurité de l'UE, pour les informer des efforts de l'UA et des initiatives visant au règlement de la crise en Libye.

31. A la veille de sa visite en Libye, les 10 et 11 avril 2011, afin de rencontrer les parties libyennes, aussi bien à Tripoli qu’à Benghazi, le Comité ad hoc a lancé un appel urgent auxdites parties pour qu’elles s’engagent résolument en faveur d’un règlement pacifique de la grave crise que connaît leur pays et lui apportent, à cette fin, toute la coopération requise. Le Comité a réitéré sa détermination à ne ménager aucun effort en vue de mener à bien son mandat et d’aider les parties à trouver une solution rapide à la crise sur la base de la Feuille de route de l’UA. Visite en Libye

32. Comme prévu, le Comité ad hoc de haut niveau a effectué une visite en Libye les 10 et 11 avril 2011. J’ai pris part à cette visite, conjointement avec le Commissaire à la Paix et à la Sécurité. Le 10 avril 2011, à Tripoli, les membres du Comité ad hoc ont tenu une longue réunion avec le Colonel Muammar Qaddafi sur la Feuille de route de l'UA pour le règlement de la crise libyenne. Le Colonel Qaddafi a confirmé son acceptation de la Feuille de route de l'UA. Sur la question spécifique du cessez?le?feu, il a confirmé son soutien aux efforts du Comité ad hoc visant à assurer sa concrétisation urgente sur le terrain, y compris le déploiement d'un mécanisme de suivi efficace et crédible. Il a exprimé sa pleine confiance en l'UA et en sa capacité à mener à bien les efforts de paix dans son pays.

33. Le lundi 11 avril 2011, le Comité ad hoc s’est rendu à Benghazi, où il s'est entretenu longuement avec le Président et les membres du CNT. Les discussions ont donné à l'UA l’occasion d’informer le CNT de ses efforts visant à trouver une solution rapide à la crise en Libye, sur la base de la Feuille de route de l'UA, ainsi que des résolutions 1970 (2011) et 1973 (2011) du Conseil de sécurité des Nations unies. Le CNT a présenté sa vision de l'avenir de la Libye et sa position sur les efforts déployés par l'UA pour faciliter une solution rapide à la crise en Libye.

34. A cet égard, le Comité ad hoc de haut niveau et le CNT ont longuement traité de la nécessité d'un cessez?le?feu urgent, y compris le principe du retour de toutes les forces dans leurs casernes, qui serait surveillé par un mécanisme international crédible et efficace. L'objectif, ce faisant, est d'assurer la protection effective de la population civile et de créer des conditions propices à la satisfaction des revendications et des aspirations légitimes du peuple libyen à la démocratie, à la liberté, à l’Etat de droit et au développement socio?économique. Cependant, en raison d'une condition politique avancée par le CNT comme préalable au lancement urgent de discussions sur les modalités d’un cessez?le?feu, il n’a pas été possible, à ce stade, de dégager un accord sur la question essentielle de la cessation des hostilités.

35. Conscient que le cessez?le?feu constitue un élément clé de l’oeuvre de paix, le Comité ad hoc de haut niveau, qu’anime un sens élevé des responsabilités envers le peuple libyen, comme envers l’Afrique et la communauté internationale dans son ensemble, a exprimé sa détermination à poursuivre l’accomplissement de la mission dont il a été chargé. Le Comité a lancé un appel pressant au CNT à coopérer pleinement, dans l’intérêt supérieur de la Libye, et à aider à la recherche et à la mise en oeuvre de la solution politique juste et durable que le peuple libyen appelle de tous ses voeux et que la communauté internationale assure de son soutien.

VI. ACTIVITÉS ULTÉRIEURES

36. Après la visite en Libye, le Comité ad hoc a eu des consultations à Alger avec le Président Abdelaziz Bouteflika. Le Président Bouteflika et d'autres responsables algériens ont réitéré le soutien de leur pays au Comité, et l'ont encouragé à poursuivre ses efforts en vue d’un règlement rapide de la crise libyenne.

