Le Sénégal a célébré le 25 octobre dernier, le 25ème anniversaire de la création de son Conseil national de lutte contre le sida (Cnls). Une instance qui a été mise en place en octobre 1986 et dont le bilan confirme que le Sénégal est l’un des pays qui a le plus bas taux de prévalence au monde. Les dernières études réalisées sur le sujet indiquent que ce taux de prévalence qui était de 0, 7 % est passé aujourd’hui à 0,5 % au niveau de la population générale. Mais derrière ces résultats se cachent, cependant, certains groupes gravement exposés que sont les professionnelles du sexe dont le taux de prévalence est de 18,5 % et les hommes qui ont des rapports avec d’autres hommes ou MSM, dont le taux de prévalence est de 21,1%. Les enquêtes les plus récentes sur le sujet datent respectivement de 2007 et 2010.
En vingt-cinq ans de lutte contre le vih sida, le Sénégal a réalisé des performances probantes contre cette pandémie mondiale. Les derniers chiffres rendus publics sur la question font état d’un taux de prévalence qui passe de 0,7 % au niveau de la population générale à une échelle plus faible de 0,5%. Une prouesse de taille qui fait que le pays enregistre un des plus bas taux de prévalence au plan mondial. Ces résultats enregistrés sont dus au fait que le Sénégal a été un des premiers pays d’Afrique à s’engager dans la bataille contre les problèmes liés au sexe et à la drogue et face auxquels personne n’osait s’attaquer après l’apparition du Vih sida. Selon les deux figures emblématiques de la croisade contre la pandémie au Sénégal, le Dr Ibra Ndoye, Coordonnateur du Cnls et le Professeur Souleymane Mboup, agrégé de bactériologie et de virologie, le pays a très tôt mis en place des stratégies efficaces pour contrer le fléau.
En effet, depuis la découverte du premier cas en 1986, disent-ils, des réflexions ont été menées pour la mise en place d’une structure qui prend spécialement en charge cette question. Une mesure qui a été renforcée en 2001 par le décret créant le Conseil national de lutte contre le Sida (Cnls). Conséquence, depuis lors, la prévalence est maintenue à moins de 1% au niveau de la population générale.
Face à l’ampleur du défi, l’engagement de l’Etat a rendu possible la mobilisation de tous les acteurs : leaders religieux, société civile, secteur privé, associations des personnes vivant avec le Vih dont leur porte-parole s’est éteint tout dernièrement. Mais le tout a été également rendu possible avec la mise à disposition des informations fiables sur la question afin d’éviter le pilotage à vue de la suivi de l’évolution de la pandémie, a indiqué le Professeur Souleymane Mboup, selon qui, « le Sénégal a toujours insisté à disposer des informations pour éviter le pilotage à vue de la gestion de la pandémie ». Selon lui, «nous avons été l’un des rares pays à procéder à la surveillance épidémiologique depuis les années 80. En plus, des études épidémiologiques comportementales et biologiques ont été menées pour surveiller les tendances de l’infection du Vih au Sénégal ». Et d’ajouter, « si très peu de pays disposent d’informations sur le comportement sexuel de leur population, le Sénégal par contre, l’a réussi avec la surveillance sentinelle et les enquêtes de surveillance combinées. Et le système d’information mis en place comme stratégie phare a permis de déceler très tôt l’épidémie qui est de type concentré en deux groupes ».
Selon toujours les spécialistes, ces enquêtes ont permis de déceler que l’épidémie a un taux de prévalence faible dans la population générale mais élevée chez les professionnelles du sexe, et les MSM. Le Sénégal qui est cité comme premier pays à avoir un taux de prévalence faible est suivi également par 22 pays africains qui ont eu à démontrer leurs performances. En guise de reconnaissance pour ses performances en matière de lutte contre le Sida, le Sénégal a eu également à recevoir en 2007 de la Banque mondiale le premier prix de système d’évaluation et de fiabilité des informations. Auparavant, en 1996, l’Onusida a eu à valider le bon travail réalisé par le pays sur la surveillance sentinelle avant de le publier. Il a été également le premier pays à avoir enseigné un programme sur la question du Vih dans les programmes scolaires.
La problématique des groupes ciblés
Si toutes ces performances et reconnaissances enregistrées sont à mettre à l’actif du pays, il reste toutefois à régler la problématique du Vih sida dans certaines régions orientales et méridionales (Ziguinchor, Sédhiou, Kolda, Kédougou et Tambacounda) qui sont, du point de vue géographique frontaliers avec d’autres pays présentant des prévalences dépassant largement le taux national. Chez les groupes clés, les plus exposés du pays, notamment des professionnelles du sexe (18,5 % ) et les MSM ( 21, 8 %), leur prévalence est également inquiétante. En outre, les responsables chargés de la lutte contre cette pandémie au Sénégal se disent être surpris de la découverte par une étude de surveillance combinée réalisée en 2010 qui a décelé qu’après celle de 2006 qui avait ciblé les policiers, les camionneurs, les pêcheurs, on a enregistré un nouveau taux de prévalence de 1,3 % chez les orpailleurs dans la région de Kédougou située à plus de 700 km de la capitale. Mais ce qui fait également peur à ces spécialistes du Vih au Sénégal c’est la découverte par cette même étude d’une prévalence de 1,5 % chez les détenus.
Devant ce nouveau cas de figure analysée par les mêmes scientifiques, on a noté que les femmes sont cinq fois plus affectées que les hommes chez les détenus et trois fois plus touchées chez les orpailleurs.
Rappelons également que l’étude de 2009 qui avait porté sur des camionneurs avait révélé qu’à ce niveau le taux de prévalence était de 1,2 % contre seulement 0,8% chez les pêcheurs et 0,6% pour les policiers. Toutes choses qui démontrent qu’il y a, malgré tout, des défis encore à relever dans ce pays d’Afrique de l’Ouest qui a une population de 12 millions d’habitants.