Introduction
Les pays africains sont entrés dans le nouveau millénaire avec un bilan remarquable de croissance économique. Avant la crise financière et économique mondiale, le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 5,7 % par an entre 2001 et 2008. En 2009, la croissance est tombée à 2,5 %, les pays africains ayant été touchés par la baisse de leurs exportations, ainsi que par la réduction des investissements et des aides à destination du continent. Cependant, l’efficacité de la gestion macroéconomique, l’augmentation et la diversification du commerce et des investissements avec des pays émergents, la croissance de la classe moyenne, l’augmentation de la consommation intérieure et l’intensification de l’intégration régionale ont permis aux pays africains de résister aux effets de la crise mondiale et de retrouver un taux de croissance de 3,3 % par an entre 2010 et 2015.
La croissance moyenne en Afrique est restée modérée en 2016 (3,7 %), et devrait atteindre 4,5 % en 2017. Selon les Perspectives économiques en Afrique, cette croissance durable s’explique par l’amélioration de la gouvernance macroéconomique, le renforcement de la demande intérieure et un environnement économique plus favorable. En effet, 37 pays africains ont connu une amélioration de leur note de gouvernance globale (l’ensemble du continent a gagné un point, de 49 à 50, entre 2006 et 2015), et environ 70 % de la population africaine a bénéficié de l’amélioration de la gouvernance2. Cependant, la majorité des pays africains a obtenu des résultats moyens dans la catégorie Sûreté et État de droit (sécurité personnelle, sécurité nationale, responsabilité, corruption et bureaucratie).
Malgré le niveau soutenu de la croissance économique, près de la moitié de la population africaine vit encore sous le seuil de pauvreté. En d’autres termes, les taux de croissance élevés ne se sont pas traduits par un recul de la pauvreté et des inégalités ou une augmentation des possibilités d’emploi, en particulier pour les jeunes. En outre, les efforts des pays africains visant à réformer leurs économies n’ont pas toujours abouti à la transition souhaitée vers une diversification des secteurs industriels à forte productivité.
De nombreuses économies africaines reposent encore sur un petit nombre de secteurs liés à la production et à l’exportation de produits agricoles non transformés et de ressources naturelles (minerais et pétrole brut). Seuls quelques pays africains ont réussi à transformer structurellement leur économie : l’Afrique du Sud, l’Égypte, Maurice et la Tunisie. Ces pays ont affiché une croissance soutenue supérieure à 2 % entre 1960 et 2007 et ont été en mesure de remplir l’ensemble ou certaines des conditions requises pour une transformation structurelle classique (par exemple, augmentation des parts des secteurs agricole, industriel et tertiaire, et manufacturier dans le PIB réel par habitant).
À titre d’exemple, la Tunisie a enregistré une augmentation moyenne de son PIB réel par habitant de 3,4 % par an entre 1970 et 2007, et la part de ses trois secteurs économiques dans le PIB a augmenté sur la même période3. La diversification de l’économie, la productivité élevée des secteurs industriel et tertiaire, la solidité des institutions, l’environnement favorable aux investissements et à la compétitivité et la stabilité caractérisent la transformation structurelle de Maurice, souvent citée en exemple de réussite. Le succès de la transformation structurelle de l’Afrique du Sud est grandement attribuable à la solidité de son économie mixte (exploitation minière, industrie manufacturière, industrie agroalimentaire, industrie de la confection et télécommunications), à l’augmentation des investissements publics dans les secteurs agroalimentaire, automobile, sidérurgique et du génie civil, et à la mise en avant de son expertise technologique locale.
La transformation structurelle, qui s’entend de la redistribution de l’activité économique entre les grands secteurs agricole, manufacturier et tertiaire, est indispensable pour que les pays africains réduisent significativement la pauvreté et réalisent les objectifs de développement durable en garantissant que les sources de croissance sont diversifiées grâce à l’industrialisation, à la création de la valeur et à la transformation structurelle. Il s’avère que l’une des conditions préalables à la réussite de la transformation des économies africaines est la bonne gouvernance politique, économique et environnementale. En d’autres termes, la transformation structurelle nécessite une bonne gouvernance sous-tendue par des systèmes de gouvernance démocratiques, réactifs, transparents et responsables; des politiques macroéconomiques saines ; des capacités institutionnelles et humaines adéquates pour concevoir et mettre en œuvre des programmes de développement ; un « contrat social » entre les gouvernements et les citoyens sur leurs rôles et responsabilités respectifs ; des investissements suffisants dans les infrastructures économiques et sociales ; et un environnement favorable aux secteurs compétitifs manufacturier, agroalimentaire et tertiaire.
De manière générale, de nombreux pays africains ont fait des progrès dans l’amélioration de la gouvernance au cours des dix dernières années. Les avancées en matière de bonne gouvernance sont néanmoins attribuables au développement humain, à la participation politique et aux droits de la personne, davantage qu’à la sécurité, à l’État de droit et aux perspectives économiques durables, qui se sont détériorés. Il convient de noter que dans leurs efforts pour réussir leur transformation économique, de nombreux pays africains n’ont pas donné la priorité à l’application des principes de bonne gouvernance, qui englobent la représentativité politique, l’efficacité institutionnelle et la solidité de la gestion économique.
Ces principes permettent à un pays de concevoir et de mettre en œuvre des programmes de transformation structurelle solides. En Afrique, les faits montrent que les pays ayant des gouvernements et des institutions peu transparents, peu responsables et qui ne sont pas tenus de rendre des comptes, ou ayant des systèmes socioéconomiques faibles, ont connu un progrès lent dans la diversification de l’économie, l’augmentation significative de la productivité de la main-d’œuvre, l’amélioration de l’environnement des affaires et des investissements, la création de possibilités durables d’emplois et l’amélioration du bien-être.
L’objectif de la Conférence économique africaine 2017 sera de déterminer des politiques et des stratégies de gouvernance plus propres à assurer la réussite de la transformation structurelle, sur la base de pratiques optimales existantes et de nouvelles perspectives africaines y menant. La Conférence rassemblera des décideurs, des chercheurs et des spécialistes du développement d’Afrique et du monde entier et leur permettra d’apporter des contributions stratégiques à la réalisation de la transformation structurelle en Afrique, en mettant l’accent sur la gouvernance du développement.
La Conférence sera également l’occasion pour les participants d’évaluer les effets des stratégies de gouvernance économique et politique actuelles sur la transformation économique, la pauvreté, les inégalités et le développement humain en Afrique. En outre, les participants pourront aborder les réussites et les enseignements tirés et situer les lacunes, les défis et les problèmes émergents rencontrés dans ce domaine. Des présentations détaillées de travaux de recherche sur les politiques seront faites à la Conférence par des universitaires expérimentés et de nouveaux chercheurs africains, qui discuteront et feront des recommandations sur la manière de renforcer la gouvernance au service de la transformation structurelle des économies et des sociétés africaines.