37. A la suite de consultations avec les chefs d'Etat du Comité ad hoc, je me suis rendu à Doha pour assister, à titre d'hôte, à la première réunion du Groupe de contact sur la Libye, tenue le 13 avril, sous la présidence conjointe de l'Etat du Qatar et du Royaume?Uni. La réunion a porté sur nombre de questions relatives aux progrès accomplis, sur le plan international, dans la mise en oeuvre des résolutions 1970 (2011) et 1973 (2011) du Conseil de sécurité des Nations unies, au processus politique pour permettre aux Libyens de déterminer leur propre avenir, au soutien à apporter au peuple libyen, à l'aide humanitaire et à l’appui à long terme. La réunion s’est félicitée des efforts du Comité ad hoc de haut niveau.

38. En marge de la réunion, j'ai rencontré une délégation du CNT à laquelle j’ai réitéré l'engagement de l'UA, à travers le Comité ad hoc, à faire tout ce qui est en son pouvoir pour aider à trouver une solution durable à la crise en Libye, sur la base des aspirations légitimes du peuple libyen à la réforme et à la démocratie. J'ai demandé au CNT de coopérer pleinement avec l'UA dans ses efforts. La délégation du CNT a convenu de maintenir le contact avec l'UA et de continuer d’interagir avec elle sur la marche à suivre.

39. J'ai aussi profité de la réunion de Doha pour m’entretenir avec le Ministre des Affaires étrangères de la Turquie, M. Ahmet Davutoglu, dont le pays joue un rôle actif tant dans les efforts visant à résoudre la crise en Libye que dans la fourniture d'une assistance humanitaire aux populations touchées, y compris les travailleurs migrants africains, en particulier dans la ville de Misrata. Nous avons procédé à un échange de vues sur la situation en Libye et les moyens de renforcer la coordination entre l'UA et de la Turquie, dont les positions sur la marche à suivre sont en ligne avec celles de l'Union africaine tels qu'énoncées dans sa Feuille de route.

40. Le 14 avril 2011, au Caire j'ai participé, conjointement avec le Commissaire à la Paix et à la Sécurité, à une réunion organisée à l'initiative du Secrétaire général des Nations unies, M. Ban Kimoon, à laquelle ont également pris part le Secrétaire général de la Ligue arabe, M. Amr Moussa, le Secrétaire général de l'OCI, M. Ekmeleddin Ihsanoglu, et la Haute Représentante de l'UE, Mme Catherine Ashton. La réunion a permis un échange de vues sur la situation en Libye, aux fin de renforcer la coordination des efforts en vue du règlement politique de la crise en Libye.

41. La situation en Libye et les moyens de parvenir à un règlement rapide de la crise ont figuré en bonne place dans les discussions de la deuxième édition annuelle de la réunion de haut niveau entre l'UA et les Etats?Unis, qui s'est tenue à Washington, les 20 et 21 avril 2011, et au cours de laquelle j'ai dirigé la délégation de la partie africaine, qui comprenait nombre de Commissaires de l'UA, y compris le Commissaire à la Paix et à la Sécurité. La délégation de l'UA a eu des consultations avec plusieurs hauts responsables américains, dont la Secrétaire d'Etat Hillary Clinton.

42. Au cours de ces consultations, les Etats?Unis ont reconnu les efforts de l'UA visant à parvenir à un cessez?le?feu, tout en réitérant la nécessité d'une plus grande coordination au sein de la communauté internationale. Les Etats?Unis ont souligné que toute trêve exigerait une fin immédiate de toutes les attaques contre les civils et le retrait des forces du Gouvernement libyen de toutes les villes dans lesquelles elles sont entrées de force et de celles qu’elles occupent ou assiègent. Un tel cessez?le feu, de l'avis des Etats?Unis, devrait également inclure le départ du pouvoir du Colonel Qaddafi. Pour sa part, la délégation de l'UA a souligné les éléments clés de la feuille de route de l'UA pour le règlement de la crise en Libye, à savoir: une cessation immédiate des hostilités, la livraison diligente de l'aide humanitaire aux populations dans le besoin, la protection des ressortissants étrangers, y compris les travailleurs migrants africains, et un dialogue inclusif et une période de transition menant à des réformes politiques. L'UA a souligné que la détermination des participants à un tel processus, ainsi que la question du leadership politique, devraient être laissées aux Libyens eux?mêmes.

