Yaoundé-Cameroun — Les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'Ouest ont affiché leur ferme détermination ainsi que leur volonté commune d'éradiquer la piraterie et les autres activités illicites commises en mer, notamment dans le golfe de Guinée, une zone pleine de potentialités et de plus en plus l'objet de trafic de toutes sortes.
L'engagement a été affirmé ce lundi 24 juin 2013 à Yaoundé, au Cameroun, par ces hautes personnalités à l'ouverture de leur conférence au sommet sur la sûreté et la sécurité maritimes, la première du genre après une prise de conscience unanime sur la nécessité d'agir en vue de faire face au fléau de la piraterie dans cette zone.
Ce phénomène constitue en effet, comme l'a déclaré dans son discours d'ouverture le président camerounais Paul Biya, «une menace sérieuse à la paix et à la stabilité de nos Etats ainsi qu'un frein au développement et au bien- être de nos populations» en ce qu'il permet une circulation difficilement contrôlable des armes et des drogues.
C'est conscients de cet état de fait que les dirigeants de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) et de la Commission du Golfe de Guinée (CGG) ont décidé d'agir de concert et de se doter d'instruments aptes à les aider dans ce combat.
Le président Biya a dépeint la situation qui prévaut dans le golfe de Guinée où, selon le Bureau maritime international (BMI), au moins 966 marins ont été victimes d'attaques en 2012, tandis que le coût des marchandises volées par les pirates est estimé entre 34 et 101 millions de dollars US. En outre depuis le début de cette année, huit navires ont été attaqués au large des côtes africaines en général et 31 dans le Golfe de Guinée.
Il s'avère que le Golfe de Guinée dépasse à présent les côtes est-africaines, particulièrement le golfe d'Aden, en nombre d'attaques. Les eaux du Nigéria, du Bénin, et plus récemment du Togo, ont notamment été classées dans la zone à haut risque définie par un groupe de compagnies d'assurances, a expliqué le leader camerounais.
Auparavant, le président Alassane Ouattara de Côte d'Ivoire, qui s'exprimait en sa qualité de président en exercice de la CEDEAO, avait décrit la même situation que son hôte, en mettant l'accent sur les richesses de toutes sortes que recèle le golfe de Guinée et qui en font une zone offrant de réelles perspectives de développement pour la région Afrique.
Pour M. Ouattara, cette criminalité qui se développe en mer menace le transport des hydrocarbures, limite les investissements et pousse à la hausse les primes d'assurance, d'où l'impérieuse nécessité, a-t-il souligné, d'accroître la coopération entre tous les pays concernés. Il a également requis à l'égard des pirates sévissant dans le golfe de Guinée la même fermeté qu'envers ceux de l'océan Indien.
A son tour, le chef de l'Etat tchadien Idriss Déby Itno, président en exercice de la CEEAC, a également plaidé pour une meilleure mutualisation des moyens et des efforts de la part de tous les Etats concernés, y compris les pays enclavés comme le Tchad, dont les importations et les exportations dépendent fortement des ports des autres pays. «Il ne faut ménager aucun effort pour venir à bout de cette menace régionale, continentale et mondiale», a-t-il souligné avec force.
M. Déby Itno s'est ensuite livré à un véritable plaidoyer contre les «activités terroristes multiformes menées par des individus sans foi ni loi et disposant de moyens financiers colossaux». Ils menacent de plus en plus l'Afrique et constituent un danger commun transcendant les frontières et il faut les combattre sans répit et avec détermination, a insisté le président tchadien.
Au cours de cette séance inaugurale, marquée par une allocution de bienvenue du délégué du gouvernement camerounais auprès de la Communauté urbaine de Yaoundé, les participants ont eu droit à trois messages émanant respectivement de la présidente de la Commission de l'Union africaine, du secrétaire général des Nations unies et du président en exercice de la Commission du golfe de Guinée.
Ils ont tous les trois insisté sur la menace que constituent la piraterie et les autres activités illicites commises en mer et réaffirmé la disponibilité de leurs organisations respectives à coopérer avec la CEDEAO, la CEEAC et la CGG dans leur volonté et leur détermination communes à combattre résolument ces fléaux.
A l'issue de ce sommet de deux jours, à laquelle douze Etats sont représentés au plus haut niveau, il est attendu l'adoption de trois documents fondamentaux, validés en mars 2013 à Cotonou, au Bénin, par les ministres de la Sécurité, des Affaires étrangères et de la Défense des 25 Etats d'Afrique occidentale et centrale.
Il s'agit du Code de conduite relatif à la prévention des actes de piraterie, des vols à main armée et à l'encontre des navires et des activités maritimes illicites en Afrique du Centre et de l'Ouest, du Mémorandum d'entre entre la CEEAC, la CEDEAO et la CGG sur la sûreté et la sécurité dans l'espace maritime de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'Ouest, et d'une Déclaration des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'Ouest sur la sûreté et la sécurité maritimes.
La rencontre, qui se tient sous l'égide des Nations unies, est organisée conjointement par ces trois organisations régionales. La CGG comprend l'Angola, le Cameroun, le Congo, la RD Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Nigéria, Sao Tomé-et-Principe, tandis que la CEEAC regroupe dix membres : Angola, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, RD Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe, Tchad. Les membres de la CEDEAO sont le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Libéria, le Mali, le Niger, le Nigéria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo.