« La liberté d’expression est menacée au Sénégal avec l’avènement des réseaux sociaux ». C’est ce qu’a affirmé le directeur exécutif d’Amnesty International Sénégal. M. Seydi Gassama se prononçait dans le cadre d’un panel organisé, ce vendredi 9 juin à Dakar, autour du thème, « Les droits humains à l’épreuve de la nouvelle législation Sénégalaise ». Cet appel de détresse renseigne sur les « lois liberticides » érigées en bouclier contre les « dérives » sur les réseaux sociaux.
En se positionnant en garde fou, l’ONG Amnesty International exige la revue de la nouvelle législation Sénégalaise. Elle l’a fait savoir lors d’un panel sur « Les droits humains à l’épreuve de la nouvelle législation sénégalaise », tenue ce vendredi 9 juin à Dakar. Une rencontre qui a regroupé juristes, bloggeurs et activistes.
Selon le Directeur exécutif de son antenne dans le pays, « cette nouvelle législation a pour but de contrôler la société, de cacher les dérives auxquelles s’adonnent les politiques et qui peuvent être exposé devant les médias ».
Seydi Gassama estime que cette loi porte atteinte à la liberté d’expression. « Pour un oui ou un non, les gens sont mis en prison. Les réseaux sociaux sont des grandes places planétaires. Le seul hic, est que l’adoption de cette loi n’a pas fait l’objet de consultation. On ne sait plus c’est quoi les bonnes mœurs. On a de nouveaux délits, de nouvelles infractions qui sont punis et qui n’ont pas été prévu par la loi ».
Ainsi, a-t-il poursuivi, « ma crainte est que les journalistes vont réfléchir à 2 fois avant de divulguer une information. »
Dans la même veine, Me Demba Ciré Bathily estime que « ce qui est interdit doit être connu d’avances ».
D’après cet avocat à la cour qui faisait parti des panélistes, « Nos lois ont été en retard par rapport à la nouvelle technologie. Par exemple, Certains gens jouent à divulguer des informations non encore vérifiés sans savoir que cela peut être passible de poursuites ».
A son avis, « il se pose donc une nécessité d’informer les populations utilisatrices de ces réseaux sur cette nouvelle législation qui ne règle pas totalement cette question et mérite d’être encore actualisé ».
Ainsi, M. Bathily attire l’attention sur l’urgence de réformer cette nouvelle loi qui, « si l’on y prend pas garde, l’Etat peut se lever et mettre tout le monde en prison ».
Charles V. Sanches, de Plateforme de protection des lanceurs d’alerte en Afrique, pour sa part, considère que « le Sénégal fait face à la question de surveillance de masse ».
Dans sa communication, ce lanceur d’alerte déclare que « les questions d’atteintes à la vie privée sont un peu liées à la démocratie ». Pour lui, « L’État Cherche à protéger l’intimité des citoyens en la violant. D’où la nécessité de mettre à jour nos lois. Nos législations au Sénégal voire en Afrique sont très en retard sur l’environnement juridique internationale. L’internet a sa propre culture et ses propres codes. »
Lui emboitant le pas, Cheikh Fall, Africtivistes de la Ligue des cyberactivistes africains, affirme : « Les réseaux sociaux ont un phénomène que nos lois n’ont pas prévus ».
Selon lui, « les supports technologiques (facebook, twitter, youtube entre autre…) sont en avance sur nos législations. Et il sera difficile d’adapter les lois par r apports à ces nouvelles technologies du fait de leur éclosion rapide ». Et d’ajouter : « les histoires de photomontages n’honorent pas la démocratie Sénégalaise ».
M. Fall fait allusion à l’affaire de la fille présentement en détention à cause d’un photomontage jugé offensant sur le président de la République du Sénégal, M. Macky Sall et qui a été diffusé sur les réseaux sociaux.
Ce qui amène M. Mohamed Diop de la Commission des données personnelles de rappeler qu’« avec les Tics, les données personnelles sont au cœur des échanges ».
D’après lui, « la protection des données personnelles est très importante à l’ère où nous sommes. Mais, il est important de souligner que la vie privée est un domaine très large. D’où l’importance de trouver l’équilibre entre liberté et sécurité. En effet, en cas d’atteinte à la vie privée d’une personne dès qu’on est saisi, on informe le procureur ».
Sur la même lancée, Ibrahima Lissa Faye, président de l’Association pour la presse en ligne (Appel) n’a pas caché son inquiétude face à l’épée de Damoclès qui pèse sur les professionnels de son secteur. « La presse en ligne vit une psychose avec les nouvelles législations », a-t-il lancé.
Selon ce journaliste et responsable du site en ligne « PressAfrik », « avec cette législation et cette réprimassions tous azimuts, les journalistes sont obligés de réfléchir à deux fois avant de diffuser une information. Ce qui pousse à dire que la presse en ligne est en danger au Sénégal ».
Par ailleurs, a-il-poursuivi, « il est important de souligner que ce qui fait les commentaires sur les réseaux sociaux sont souvent instrumentalisés. Donc, il y’a urgence de revoir cette loi ».
Fanta Diallo du Réseau des bloggeurs du Sénégal, quand à elle, pense que « les utilisateurs des réseaux sociaux ne maitrisent pas les lois ».
S’adressant au public, la bloggeuse Fanta Diallo attire l’attention sur la nécessité de sensibiliser les populations sur la nouvelle législation. « C’est la raison pour laquelle, nous au sein du réseau des bloggeurs, on a initié un programme dénommé « net attitude », pour informer sur les risques de sanctions ».
Ainsi, reconnait-elle, « la présence sur les réseaux sociaux exige la morale, car c’est la seule chose qui peut permettre d’échapper à certaines dérives ».
Aussi, Fanta Dialla n’a pas manqué de dénoncer les imperfections liées à cette nouvelle législations. Elle se pose la question de savoir : « si être choqué par un photomontage doit il pousser a emprisonné une personne ? »
Toutes fois les participants à ce panel qui avait convoqué la réflexion autour du thème, « Les droits humains à l’épreuve de la nouvelle législation Sénégalaise », ont insisté sur l’urgence de convoquer des assises pour mettre à jour les lois qui ne prend pas en compte les nouvelles dérives et qui tend à bafouer la liberté des individus.
Ils proposent également de préparer les enfants à l’usage des réseaux sociaux.