Afrique: Un besoin annuel de 32 à 40 milliards de dollars pour « Nourrir l'Afrique »

Bannière du lancement de la « Stratégie pour la transformation agricole en Afrique 2016-2025 » de la BAD.
25 Novembre 2016

La Banque Africaine de Développement (Bad) veut mobiliser 315 à 400 milliards de dollars US au cours des dix prochaines années, soit une moyenne de 32 à 40 milliards de dollars US par an pour mettre en œuvre sa stratégie « Nourrir l’Afrique ». Cette estimation faite par le cabinet international Delberg a été partagée dans le cadre de l’atelier d’engagement de l’Afrique de l’Ouest, tenu ce jeudi 24 novembre à Dakar. Quatre autres ateliers régionaux se  tenaient simultanément dans des capitales africaines.

Le processus est lancé. L’engagement pour « Nourrir l’Afrique » est matérialisé par la Banque Africaine de Développement (Bad) à travers cinq ateliers régionaux organisés ce jeudi 24 novembre à travers l’Afrique. Le Résident Représentant de la Bad au Sénégal, M. Adalbert Nshimyumuremyi confie que c’était pour partager les orientations de la stratégie pour la transformation de l’agriculture africaine 2016-2025. L’occasion était aussi d’inviter les parties prenantes, aussi les acteurs publics, secteur privé, acteur de la société civile et partenaires techniques et financiers, intervenant dans le secteur agricole, à réaffirmer leur engagement en faveur de la transformation de l’agriculture africaine. Ceci fait, suite à la Conférence de Haut niveau sur le même thème organisée du 21 au 23 Octobre 2015 à Dakar.

Cette stratégie de la Bad qui renferme les recommandations de cette grande messe de Dakar sur comment « Nourrir l’Afrique » est articulée aux cadres de planification nationaux et sous-régionaux. Dans cette vision, il est estimé qu’atteindre les objectifs fixés nécessite des investissements substantiels et des résultats en termes de revenus consistants.

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L’investissement requis pour transformer l’agriculture africaine est ainsi estimé entre 315 à 400 milliards de dollars US pour la période 2016 – 2025, soit une moyenne de 32 à 40 milliards de dollars US. Le cabinet Dalberg International, sur la base d’une étude menée, souligne que cette manne financière peut générer 85 milliards dollars US de revenu par an à partir de 2025.

Le représentant du Directeur du Département d’agriculture et d’agro-industrie de la Bad, M. Ken Johm qui en a fait échos, lors de l’atelier d’engagement de Dakar, rapporte que : actuellement l’investissement total consacré à l’agriculture africaine s’élève à environ 7 milliards de dollars Us par an. Ce qui, à l’en croire, laisse un déficit d’environs 25 à 33 milliards de dollars Us.

Recherche de financements additionnels pour combler le déficit

Ainsi, pour la mise en œuvre réussie de sa stratégie, la Bad et les partenaires du secteur privé vont attirer les financements privés et institutionnels à travers l’établissement d’un environnement favorable à l’investissement privé. Dans cette optique, il s’agira aussi de promouvoir l’utilisation d’outils innovants de réduction des risques et des financements mixtes, apporter la preuve de retour potentiel sur investissements ajustés au risque pour les projets agricoles et agroindustriels.

Ainsi pour compléter le déficit financier, la Bad va donner le bon exemple en augmentant le volume annuel de ses prêts à 2,4 milliards de dollars Us. Sur cette lancée, avise M. Johm, l’institution africaine invite les gouvernements au co-investissement dans les prêts augmentés de la Bad (à 10%) et d’augmenter le budget alloué au secteur agricole de 3% à 5% en moyenne du moment que les 10% fixés à Malabo semblent « chimériques ».

Dans cette même dynamique, la Bad convie les banques commerciales qui prêtent actuellement 660 milliards de dollars Us en moyenne par an à mobiliser davantage de ressources pour l’agriculture. Dans cette démarche, elle fait un clin d’œil aux fonds de pensions souveraines, aux fonds de pension et aux Fonds Africains de capital-investissements pour la mobilisation de ressources.

Les préalables pour « Nourrir l’Afrique », selon le ministre sénégalais de l’agriculture

Venu co-présider l’atelier d’engagement de Dakar avec le Résident Représentant de la Bad au Sénégal, M. Adalbert Nshimyumuremyi, le ministre en charge de l’agriculture a partagé la vision que le gouvernement a pour « Nourrir l’Afrique ».