VII. OBSERVATIONS

43. Le peuple libyen traverse une période extrêmement traumatisante de son histoire nationale. La situation qui prévaut sur le terrain, si elle n'est pas réglée rapidement et de façon effective, aura de lourdes conséquences pour la Libye et les pays voisins, ainsi que pour la paix et la sécurité internationales. Je voudrais, à ce stade, mettre en évidence les préoccupations de nombre de pays, y compris de la région, en ce qui concerne la prolifération d’armes émanant des dépôts d'armes libyens, ainsi que les informations selon lesquelles des éléments terroristes profiteraient des développements actuels pour faire avancer leurs objectifs dans la région et au?delà. Il est, par conséquent, impératif que la communauté internationale se mobilise pleinement afin d’obtenir une cessation rapide des hostilités et d’aider les parties à régler les questions sous?jacentes de la crise libyenne. A cet égard, je voudrais exprimer mes sincères remerciements aux chefs d'Etat du Comité ad hoc de haut niveau de l'UA sur la Libye pour leurs efforts inlassables et leur engagement indéfectible en vue de l’accomplissement du mandat dont a été chargé le Comité.

44. Comme indiqué ci?dessus, la Comité ad hoc n'a ménagé aucun effort pour interagir avec les parties, ainsi qu’en témoignent l'invitation qui leur a été adressée à participer à des consultations, fin mars 2011, à Addis Abéba ; la visite en Libye, au début du mois d’avril 2011 ; et les contacts que la Commission a maintenus aussi bien avec le Gouvernement libyen qu’avec le CNT. Néanmoins, à ce jour, aucun progrès tangible n'a été enregistré dans l’obtention d’un cessez?le?feu et les négociations sur les autres aspects de la crise. Les combats se poursuivent et les civils payent un lourd tribut du fait de cette situation.

45. Les positions des parties sur les conditions dans lesquelles des négociations pourraient commencer restent très éloignées les unes des autres. Le Gouvernement libyen a marqué son acceptation de la Feuille de route de l'UA. Pour sa part, le CNT est d'avis que des négociations sur un cessez?le?feu et les autres aspects connexes de la crise ne peuvent commencer que lorsque certaines conditions préalables auront été remplies, en particulier le départ du pouvoir du Colonel Qaddafi et des membres de sa famille, et le retrait de l'armée libyenne des villes occupées par la force après le déclenchement des hostilités.

46. Dans ce contexte, le Comité se propose d’intensifier ses efforts et d’interagir davantage avec les parties, afin de créer les conditions nécessaires au commencement rapide des négociations sur la cessation des hostilités et les autres aspects de la crise, et ce sur la base de la Feuille de route de l'UA, qui est aussi actuelle aujourd'hui qu’elle l’était lorsqu’elle a été proposée en mars dernier. Il me plaît d'informer le Conseil qu’au moment de la finalisation du présent rapport, des dispositions étaient entrain d’être prises pour la convocation d'une réunion du Comité ad hoc à Addis Abéba, le 25 avril 2011, afin de faire le point des efforts déployés à ce jour et de s’accorder sur la marche à suivre. Le Comité prévoyait également de poursuivre son interaction, de manière substantielle, avec une délégation du Gouvernement libyen, ainsi qu’avec des représentants du CNT, qui avaient confirmé leur participation et dont la présence, pour la première fois, au siège de l'UA, constitue un signe encourageant. J'appelle les parties à faire preuve de la volonté politique nécessaire et d'apporter une coopération sans réserve au Comité.

47. A cet égard, l'UA continuera de donner la priorité à la réalisation d'un cessez?le?feu. La poursuite des combats ne peut que compliquer davantage la situation, conduire à une plus grande escalade sur le terrain, et rendre encore plus difficile une solution négociée et, par?dessus tout, aggraver le sort de la population civile. Un arrêt rapide des hostilités sera la meilleure façon d’assurer la protection de la population civile. Cette approche est également conforme à la résolution 1973 (2011), dont le paragraphe 1 exige un cessez?le?feu immediat et la cessation totale des violences et de toutes les attaques et exactions contre la population civile. Plus généralement, l’on note une prise de conscience croissante, au sein de la communauté internationale, y compris de la part d'importants responsables civils et militaires des principaux pays de la coalition contribuant à l'opération de l'OTAN en Libye, du fait qu'il n'y a pas de solution militaire à la crise actuelle en Libye. De manière significative, certains de ces responsables parlent maintenant d'une impasse sur le terrain, et ce plus de cinq semaines après le début de la campagne aérienne visant à faire respecter la zone d'exclusion aérienne au dessus de la Libye et d'autres attaques connexes contre les forces du Gouvernement libyen.

