Dakar — L'Algérie, la Mauritanie et la Tunisie sont confrontés à des défis et opportunités communs dont la baisse des prix des matières premières, la faiblesse du commerce avec les pays voisins et d'importants taux de chômage parmi les jeunes et les femmes, révèlent les Profils pays de la Commission économique pour l'Afrique (CEA) lancés aujourd'hui à Dakar (Sénégal).
« Bien que les économies algérienne et mauritanienne aient résisté à la baisse des prix du pétrole et du fer, la baisse des termes de l'échange souligne la nécessité, désormais vitale pour ces pays, de diversifier leur production pour réduire leur dépendance vis-à-vis de l'export des matières premières », souligne, à l'occasion du lancement, Mme Giovanie Biha, Secrétaire exécutive adjointe de la CEA en charge de la diffusion du savoir.
« Sur le plan social, un des plus grands défis reste la situation des inégalités dans les trois pays. On observe aussi des problèmes nouveaux, qui risquent d'alourdir les coûts de santé, comme l'obésité ou le vieillissement des populations », déclare M. Omar Abdourahman, Directeur par intérim du Bureau sous-régional de la CEA pour l'Afrique du Nord. « Par ailleurs, alors que la Tunisie a atteint une parité parfaite en matière de genre dans des domaines comme l'éducation ou l'alphabétisation, il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à un accès égal à l'emploi » ajoute-t-il.
Vingt-et-un profils pays ont été lancés aujourd'hui en marge de la semaine du développement africain (Dakar, 23 - 28 mars 2017). Ces documents portent sur l'Algérie, la Mauritanie et la Tunisie pour l'Afrique du Nord, mais aussi l'Angola, le Burundi, le Cap Vert, le Tchad, la République Centrafricaine, Djibouti, la Guinée Equatoriale, le Gabon, la Gambie, le Ghana, Madagascar, le Malawi, l'Ile Maurice, le Mozambique, le Nigeria, la Somalie, l'Afrique du Sud et le Swaziland.
Des rapports du même type portant sur l'Égypte, le Maroc et le Soudan ont par ailleurs été lancés l'année dernière à Addis-Abeba (Éthiopie).
La publication des Profils pays de la CEA a démarré en 2015 conformément à la Résolution 917 de la Conférence des ministres des finance, de la planification et du développement économique (Abuja, 2014), et le concept des Profils pays développé pour fournir aux décideurs africains une analyse indépendante du développement économique et social de leurs pays et des avancées réalisées en matière d'intégration régionale.
Ces documents contiennent plusieurs innovations dont :
L'Indice africain d'intégration régionale, mis au point par la Commission économique pour l'Afrique (CEA) en partenariat avec la Banque africaine de développement (BAD) et la Commission de l'Union africaine (CUA). Ce dernier est fondé sur les cinq piliers fondamentaux de l'intégration du continent (intégration commerciale, infrastructures régionales, intégration productive, libre circulation des personnes et intégration financière et macro-économique).
L'Indice africain de développement social (IADS) de la CEA qui mesure l'exclusion humaine dans six dimensions clés du bien être tout au long du cycle de vie (survie, santé, éducation, emploi, moyens de subsistance et capacité à mener une vie décente au-delà de 60 ans)
L'Indicateur de développement et des inégalités entre les sexes en Afrique (IDISA), qui permet d'évaluer les résultats des politiques menées contre la marginalisation des femmes et mieux connaître les problèmes et préoccupations de cette composante de la population.
Note aux rédacteurs (données marquantes)
Economie
En 2015, les économies algérienne, mauritanienne et tunisienne ont réalisé des taux de croissance de 3,9%, 3,1% et 0,8% respectivement. Entre 2013 et 2015, la croissance moyenne de l'Algérie et de la Mauritanie (3,5%) a été plus importante que dans le reste de l'Afrique du Nord* (2,5%). La modeste performance du PIB tunisien en 2015 résulte essentiellement des problématiques sécuritaires ; le pays a évité une croissance négative grâce à des récoltes exceptionnelles d'olives et de dattes.
En 2015, la croissance de la Mauritanie est essentiellement le résultat due de la bonne performance des secteurs primaire et tertiaire, qui ont pesé plus de 68% du PIB.
L'inflation est restée modérée en Algérie, en Mauritanie et en Tunisie.
Bien que les économies algérienne et mauritanienne aient résisté à la baisse des prix des hydrocarbures et du fer ainsi qu'au déclin des termes de l'échange, ces tendances confirment la nécessité de diversifier leur production afin de réduire leur dépendance vis-à-vis de l'export de produits primaires.
L'Algérie, la Mauritanie et la Tunisie se caractérisent par des échanges commerciaux particulièrement faibles avec leur voisinage dont les pays de l'Union du Maghreb Arabe ou de la CEN-SAD, leurs principaux partenaires économiques se trouvant en Europe, en Chine ou aux États-Unis.
L'Algérie étant un pays mono-exportateur, son potentiel de diversification économique est important.
Les investissements de la Mauritanie dans la production d'électricité devrait lui permettre de contrer l'un des principaux obstacles à l'investissement dans le pays.
En plus de viser de nouveaux marchés, la Tunisie gagnerait à diversifier son offre en investissant dans des domaines tels que le tourisme médical.
Social
Entre 1966 et 2015, l'espérance de vie à la naissance a augmenté, de 46 à 77 ans en Algérie, de 48 à 63 ans en Mauritanie et de 48 à 75 ans en Tunisie. Ces pays sont à présent caractérisés par des taux de fertilité relativement bas ou à la baisse malgré la persistance d'une importante mortalité infantile dans certains d'entre eux.
Alors que les retards de croissance infantile constituent toujours un problème en Mauritanie, de nouveaux phénomènes ont été observés en Algérie et en Tunisie. Parmi ces derniers l'obésité (13% des enfants de moins de cinq ans en souffrent en Algérie ainsi qu'un enfant sur 6 en Tunisie), et le vieillissement des populations (plus de 13% des Algériens devraient avoir plus de 60 ans d'ici 2030, plus de 19% des Tunisiens auront plus de 65 ans d'ici 2039).
Le chômage des jeunes reste une problématique commune et de plus en plus importante dans les trois pays.
Alors que des cas de parité optimale ont pu être observés en Tunisie dans les domaines de l'alphabétisation et l'éducation et que le nombre de femmes inscrites à l'université a dépassé celui des hommes en Algérie et en Tunisie, le chômage des femmes, fortement présent à tout âge, montre que du chemin reste à parcourir pour permettre aux trois pays d'optimiser les bénéfices tirés de leurs investissements dans l'éducation des femmes.
Pour plus d'informations sur les Profils pays, prière de visiter : http://www.uneca.org/fr/publications/profils-de-pays-2016
* Algerie, Égypte, Libye, Maroc, Mauritania, Tunisie, Soudan.