Permettez-moi d’emprunter une formule chère au socialiste suisse, Jean Ziegler : « La victoire des vaincus » pour dire qu’après tout, la candidature du professeur Abdoulaye Bathily au poste de la présidence de la commission de l’Union africaine, a aussi connu des réussites. Comme Jean Ziegler, nous pensons que le vaincu à l’élection a aussi collectionné des victoires dans ce rude combat contre les partisans de l’inertie qu’il a mené avec tact, intelligence et élégance.
La plus grande réussite de la candidature du panafricaniste, historien et soixante-huitard a été de créer un débat intergénérationnel sur l’Afrique, sur son développement économique et social, le rôle et l’importance des universités et centres de formation africains, la paix et la sécurité en Afrique, l’apport de sa diaspora et de son histoire. Cette candidature a permis aux soixante-huitards et à la génération d’après de discuter avec les plus jeunes et d’éclairer la nouvelle génération sur des pans importants de l’Histoire de la lutte pour les indépendances et contre le néocolonialisme. En le faisant, les anciens ont certainement appris aux côtés des plus jeunes l’importance des technologies de l’information et des réseaux sociaux dans la diffusion et la dissémination des savoirs.
Cette campagne a aussi permis de savoir que le professeur Abdoulaye Bathily n’était pas unique dans son genre. Il existe en Afrique des centaines voire des milliers de personnes comme le candidat Bathily qui réunissent les trois légitimités : celles académique, professionnelle et politique. C’est à nos dirigeants de les repérer et de les mettre dans des conditions idoines pour qu’ils puissent participer à la consolidation d’une Afrique unie, indépendante, émergente et forte.
Sa campagne était aussi une réussite sur le plan de la communication : Facebook, twitter et whatsapp ont été intelligemment utilisés pour populariser les débats sur le continent et sur les structures régionales qui était jusqu’alors la chasse gardée des dirigeants africains qui en faisaient des instruments pour caser certains cadres de l’administration. La candidature du professeur Bathily, a permis au grand public de mieux comprendre le rôle, les objectifs, l’historique et le fonctionnement de l’Union africaine.
Tout compte fait, une jonction entre les générations est définitivement établie. Le pont a été installé de manière savante et opportune entre les combattants d’hier d’une Afrique libérée et ceux d’aujourd’hui en butte à des enjeux plus pointus. Par-dessus le marché, c’est le témoin que les anciens viennent de remettre de façon symbolique à la nouvelle génération qui peut être fière de Monsieur Bathily et de ses pairs qui n’auront jamais démérité devant l’histoire. Saura-t-elle maintenir le flambeau et continuer la lutte qui libérera l’Afrique ? La réponse lui appartient, à cette génération qui a en main tous les outils, même si elle est exposée à toute sorte de menaces et de déviations qu’il est possible de contourner pour emprunter le chemin du salut.