Sénégal: Le secteur privé pour plus de considération dans l'octroi des projets du PSE

13 Mai 2016

Les entreprises sénégalaises revendiquent plus de considération de la part des autorités de ce pays dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent (Pse). Des patrons de sociétés l’ont fait savoir lors des panels, tenus le jeudi 12 mai à Dakar, commémorant les 10 ans du Magazine Réussir, spécialisé dans l’information économique et du business. Cet organe de presse avait convoqué la réflexion autour de « PSE et secteur privé national et panafricain : Quelle appropriation ?»

« Les grands projets aux sociétés étrangères ou multinationales et les petits projets aux entreprises sénégalaises ». C’est la rengaine qu’ont repris beaucoup de chefs d’entreprises sénégalaises pour fustiger le traitement que le régime du Président Macky Sall leur réserve dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent (PSE). C’était lors des panels organisés à l’occasion de l’anniversaire des 10 ans du Magazine Réussir célébrée le jeudi 12 mai à Dakar, autour du thème centrale : « PSE et secteur privé national et panafricain : Quelle appropriation ?»

Le président de l’Ordre des comptables du Sénégal, M. Mamour Fall a ouvertement décrié le traitement que le gouvernement sénégalais réserve au secteur privé local dans l’octroie des marchés du Plan Sénégal Emergent (Pse). « Dans le Pse, on a l’impression que les grands projets c’est pour les compagnies étrangères et les petits pour les entreprises locales ». Une attitude qui dénote d’un manque de considération ou un mépris envers la capacité des entreprises sénégalaises à mettre en œuvre les grands projets infrastructurels.

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Dans le cadre du Pse, il faut rappeler que le Centre international de conférence Abdou Diouf de Diamniadio (Cicad) est réalisé par une entreprise turque. L’autoroute Ila Touba qui s’étant de Thiès à Touba est confiée à des Chinois. Le Train express régional (Ter) Dakar-Aibd dont la livraison est prévue en 2019 sera réalisé par le constructeur français Alstom. Last but not least.

Mamour Fall de lancer aux autorités : « on ne peut pas développer un pays en ayant presque honte de son secteur privé ». Lui emboitant le pas, M. Massambe Diop de l’ordre des architectes du Sénégal se désole du fait que seule une dizaine d’architectes sénégalais sur les 300 que compte le pays, sont impliqués dans la réalisation des projets du Pse.

Dans un ton acerbe et sans détour, l’homme de médias, M. Abdoulaye Rokhaya Wane, attire l’attention sur la nécessité d’éviter de « désacraliser » le Pse en mettant plus en avant la communication politique et commerciale. A son avis, « le Pse devrait être un levier pour créer une industrie de Bâtiment et travaux publics (Btp) ».

Un constat illustré par le fait, selon le directeur général de la Banque de l’habitat du Sénégal (Bhs), M. Bocar Sy, qu’à Diamniadio où l’essentiel des projets du Pse seront érigés, les gros développeurs importent des machines pour produire des briques. A l’en croire, « en dehors des PVC et du ciment, tout le matériel est importé ».

Une situation plus qu’étonnant si l’on entend l’Etat sénégalais crier à tout bout de champ la place qu’il donne au secteur privé sénégalais dans le Pse. Une position qui, selon beaucoup d’observateurs, devrait être évidente vu les habits d’opportunités d’investissements et de création de richesses sur lesquels est présenté le Pse.

Le directeur de la Bhs estime que Diamniadio qui ambitionne de produire 10 milles logements par an, apportera beaucoup au marché de l’immobilier. Selon lui, la mise en œuvre des programmes de construction devrait générer 36 milles emplois par an pour une manne salariale de 15 milliards de F Cfa et 45 milliards de F Cfa de factures à payer aux fournisseurs. Ce qui représente une opportunité pour le secteur bancaire à la recherche d’épargne en plus des niches de fiscalité pour l’Etat sénégalais.

A cela, Bocar Sy y ajoute une belle carte des métiers du bâtiment avec des possibilités de formation pour la mise à niveau permanente de la main d’œuvre locale par rapport aux standards internationaux.

Il faut préciser que la cérémonie de clôture de ces panels organisés par M. Baye Dame Wade, patron du Magazine Réussir a été rehaussée par le ministre d’Etat, Ministre de l’Économie, des Finances et du Plan (Mefp), M. Amadou Ba et de son homologue en charge du PSE, M. Abdou Aziz Tall.

Le Mefp renseigne que le Plan d’action prioritaire (Pap) du Pse est construit sur la base du scénario optimiste du Plan qui est évalué à 9685,7 milliards de FCFA. Le département de M. Ba assure que son financement est acquis pour 5737,6 milliards de FCFA, soit 59,2% tandis que le gap de financement à rechercher est de 2964 milliards de FCFA, soit 30,6% et celui à couvrir par des recettes additionnelles et des économies sur les dépenses est de 984 milliards de FCFA, correspondant à 10,2%.

Ainsi pour une bonne implication du secteur privé dans cette opération, le président de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes), M. Mansour Cama oriente son regard sur la question de la disponibilité des ressources longues.

Dans cette dynamique, Mamadou Racine Bathily, consultant en assurance, invite le Bureau opérationnel de suivi du Plan Sénégal Emergent (Bosse) à mettre en place un mécanisme incitant les sociétés d’assurance à mobiliser les ressources disponibles pour le financement du PSE.

A ce sujet, le Directeur général du Bosse, M. Ibrahima Wade parle d’un « emprunt Pse national ». Une suggestion qui oriente la prospection vers le marché financier ou boursier.

Cette dernière piste semble être prometteuse vu le dynamisme du Sénégal, sur le marché de l’Uemoa, qui s’est confirmé au fil des ans. A en croire, le Directeur général de CGF Bourse, Mme Marie Odile Sène Kantoussan,  « en 10 ans, le Sénégal a levé plus de 100 milliards de F Cfa sur le marché financier sous-régional ». Avant de confirmer la disponibilité des ressources longues, gages de sécurité pour les investisseurs.

Pour que les États tirent profit de cette manne, Mme Kantoussan suggère la canalisation de toutes les ressources disponibles dans l’Union vers des canaux beaucoup plus formels. Ce qui constitue un clin d’œil pour le secteur informel qui contribue de façon considérable à la formation du PIB et à la création d’emplois.

Dans cette dynamique de recherche de modèles devant ouvrir les vannes au secteur privé dans la mise en œuvre du Pse, l’universitaire et spécialiste de la Régulation Etat-Privé, Pr Abdoulaye Sakho prie les autorités sénégalaises à intégrer l’aspect droit qui définit le cadre juridique et réglementaire de tout programme. Selon lui, le Pse devrait prendre en compte aussi les mutations en cours ainsi que les innovations technologiques.

L’apport des Sénégalais de la Diaspora n’a pas été laissé en rade. Le Directeur de la Planification des politiques économiques du Mefp, M. Pierre Ndiaye chiffre les envoies des émigrés sénégalais à 1000 milliards de F Cfa par année. Une enveloppe qui, à son avis, devrait être orientée vers l’investissement et non des dépenses de consommations comme c’est le cas présentement.

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