Sénégal: Le centre d'incubation «Oluremi Tinubu » pour les femmes transformatrices inauguré à Gorom 1

2 Août 2013

Le centre d'incubation et de formation des femmes en techniques de transformation des produits agricoles de Gorom 1 (département de Rufisque, région de Dakar) a été inauguré le mardi 30 juillet 2013. Venue co-présider la cérémonie, la marraine du centre, le Sénateur Mme Oluremi Tinubu de Lagos (Nigeria), plaide pour l'émergence d'un nouveau type de femme africaine entrepreneur pouvant mieux contribuer au développement du continent.  

Près de 600 femmes issues des villages de Gorom 1, dans le département de Rufisque (région de Dakar), ont été formées entre 2010 et 2013 en transformation de produits agricoles par le centre d'incubation installé dans la localité. D'un coût de plus de 65 millions de francs Cfa, cette infrastructure s'étale sur 2775 mètres carrés dans la zone des Niayes, qualifiée de « future Californie du Sénégal » grâce à son potentiel en fruits et légumes.

Gorom 1 polarise 21 villages qui s'activent principalement dans l'agriculture, l'élevage et le maraîchage. D'où l'avantage d'avoir un tel centre qui dispose de trois lignes de transformation : fruits et légumes, patte d'arachide et produits céréaliers.

La directrice du centre, Mme Diago Marième Fall témoigne : « cette infrastructure est d'une grande utilité pour les femmes de la localité. Depuis son ouverture, les bénéficiaires parviennent non seulement à écouler leur production mais elles ont augmenté leurs revenus en s'adonnant à la transformation des produits agricoles ». Les femmes sont rémunérées à hauteur de 2500 F Cfa par jour quand elles travaillent pour le compte du centre. « Parfois nous avons même des problèmes pour les mobiliser parce qu'elles sont sollicitées par des commandes destinées à des  cérémonies familiales ».

Une bouée de sauvetage pour les agricultrices et autres femmes de cette zone, à l'image de plusieurs localités rurales du Sénégal, qui sont frappées par la pauvreté et l'exode rural. Pour la directrice du centre, le partenariat qui existe entre ces femmes et certaines organisations ou structures spécialisées dans l'exportation des produits transformés vers les marchés américains et européens est  le plus important. Cela, à son avis, augmente les revenus de ces femmes, appuie la volonté de les autonomiser et contribue grandement à la lutte contre la pauvreté.

Le centre a été réalisé sur fonds propre par l'Association des femmes de l'Afrique de l'Ouest (Afao-Wawa) avec l'appui de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Mme Khady Fall Tall, présidente régionale d'Afao-Wawa, souligne que l'objectif d'un tel centre est « d'affranchir les femmes en les rendant plus autonomes ».

Plaidoyer pour un nouveau type de femme africaine

Venue co-présider l'événement, la marraine du centre, le Sénateur Oluremi Tinubu, à la tête d'une délégation de cinquante parlementaires, a tenté d'inculquer sa vision sur ce que doit être la place de la femme africaine dans le développement. Militante de la cause féminine et celle de l'enfant, Mme Tinubu invite à la promotion d'un nouveau type de femme en Afrique. Une idée qui repose sur la volonté de renforcement de l'autonomisation de la femme. Cette démarche suggérée par Oluremi Tinubu qui est, par ailleurs l'épouse de  Bola Ahmed Tinubu, ancien gouverneur de l'Etat de Lagos, accorde beaucoup d'importance à la formation et au renforcement des capacités des femmes faisant d'elles de véritables entrepreneurs.