48. Le Comité ad hoc est pleinement conscient du fait qu’un cessez?le?feu effectif exigera le déploiement d’un mécanisme de surveillance crédible et efficace. A cet égard, le Comité, dans ses interactions avec le Gouvernement libyen, a clairement indiqué qu’un tel mécanisme de surveillance devra impliquer non seulement l'UA, mais également d'autres acteurs internationaux concernés, en particulier les Nations unies. Cette position a été réitérée par le Comité au CNT. C’est dans cet esprit, et en application du communiqué de la réunion consultative sur la Libye du 25 mars 2011, que la Commission a organisé, à Addis Abéba, le 31 mars 2011, une réunion avec les organisations partenaires pour discuter des modalités d’une cessation rapide des hostilités et de la mise en place d'un mécanisme de surveillance opérationnel. La Commission se propose de poursuivre ce processus, pour faciliter la mise en place rapide et l’opérationnalisation d'un mécanisme de surveillance, au cas où les parties s’accorderaient sur un cessez?le?feu.

49. De toute évidence, un cessez?le?feu ne peut, à lui seul, résoudre les différents aspects de la crise libyenne et, en l'absence d'une solution politique, un tel cessez?le?feu consoliderait le statu quo actuel, avec le Gouvernement libyen contrôlant la partie ouest de la Libye, et le CNT la partie est du pays. Une telle situation pourrait, à long terme, conduire à la fragmentation du pays, avec les conséquences qui en découleront en termes de sécurité et de stabilité régionales. Aucun effort ne doit être épargné pour éviter la matérialisation d'un tel scénario, d’autant qu’il existe un consensus international sur la nécessité de maintenir l'unité et l'intégrité territoriale de la Libye et que les parties libyennes elles?mêmes ont marqué leur attachement à ce principe.

50. Par conséquent, pour l'UA, un cessez?le?feu doit être couplé avec des négociations entre les parties visant à parvenir à un accord sur une période de transition inclusive au cours de laquelle les réformes nécessaires, y compris l'élaboration d'une Constitution, seront entreprises pour répondre aux aspirations légitimes du peuple libyen à la démocratie, au respect des droits de l'homme, à la liberté et à la bonne gouvernance. Cette période de transition doit déboucher sur des élections qui permettront au peuple libyen de choisir librement ses dirigeants. Ce faisant, la Libye se sera acquittée des engagements qu'elle a pris en vertu des instruments pertinents de l'UA relatifs à la démocratie, aux droits de l'homme et à la gouvernance.

51. Le Comité est conscient des demandes répétées faites par le CNT pour que le Colonel Qaddafi et les membres de sa famille proche quittent le pouvoir avant le début de toute négociation. Tout en prenant note de la position du CNT, le Comité est d'avis qu’aucune condition préalable spécifique ne doit être posée pour le début des négociations, dont le but est précisément de répondre aux préoccupations de toutes les parties et de faciliter un compromis sur la meilleure marche à suivre. Le Comité est convaincu, une fois que les parties accepteront de négocier, que les divergences qui les séparent peuvent être dépassées et que les questions les plus délicates peuvent trouver une solution dans l’intérêt supérieur du pays et de son peuple.

52. La Commission note, en outre, que nombre de parties prenantes internationales, y compris dans le cadre du Groupe de Contact sur la Libye, ont également demandé que le Colonel Qaddafi démissionne, soulignant que son régime avait perdu toute légitimité. Le Comité estime qu'il convient de laisser aux Libyens le soin de choisir leurs dirigeants et que les acteurs internationaux devraient s'abstenir de prendre des positions ou de faire des déclarations susceptibles de compliquer la recherche d'une solution. Le rôle de la communauté internationale est d'aider les Libyens à réaliser leurs aspirations légitimes dans le cadre d’un processus approprié et conduit par les Libyens eux?mêmes.

53. Au cours de ces dernières semaines, le Comité s'est efforcé d’interagir de façon soutenue avec les partenaires internationaux. J'ai moi?même interagi avec nombre de partenaires bilatéraux et multilatéraux de l'UA. Ces efforts doivent se poursuivre, tant il est vrai qu’aucune solution durable ne peut être trouvée sans une approche coordonnée de la communauté internationale.

