Afrique: Un fonds de 300 millions de dollars pour faciliter l'accès des financements aux femmes

M. Akinwumi A. Adesina, Président du Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD) avec une panéliste, Jour 2 de la Conférence Nourrir l'Afrique
22 Octobre 2015

La Banque Africaine de Développement (BAD), de concert avec les Banques Centrales africaines, va mettre en place un fonds de 300 millions de dollars pour rendre accessible le crédit aux femmes. Cette manne devait avoir un effet de levier de trois milliards de dollars auprès des banques commerciales pour partager avec elles les risques. Pour accélérer la cadence, la BAD va supprimer 60% des ses procédures pour relever le niveau de décaissement et d'exécution des projets, surtout agricoles.

Vingt quatre heures après l'ouverture de la Conférence de haut niveau sur la transformation de l'agriculture africaine, des mesures concrètes tombent.

Avec l'accord des Banques Centrales africaines et des Ministres de l'Économie et des Finances, la Banque Africaine de Développement (BAD) va mettre en place un fonds de 300 millions de dollars en faveur des femmes. L'annonce a été faite par le Président de cette institution continentale, à l'occasion d'une conférence de presse qu'il a animé, ce jeudi 22 octobre, en marge du deuxième jour de la Conférence sur « Nourrir l'Afrique » ouverte depuis hier, mercredi 21 octobre au Centre International de Conférence Abdou Diouf de Diamniadio, Dakar.

Selon M. Akinwumi A. Adesina, ce fonds en vue va avoir un effet de levier de trois milliards de dollars auprès des banques commerciales. La mise en place de cet instrument est une manière pour la BAD de créer une facilité de partage des risques avec le secteur financier. Ce qui va permettre de gagner la confiance des institutions de micro-finance et de banques commerciales, et les amener à accorder davantage de crédits à l'agriculture.

Cette option prise par la BAD est une facilité spécifiquement accordée aux femmes qui, malgré qu'elles constituent 70% de la population agricole active, butent toujours sur l'accès au financement alors qu'elles assurent 98% des remboursements de prêts.

Des mécanismes pour partager les risques avec les banques

La BAD ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Avec les Ministres de l'Économie et des Finances, et les Banques Centrales, l'institution africaine a convenu de réduire les risques tant redoutés par les banques commerciales afin de les encourager à soutenir les projets agricoles. « Nous avons décidé de créer un fonds pour augmenter et accélérer les financements agricoles au sein des pays en partageant avec les banques les risques », avance M. Adesina.

Les responsables de la BAD estiment qu'une fois ce processus de partage de risques prend forme, les banques commerciales y trouveront leur compte avec de bons crédits.

Dans cette volonté de recherche de ressources, la BAD lorgne les fonds d'investissement d'Afrique, estimés à environs 65 milliards de dollars, les envois des migrants qui sont à plus de 500 milliards. Les autorités africaines veulent ainsi trouver les meilleurs mécanismes devant permettre de sécuriser ces fonds afin d'en réorienter une bonne partie vers l'agriculture.

Une option jugée possible par Adesina qui fait allusion à l'«excédent de liquidité » qui caractérise le secteur bancaire africaine. Mais, s'est-il désolé, l'agriculture reste le parent pauvre car elle ne recèle que 3% des financements des banques. Pour lever les équivoques, le Président de la BAD, pense qu'il faut aider les banques à mieux comprendre le secteur agricole et mettre en place des instruments qui vont permettre de partager les risques.

Réduction de 60% des procédures de décaissement de la BAD

Une ère nouvelle s'est ainsi ouverte avec l'arrivée du nouveau président de la BAD qui compte mettre le coup d'accélérateur tant attendu dans la mise en œuvre des projets et programmes.

L'institution répond ainsi du tic au tac aux interpellations concernant les lenteurs notées dan ces procédures. Des goulots d'étranglement que M. Adesina loge dans l'évolution habituelle des institutions internationales. Devant cet état de fait, il reconnait qu'« il faut alléger le système et accélérer les choses ». Avant de confier : « J'ai donné des directives au niveau interne pour la réduction de 60% les délais des procédures et des décaissements ». Un obstacle qui explique, en partie, la faible capacité des pays à absorber les ressources mises à leur disposition. Très engagé, l'ancien ministre de l'agriculture du Nigéria de lancer : « J'ai pris la décision de terminer tous les projets car l'Afrique nous attend ».

Dans cette même veine, M. Adesina assure que la BAD va significativement augmenter les financements dans l'agriculture pour rendre l'économie africaine plus rentable et plus diversifiée.

Dissipant doutes craintes par rapport à ces mesures nouvelles impulsées au niveau de la Banque, Akinwumi A. Adesina assure que les allègements des procédures récemment pris dans les passations des marchés au niveau de la BAD ne vont aucunement menacer la transparence. Selon lui, « il y a des procédures obligatoires et nécessaires mais il faut couper celles qui alourdissent ».

L'engagement politique y est, et les actions concrètes se dessinent. C'est ainsi qu'avec toujours l'accord des Banques Centrales et des Ministres de l'Économie et des Finances, la BAD compte renforcer ses financements accordés aux pays pour répondre aux effets néfastes des changements climatiques.

Des actions sont également envisagées dans le secteur de l'agro-industrie pour permettre à l'Afrique de transformer les produits agricoles.

Ces importantes décisions du président Adesina ont été rendues publiques en présence des Ministres de l'Économie et des Finances de la Guinée, de la Tanzanie, du Mozambique, ainsi que des Ministres de l'agriculture de la Guinée, de Madagascar, de la Tunisie, du Togo, du Ministre délégué chargé du budget du Gabon, et des Gouverneurs de Banques Centrales Africaines.

Les États s'engagent à suivre la BAD dans cette nouvelle dynamique

En 2009, les Etats africains avaient pris l'engagement à Maputo, au Mozambique, de consacrer 10% de leur budget à l'agriculture. Six ans après, le bilan est loin des attentes. Face à ce constat, le Président de la BAD pense que pour que les gouvernements puissent arriver à respecter un tel engagement, il faut qu'il ait suffisamment de financements publics.

Félicitant le nouvel engagement de la BAD, les ministres de l'Économie et des Finances ainsi que leurs collègues de l'agriculture qui ont pris part à la rencontre de Dakar engagent leur État à aller dans le même sens.
A leur avis, l'engagement de la BAD doit être accompagné d'une volonté politique afin de parvenir à nourrir l'Afrique.

Cet ensemble de mesures prises rend euphorique le ministre de l'agriculture de Madagascar qui déclare : « Cette conférence de Dakar va être un tournant dans l'agriculture africaine avec la rapidité de prise de décision et la volonté des acteurs à aller de l'avant. Cette conférence a conscientisé tout le monde sur la nécessité de financer l'agriculture ».

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