Sénégal: Fatou Dramé, Coordonnatrice Projet ABRIS à Plan International Sénégal – « Il faut renforcer la coopération sous régionale pour un meilleur contrôle de la mobilité des enfants »

Ce phénomène des enfants mendiant dans les rues de Dakar devrait bientôt disparaitre avec la mesure prise par le gouvernement sénégalais de lutter contre ce fléau.
13 Juillet 2016
interview

Les autorités sénégalaises ont pris la ferme décision d'interdire la mendicité des enfants dans les rues du pays afin de mettre fin à leur exploitation. Une mesure saluée par le groupe de la société civile et des partenaires techniques et financiers pour la protection de l'enfant. Plan International, l'un des principaux acteurs investit pour la cause des enfants au Sénégal, a décrypté cette mesure salutaire avant de faire des suggestions pour sa bonne mise en œuvre.

Quelle analyse faites-vous de la décision du chef de l'État sénégalais de retirer les enfants en situation de rue ? 

Nous saluons cette décision du Président de la République qui en notre sens vise à restaurer la dignité de ces enfants et à les retirer des circuits d'exploitation dans lesquels ils sont enfermés malgré eux.

Cette décision offre-t-elle toutes les garanties pour mettre les enfants à l'abri de l'exploitation, de l'abus, de la maltraitance et de la négligence si l'on sait que de pareilles mesures prises dans le passé, par les autorités sénégalaises, n'ont pas connu un franc succès ?

Il est aujourd'hui heureux de noter que l'État lui-même a mis en branle tout l'appareil d'État pour répondre à cette injonction du Président de la République. Mais ce qui est le plus rassurant, c'est de voir dans nos communautés jusque dans les contrées les plus lointaines, des masses critiques d'indignés qui s'engagent au côté de l'État pour retirer les enfants de cette situation écœurante. Aujourd'hui, nous vivons un tournant historique marqué par une mobilisation nationale au tour de cette question. Ce sont là les faits qui, mis en ensemble, nous permettent de demeurer optimistes quant à l'avenir de ces enfants

Le fait que cette question des enfants en situation de rue revient à chaque fois qu'un nouveau régime arrive, ne met-il pas à nu les politiques jusque-là mise en œuvre pour la défense des droits de l'enfant ?

Cela peut relever de plusieurs facteurs que nous n'ignorons pas et sur lesquels, en tant que société civile nous jouons notre rôle de veille et d'alerter en attirant sans cesse l'attention de l'État mais également en définissant avec lui des stratégies de mitigation.

Quelles sont les mesures d'accompagnement qui s'imposent pour assurer un bon suivi de cette décision de retirer les enfants de la rue ?

-         D'accord la coordination des interventions et l'implication autant des ministères chargés de l'application de la loi que des structures de prise en charge

-         La définition d'une stratégie de retrait définitif accompagné d'une politique de renforcement de la résilience des familles et des communautés

-         La prise de sanction effective pour les contrevenants après que toutes les mesures de prises en charge et d'accompagnement aient été mis en œuvre

Quel est le rôle que la société civile joue ou doit jouer dans ce combat consistant à retirer les enfants de la rue ?

Le groupe de la société civile et des partenaires techniques et financiers (GSCPTF) mobilisent tous les moyens à sa disposition pour rendre cette décision irréversible.

-         Un appui technique auprès de l'État et de ses services en charge de cette mesure pour la définition des stratégies les plus appropriées, inclusives et coordonnées.

-         Ensuite nous travaillons à la vulgarisation de cette mesure pour une plus grande adhésion au niveau communautaire, nationale et internationale à travers une communication stratégique et ciblée

-         Enfin un appui financier et matériel pour la prise en charge des enfants dans le respect des normes et standards minimum en la matière

Plan International a-t-elle une stratégie pouvant aider un pays comme le Sénégal à réussir une telle opération ?

Il faut dire Plan international tout comme les autres organisations membres du  groupe de la société civile et des partenaires techniques et financiers (GSCPTF) n'ont pas attendu la décision de l'État pour investir le secteur. Depuis plusieurs années nous avons travaillé au renforcement des capacités du Gouvernement et des communautés à prévenir et à réprimer l'exploitation et la traite des enfants par la mendicité forcée. Et aujourd'hui, nous continuons dans cette lancée en plus d'être dans la dynamique de la société  civile et des partenaires techniques et financiers qui actuellement finalisent son plan d'action pour accompagner le retrait des enfants de la rue.

La mendicité forcée des enfants ne touche pas uniquement le Sénégal mais tous les pays de la sous-région. Est-ce qu'il existe une stratégie communautaire sur laquelle s'appuie Plan International et ses partenaires pour lutter contre ce phénomène ?

Ce sont justement ces ramifications sous régionales qui font que ce phénomène est difficile à adresser, mais des accords de collaboration existent entre certains pays de la sous-région. Mais le groupe de la société civile et des partenaires techniques et financiers dans lequel nous sommes membres actifs, veut porter le plaidoyer pour renforcer la coopération sous régionale pour un meilleur contrôle de la mobilité des enfants.

Il faut noter que ENDA jeunesse action, qui est d'ailleurs partenaire d'exécution de Plan International dans le cadre du Projet ABRIS – Un projet qui a pour objectif principal la lutte contre la mendicité forcée des enfants - est membre du réseau Afrique de l'ouest pour la protection des enfants (RAO) qui se charge des retours en familles des enfants dans toute la sous-région.

 

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