Monrovia — « La semaine dernière, une quarantaine de jeunes hommes et femmes sont morts de soif dans le Désert du Sahara, en essayant de rejoindre l'Europe. Plus d'un millier ont péri en Méditerranée depuis le début de cette année ». Tels sont les mots de la Présidente Ellen Johnson Sirleaf dans son allocution, lors du lancement d'un Groupe de haut niveau sur les migrations (HLPM) en Afrique, qui a eu lieu ce mardi, à Monrovia.
Mme Sirleaf fait remarquer qu'aujourd'hui, dans de nombreux pays européens, nous assistons à « un mélange de migrants de milieux divers vivant dans les rues et dans des conditions pouvant être décrites comme inhumaines ».
Établi en avril 2016 par la Commission économique pour l'Afrique (CEA) sous la direction de la Conférence conjointe des ministres de l'Union africaine (UA) et de la CEA à Addis-Abeba, ledit Groupe, composé de 14 membres est présidé par Mme Sirleaf. Le Groupe vise à faire avancer les questions de migration au sommet de l'agenda politique en engageant les principaux acteurs et partenaires.
Au cours du lancement, le Secrétaire exécutif par intérim de la CEA, Abdalla Hamdok, déclare que l'Afrique se voit privée des nombreux avantages de la migration en raison de politiques frontalières strictes. Il déplore le fait que les Africains aient besoin de visas pour se rendre dans 55% des autres pays africains.
« Les voyages effectués par les Africains sur le continent sont limités par des exigences strictes en matière de visa, de contrôles aux frontières excessifs et de restrictions à l'immigration, dit Hamdok et ajoute que le phénomène « augmente les coûts et les risques de la migration et entrave souvent la motivation individuelle pour migrer et les restrictions de mobilité du pays ».
M. Hamdok déclare également que bien que les médias internationaux aient tendance à présenter principalement des images d'un grand nombre de migrants africains traversant la Méditerranée à destination de l'Europe, la migration intra-africaine domine encore les flux migratoires sur le continent.
« Les données montrent que moins de trois pour cent de la population africaine ont migré à l'international et moins de 12 pour cent du total des flux migratoires à destination de l'Europe proviennent d'Afrique ».
Cette constatation est également soulignée par Mme Maureen Achieng, Représentante de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) auprès de l'UA, de la CEA et de l'IGAD.
« Les migrations en provenance d'Afrique vers d'autres régions se déroulent à un rythme beaucoup moins élevé que l'on pourrait penser », affirme Mme Achieng. « Il y a environ 7,5 millions de migrants ouest-africains en Afrique de l'Ouest, contre 1,2 million en Amérique du Nord et en Europe combinées ».
Mme Alma Negash, Fondatrice du Réseau de la diaspora africaine (Africa Diaspora Network) et Membre du Groupe de haut niveau sur les migrations déplore également la question des contrôles excessifs aux frontières. Elle cite l'Ouganda qui a accepté des migrants comme bon exemple et que les pays africains devraient suivre.
« Je félicite la conduite exemplaire de l'Ouganda en matière de migration. Au cours des dernières années, le pays à lui seul, a accueilli au moins 800 000 migrants et réfugiés du Soudan du Sud. L'Afrique doit endosser la responsabilité et s'occuper de ses enfants ».
Pour sa part, Knut Vollebaek, Membre du Groupe et ancien Ministre des affaires étrangères du royaume de Norvège, déclare que son gouvernement « est très heureux » de l'initiative du Groupe de haut niveau sur les migrations. M. Vollebaek exprime son espoir de voir le Groupe atteindre ses objectifs.
« J'espère que nous, le Groupe, sous la direction éclairée du Président Sirleaf, mobiliserons la volonté politique entre les gouvernements en Afrique et à l'étranger, les organisations régionales et internationales, la société civile, les entreprises et les autres parties prenantes pour adopter des politiques nécessaires en vue de faciliter l'organisation, la migration sûre, régulière et responsable et la mobilité des personnes ».
M. Vollebaek ajoute : « Je souhaite que nos activités défendent le nouveau paradigme de développement consacré dans l'Agenda 2030 et l'Agenda 2063 pour l'Afrique ».
Au cours des prochains mois, le HLPM consultera les groupes électoraux compétents aux niveaux national, régional et mondial pour formuler des recommandations sur les mesures à prendre pour construire et maintenir un large consensus politique. Ce consensus concerne le programme de développement international de la migration, en tenant compte des défis particuliers des pays dans des situations de conflit et post-conflit. Le rapport sera soumis lors du Sommet des chefs d'État de l'Union africaine en juillet 2018.