Pour le gouvernement du Sénégal, confie Pape Abdoulaye Seck, « Nourrir l’Afrique c’est une mutualisation de nos interventions à l’échelle du continent ». Ce qui, à son avis, signifie une mise en synergie des efforts, des intelligences, et des moyens africains. Ceci, en vue d’une exploitation optimale des capacités productives des écosystèmes du continent.

« Nourrir l’Afrique », d’après l’équipe gouvernementale sénégalaise, signifie comprendre et accepter que l’indépendance alimentaire est certainement la plus forte des indépendances parce qu’étant directement corolle à notre dignité.

« Il nous faut par conséquent agir avec célérité, avec efficacité, avec efficience pour transformer positivement et durablement les agricultures africaines. Il n’y a pas de fatalité, nous devons oser entreprendre en vue de tirer le succès ».

M. Seck fait savoir également que « Nourrir l’Afrique c’est assurer effectivement la prise en charge de toute une panoplie de préalables dont la maîtrise de l’eau pour sécuriser et étaler la production agricole africaine dans le temps et dans l’espace ».

Le deuxième préalable avancé revient à augmenter d’une manière intelligente la productivité parce qu’elle doit être assortie d’une veille concernant la durabilité des nos systèmes de production.

Pour lui, il s’agit aussi de mettre à la disposition du monde rural, des facteurs de production de qualité pour que l’Afrique puisse respecter de façon scrupuleuse les itinéraires techniques qui sont préconisées par nos recherches agricoles.

Entre autres préalables, le ministre sénégalais de l’agriculture pense qu’il convient de réformer le foncier tout en évitant d’être dans une logique de création d’un marché foncier rural qui serait, du point de vue de son gouvernement, une forme d’accaparement des terres. « Pour nous, les terres africaines doivent rester africaines. Et nous distinguons bien la sécurisation de l’investissement privé et le transfert de propriété ».

Dans cette même dynamique, il invite à penser à l’amélioration de l’accès au marché sans qui, il serait difficile voir impossible de valoriser la production agricole dans son ensemble.

Dans sa logique directrice, M. Seck n’a pas occulté l’importance de la formation, l’information et le soutien aux exploitations familiales qui continuent de jouer un rôle important dans le continent. A son avis, il ne peut pas y avoir une sécurité alimentaire et nutritionnelle durable sans des exploitations familiales fortes.

« Pour que l’Afrique nourrisse l’Afrique, il faut également accorder un poids à l’appropriation et à l’incorporation d’innovations technologiques pour que nous puissions changer la physionomie de nos agricultures ».

Le ministre de l’agriculture considère qu’il faut favoriser l’émergence d’un système privé qui va cohabiter et développer de synergies avec les exploitations familiales. « On ne peut pas avoir un secteur privé fort sans connexion avec l’exploitation agricole familiale ».

Il plaide pour la promotion de l’emploi des jeunes, des femmes mais aussi des personnes qui sont porteuses d’handicape physique et qui font aussi partie de la société. « C’est la promotion de l’emploi qui va permettre un partage plus équitable des dividendes issues de l’agriculture africaine ».

D’après lui, il convient aussi de mettre en place des infrastructures de base pour lutter contre les pertes post-récolte. « Dans un continent où l’on vise la sécurité alimentaire et nutritionnelle, il est inacceptable d’enregistrer des pertes post récoltes qui peuvent aller de 25 à 40% de la production ».

A son avis, il faut intégrer la restauration et l’amélioration de la fertilité des sols dans un contexte de changement climatique qui expose à une vulnérabilité, une durabilité et à une optimisation des performances de l’agriculture africaine.

Last bat not list. M. Seck a souligné la nécessité d’assainir l’environnement de la production et la commercialisation. Ce qui, pour lui, passe par une massification des investissements publics.

Dans un brin d’optimisme, le ministre de l’agriculture du Sénégal souligne que la Bad sous le leadership d’Adesina Akinumi milite et agit conséquemment pour que l’Afrique nourrisse l’Afrique et que l’Afrique se positionne pour nourrir une partie du monde dans la durabilité. Un pari ambitieux qui n’est atteignable qu’à travers l’excellence. Ce qui, pour lui, signifie un changement des attitudes et des comportements « pour que nous puissions produire plus, produire mieux, avoir une agriculture forte aux dividendes partagées au nom de l’équité et de la transparence ».

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