54. Dans le même temps, il est essentiel que nos partenaires prennent dûment en compte le rôle premier qui est celui de l'UA, d’autant que l'Afrique, en particulier les voisins de la Libye, sont ceux qui seront les plus affectés par la persistance et la détérioration de la situation actuelle. De manière significative, la contribution du Comité est formellement reconnue par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1973 (2011), et sa création est compatible avec les dispositions du Chapitre VIII de la Charte des Nations unies concernant le rôle des arrangements régionaux dans le règlement des différends entre ou au sein de leurs Etats membres. Le Comité continuera de coordonner ses efforts avec tous les partenaires de l'UA, y compris le Groupe de contact pour toutes les questions couvertes par les politiques de l’UA, et oeuvrera de manière conforme et complémentaire à la résolution 1973 (2011).

55. Le Comité ad hoc est encouragé par l’accent croissant mis, au sein de la communauté internationale, sur la nécessité d'une solution politique à la crise en Libye. Dans ce contexte, le défi consiste à assurer une plus grande coordination entre tous les acteurs internationaux pour galvaniser la recherche d'une solution politique, dont les principaux éléments ont déjà été énoncés dans la Feuille de route de l'UA. La poursuite des consultations et du dialogue entre l'UA, la Ligue des Etats arabes, l'OCI, l'UE et les Nations unies, dans le prolongement des mesures déjà prises à cet égard, peut favoriser l’émergence d’un tel consensus et une approche commune de la situation en Libye.

56. Au moment où les membres de la communauté internationale s'efforcent de travailler ensemble pour faciliter un règlement rapide de la crise en Libye et d’abréger les souffrances du peuple libyen, il est impératif que tous les pays et organisations impliqués dans la mise en oeuvre de la résolution 1973 (2011) agissent d'une manière strictement conforme aux dispositions de cette résolution. Toute action allant au?delà des limites de cette résolution ou interprétation intéressée de ses dispositions ne peut qu'affaiblir la légalité internationale, rendre plus difficile un consensus sur les mesures qui doivent être prises pour aider les Libyens à surmonter les défis auxquels ils sont confrontés et, à terme, compliquer la recherche d'une solution à la crise.

57. Je suis profondément préoccupé par le sort de la population civile dans toutes les zones touchées par la guerre. La situation à Misrata illustre tragiquement la gravité de la crise humanitaire. Je réitère l’appel de l'UA à toutes les parties pour qu’elles se conforment aux dispositions du droit humanitaire international, et j’appelle le Gouvernement libyen, en particulier, à assumer pleinement ses responsabilités pour la protection de sa propre population. Je suis également préoccupé par le sort des travailleurs migrants africains vivant en Libye, y compris ceux qui sont bloqués à Misrata. La Commission a reçu des informations faisant état de violences contre les travailleurs migrants africains liées à la perception, dangereuse et fallacieuse, que les Africains noirs sont des mercenaires combattant aux côtés des forces du Gouvernement libyen. Ces attaques sont inhumaines et inacceptables et doivent cesser immédiatement ; ceux qui en sont les responsables et auteurs doivent rendre des comptes.

58. Je rends hommage aux organisations humanitaires qui fournissent une assistance aux populations affectées en Libye et facilitent l'évacuation des ressortissants étrangers qui souhaitent quitter le pays. Je félicite les Etats voisins de la Libye qui accueillent des travailleurs migrants africains retournant dans leur pays respectifs, et je réitère l’appel de l'UA à la communauté internationale pour qu’elle apporte le soutien nécessaire, y compris pour la réinsertion socioéconomique de ces travailleurs migrants.

59. Je demeure également préoccupé par les conséquences de la guerre sur les pays voisins de la Libye et d'autres pays de la région, ainsi que pour la sécurité et la stabilité régionales, en particulier en ce qui concerne la prolifération illicite d’armes, le terrorisme et d’autres formes de criminalité transnationale organisée. Dans ce contexte, l'UA renforcera la coordination avec les pays de la région, en particulier ceux de la bande sahélo saharienne, les organisations internationales compétentes et les partenaires intéressés afin de faire face à ce problème d'une façon coordonnée.

60. Je forme l’espoir que le processus de négociation entre les parties libyennes pourra bientôt être lancé pour s’attaquer d'urgence à la question du cessez le feu et de son mécanisme de surveillance, ainsi qu’à tous les autres aspects de la solution politique à la crise libyenne. Dans ce contexte, je me propose de nommer une équipe d’homme d’Etats africains et de hauts responsables, ayant toute l’autorité nécessaire, afin de faciliter la préparation et la tenue de négociations en coopération avec les partenaires multilatéraux de l'UA.

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