C'est ainsi que le Sénateur de Lagos prie pour que ce modèle de centre d'incubation soit démultiplié à l'échelle continentale. Avec sa vision de développement d'un « nouveau type de femme africaine », cette figure montante dans la vie politique nigériane en perspective des échéances de 2015, appelle les décideurs politiques à mettre l'accent sur l'agriculture qui polarise le plus de femmes actives.
Le paradoxe des femmes dans l'agriculture

Le débat sur la nécessaire autonomisation de la femme africaine s'est poursuivi lors du sixième colloque international que l'Afao a organisé, le mercredi 31 juillet 2013 à Dakar, pour célébrer la journée internationale de la femme africaine. « L'agriculture, la sécurité alimentaire et nutritionnelle : l'apport des femmes en Afrique de l'Ouest ». C'est le thème ayant permis de montrer que la femme africaine est la figure de proue de l'agriculture. Un état fait confirmé par les orateurs qui se sont succédés sur l'estrade de ces assises de l'Afao.
Cette rencontre à laquelle a pris part le vice-ministre de l'agriculture de Sierra-Léone, Mme Marie Jalloh a permis de constater les paradoxes notés dans le vécu des femmes africaines malgré leur apport pour la sécurité alimentaire. Il est démontré que l'insécurité alimentaire qui touche plus de 10% de la population ouest-africaine et la pauvreté meublent leur quotidien.

Le Commissaire du développement humain et genre à la Cedeao, Mme Adrienne Diop juge surprenante la situation des femmes rurales malgré leur action considérable pour la sécurité alimentaire, la nutrition et la lutte contre la pauvreté. Elles représentent plus de la moitié de la main d'œuvre agricole avec 70% des agriculteurs qui sont des femmes. En Afrique de l'Ouest, les femmes constituent le lien principal entre la production, la consommation et la gestion de l'alimentation des familles.

Malgré ce rôle crucial, les agricultrices sont exclues des innovations technologiques et des retombés de la recherche en matière agricole. Ce qui limite leur productivité. La directrice régionale d'Onu femmes, Mme Joséphine Odera cite un rapport de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (Cea) qui révèle que les femmes ne bénéficient que de 1% des crédits destinés à l'agriculture en Afrique.

Le Directeur exécutif de Coraf-Wecard, Dr Harold Roy-Macauley, exhibant le rapport Pnud sur le développement de 2011, relève que « les femmes produisent plus de 80% des aliments de base destinés à la consommation des ménages ».

Sur cette même lancée, la présidente régionale de l'Afao-Wawa, Mme Khady Fall Tall avance : « une étude de la banque mondiale note que si les femmes avaient le même traitement que les hommes concernant les facteurs de production, la production agricole aurait augmenté d'au moins 30% ». Avant d'ajouter : « forte d'un poids démographique estimé entre 52 et 53% de la population communautaire Ouest africaine, les femmes représentent 80% des acteurs de la transformation des produits agricoles».

Les obstacles et défis à relever

Ce tableau peu reluisant sur la situation de la femme dans l'agriculture est la résultante d'une privation ou limitation dont elle souffre en milieu rural. Les agricultrices sont principalement confrontées à, entre autres, la question de propriété foncière et d'accès à la terre mais aussi de disponibilité de l'eau.

Ainsi, du forum de l'Afao-Wawa, est menée une réflexion consistant à identifier de nouvelles stratégies tenant compte des leçons apprises et des expériences existantes en termes de politiques nutritionnelles.

La présidente régionale de cette organisation, Mme Khady Fall Tall invite à s'inspirer des expériences réussites au Brésil. « Il suffit de voir comment les transposer dans nos pays pour réussir leur mise en œuvre».

Dans cette même dynamique, le ministre sénégalais de l'agriculture et l'équipement rurale, M. Abdoulaye Baldé d'appeler à une accélération de la cadence des initiatives agricoles régionales. A son avis, il s'agit de faire des propositions concrètes pour un meilleur accès des femmes à la terre et au crédit mais aussi donner des indications claires pour le renforcement des unités de transformation. M. Baldé plaide pour la mise en synergie des femmes transformatrices afin de les permettre de mieux répondre à la demande exprimée par le marché national et international.

Pour ainsi replacer la femme dans le dispositif agricole en Afrique, décideurs politiques, partenaires techniques et financiers, experts, acteurs du développement rural, société civile, chercheurs…ont convenu de la nécessité de prendre en compte la dimension genre dans les politiques agricoles.

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