Addis-Abeba — La lutte contre l'épidémie Ébola doit être abordée sur la base de preuves scientifiques, la prévention, la compréhension de la transmissibilité et des appels d'urgence au déblocage de moyens équivalents à ceux consacrés aux opérations de maintien de la paix. C'est ce qu'a déclaré M. Carlos Lopes, Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique (CEA) lors de la réunion d'urgence extraordinaire du Conseil exécutif de l'Union africaine tenue cette semaine, à Addis-Abeba.
M. Carlos Lopes a plaidé avec passion pour une action collective ciblée et a appelé les dirigeants à se souvenir des autres épidémies importantes d'antan, en déclarant: «Nous ne pouvons pas appréhender une menace grave comme Ébola sans penser l'épidémie dans son contexte - cela nous ramène à l'époque où l'Afrique était stigmatisée».
Il a noté que les conséquences socioéconomiques des perceptions erronées sont déjà dévastatrices et il a fait état du nombre de personnes atteintes d'Ebola dans sept pays, avec plus de 2000 morts et 20 000 cas estimés.
Il dit: «Chaque pays africain doit mettre en place des mesures draconiennes qui ne sont pas médicalement justifiées; les pays africains doivent penser à leurs populations dans une situation identique, dans un avenir proche comme une très probable possibilité» et souligne, surtout à un moment où le continent faisait des progrès pour changer le récit; cette évolution est dévastatrice.
Il a souligné que le virus Ebola a toujours été maîtrisé chaque fois qu'une épidémie s'est déclenchée et il est nécessaire que nous fassions preuve de courage et évitions tout contretemps supplémentaire qui a contribué à la situation d'urgence cette fois-ci.
Il a ajouté que l'Afrique a le droit d'être indignée que seulement 1% de la recherche pharmaceutique est consacré aux maladies qui touchent l'Afrique, alors que le continent représente 25% de la charge mondiale.
Il déclare: «La raison pour laquelle la grippe pandémique H1N1, à elle seule tue environ un demi-million par an ou le Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) connaît un taux de mortalité d'environ 12% comparé aux 54% que fait Ébola, est certainement due à l'existence d'une capacité bien développée dans les pays d'Asie occidentale ou du Sud-est. La nationalité ou l'origine des victimes n'y sont pour rien».
Pendant ce temps, les estimations de la CEA confirment que la baisse de plusieurs points du PIB est à prévoir en Guinée, au Libéria et en Sierra Leone, en raison d'une combinaison de facteurs: réduction significative de l'exploitation minière, perturbation des cycles agricoles avec des conséquences directes sur les récoltes à venir, restriction du commerce intérieur et transfrontalier, réduction sensible des vols commerciaux, report des investissements déjà négociés ou prévisibles, un réorientation radicale des fonds publics aux fins de lutter contre l'épidémie, conséquences sur l'espace budgétaire et enfin, impossibilité de poursuivre les réformes engagées.
Il avertit: «Les autres pays où des cas ont été détectés jusqu'à présent ne sont pas encore fortement touchés; mais cela peut changer rapidement, comme nous l'avons vu au Nigéria, avec des incidences provoquées dans le secteur pétrolier de Port Harcourt».
M. Lopes appelle vivement à ce que l'Afrique relève ce défi, «au nom d'une Afrique en véritable essor».
Il dit: «Ebola n'est que le dernier épisode d'une longue série de mésaventures que connaît le continent. Cette fois-ci, au lieu de succomber, les Africains devraient se battre».
La CEA, qui procède actuellement à une évaluation complète des coûts, s'attend à ce que les conséquences économiques globales continuent d'influer sur les entreprises et leur perception des risques associés à la marque Afrique.