Au début du mois de novembre se tiendra à New Delhi, la 7e Conférence des parties (COP7) à la Convention-cadre de la lutte antitabac (CCLAT) et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a récemment publié des documents de travail en préparation de la prochaine rencontre. Selon des chercheurs américains, ces documents prouvent que l’organisation multilatérale est une menace pour la santé publique.
D'après le chercheur Jullian Morris, vice-président du groupe de réflexion américain Reason Foundation, l’OMSreste sourde à la réduction de la nocivité du tabac obtenue par des dispositifs - comme la cigarette électronique - qui ont fait leurs preuves en matière d'abandon de la consommation de cigarette classique.
Pour M. Morris, le principal problème avec l’OMS et la CCLAT est que celles-ci sont prisonnières de l’idée que la meilleure méthode de réduire le tabagisme est que les fumeurs “arrêtent de fumer ou meurent”. La Convention est pour cette raison très sceptique quant aux possibilités offertes par les nouvelles technologies, telles que les dispositifs de vapotage (appelés communément “cigarettes électroniques”) pour réduire les effets nocifs de l’inhalation de la fumée des cigarettes.
Et pourtant un récent rapport du Royal College of Physicians au Royaume-Uni a conclu que vapoter est “au moins 95% moins dangereux” que fumer des cigarettes, que les appareils de vapotage devraient être facilement accessibles et que les médecins devraient encourager les fumeurs à les utiliser plutôt que de continuer de fumer.
Morris avertit que si les gouvernements suivent les recommandations restrictives de la CCLAT, cela constituera un frein au développement de ces produits innovants qui pourrait entrainer des conséquences sanitaires bien plus graves. Il considère que “l’opposition de l’OMS au principe de la réduction de la nocivité du tabac n’est pas honnête et elle menace la santé publique”.
L’OMS adopte très timidement la réduction de la nocivité et les produits potentiellement moins dangereux
La position de l’OMS a très récemment évolué sur la question des systèmes électroniques de délivrance de la nicotine (SEDNN) et les systèmes électroniques de délivrance de produits non-nicotinés mais de manière timide puisque tout en reconnaissant la moindre nocivité de ses dispositifs, elle n’encourage pas ouvertement le passage de la cigarette classique à ces méthodes alternatives de consommation de la nicotine ou l’accès à d’autres produits par des alternatives moins nocives.
Paradoxalement, ces récents rapports de l’OMS sur les nouveaux produits recommandent l’interdiction de la publicité, du marketing et de la promotion, l’interdiction de l’usage dans les espaces publics comme pour la cigarette classique mais surtout une taxation élevée qui rendrait plus difficile ce passage du tabac fumé au tabac chauffé ou à la nicotine vaporisée. Alors que des institutions renommées comme le Royal College of Physicians et une proportion importante de la communauté médicale se sont prononcés en faveur de la cigarette électronique et des autres alternatives au tabac fumé. Dans ces rapports, l’OMS réclame encore des preuves scientifiques que le risque pour la santé des consommateurs est réduit. Les résultats des recherches disponibles actuellement en grand nombre sont, selon l’agence des Nations-Unies, inspirées par l’industrie du tabac et/ou les fabricants des nouveaux produits.
Pour plus de transparence et moins d’exclusion
M. Morris déplore aussi que dans la défense de sa position, l’OMS ne fait pas preuve de transparence puisque la presse est exclue de ses travaux et que les ONG intéressées par la problématique du tabagisme sont limitées au maximum. Vingt pour les COP sur le tabac contre 2000 pour les COP sur l'environnement. « Si la CCLAT est vraiment déterminée à défendre le droit à la santé, elle doit écouter ceux qui prennent le contrôle des facteurs qui ont un impact sur leur santé et ceux qui les aident en cela. Autrement dit, elle devrait permettre la participation des organisations qui représentent les vapoteurs, les consommateurs de snus[i] et les entreprises qui fabriquent ces produits ainsi que d’autres produits nicotinés moins toxiques ».
L'intransigeance de l'OMS dans la chasse de tout conflit d'intérêt des observateurs et de l'influence de l'industrie du tabac est telle, selon Reason Foundation, qu’Interpol, la police internationale, dont le savoir est incontestable en terme de lutte contre le trafic international de cigarettes et contre la criminalité en général, est exclue parce qu'elle reçoit un financement marginal d'un géant du tabac. La lutte contre la contrebande du tabac est pourtant un thème important dans la Convention-cadre pour la lutte antitabac.
L’OMS détient une opportunité historique d’encourager les efforts sur la réduction de la nocivité causée par la fumée en lançant un message aux fumeurs sur les avantages liés aux changements pour de tels produits. Une interdiction et/ou une stricte régulation de tels produits seraient une menace pour une alternative moins dangereuse pour des millions d’adultes fumeurs qui continueront tout de même de fumer.
Les activistes de la réduction de la nocivité du tabac et les défenseurs des produits moins dangereux ne doivent être que moyennement enthousiasmés par la conversion partielle de l’OMS à la cigarette électronique. D’ici à la COP7 en novembre à New Delhi, ils vont certainement redoubler d’efforts pour que les Parties intègrent résolument dans la Convention-cadre les nouveaux produits qui pourraient faciliter le sevrage des fumeurs et améliorer leur santé de façon significative.
[i] Poudre de tabac qui se consomme oralement. Très répandue en Scandinavie.