Genève — Dans le cadre de leurs consultations de deux jours concernant la contribution du Panel de haut niveau sur les migrations (HLPM) au débat face à la migration en Afrique, les membres du Panel ont partagé leurs points de vue sur les mesures à entreprendre pour faire avancer le dialogue politique sur la migration africaine.
La Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l'Afrique (CEA), Vera Songwe, souligne qu'il faut reconnaître que la libre circulation des Africains dans la région peut exacerber les tensions existantes dans les pays et sous-régions d'accueil. Elle note que cela exige une bonne gestion de la politique migratoire et souligne en outre que la migration concerne autant la gouvernance que les droits économiques et humains.
Laura Thompson, Directrice générale adjointe, OIM, met en exergue que la migration est une question complexe qui est encore compliquée de par la diversité de ses discussions bilatérales, régionales et internationales en cours. Elle invite le Panel à se concentrer sur des « résultats réalisables » et suggère que le HLPM peut envisager de « peser politiquement » pour obtenir les instruments de ratification requis en faveur de l'entrée en vigueur du Protocole de l'Union africaine sur la libre circulation des personnes.
Mme Almaz Negash, Fondatrice et Directrice exécutive du Réseau de la diaspora africaine, déclare qu'il faut « non seulement des données mais aussi du marketing ». Elle note, par exemple, que la diaspora africaine contribue pour 55 milliards de dollars à la seule économie américaine.
Mme Negash met en relief que la crise des réfugiés « peut être une force pour le bien » si les migrants sont soutenus afin de contribuer à la vitalité économique de leurs pays d'accueil et en Afrique. Elle souligne un certain nombre d'initiatives dans le secteur de l'enseignement supérieur, y compris un modèle d'éducation mixte élaboré par le MIT qui aide les réfugiés à résoudre les problèmes « quelque soit l'endroit où ils se manifestent » ; et un projet initié par un réfugié syrien qui vise à exploiter l'expertise de l'Université de Stanford et à la déployer dans les zones où cela est nécessaire.
Michael Farrugia, Ministre de l'intérieur et de la sécurité nationale de Malte, observe que la hausse de la migration irrégulière a créé un « choc social et culturel » qui entraîne des changements dans la structure politique de l'Europe. Faisant allusion au « degré élevé d'interdépendance » entre l'Afrique et l'Europe, il déclare que le Sommet de La Valette sur la migration en 2015 est un exemple du dialogue constructif nécessaire pour aller de l'avant.
L'Ambassadeur Morten Aasland, Ministre norvégien des affaires étrangères, dit que « ces discussions confirment que le Panel trouve sa voie ». Il fait référence à la pertinence des travaux du Panel dans les négociations en cours sur le Pacte mondial pour la migration, ainsi que la dynamique grandissante envers l'intégration dans la région africaine.
Dania Baloyi, Présidente du Black Industrialists 'Council, en Afrique du Sud, affirme que les populations bougent depuis des siècles « et continueront de le faire ». Discutant de l'expérience de l'Afrique du Sud, elle déplore que malgré qu'elle ait une bonne base de données, les statistiques de la migration « ne reflètent pas l'impact de la participation des migrants dans les différents secteurs de l'économie, de telle sorte à changer le récit ». Elle met au défi les dirigeants africains de « mettre de l'ordre sur notre continent », notant qu'avec des investissements suffisants, les gouvernements peuvent s'assurer que leurs citoyens n'aient pas à risquer pour s'enfuir.
Samir Abi, Président de l'Observatoire sur les migrations pour l'Afrique de l'Ouest, compare l'accueil des pays africains aux populations de toutes les régions du monde, avec la propre expérience africaine de la mondialisation. Déplorant que « les hommes ne sont pas égaux selon les passeports qu'ils possèdent », il énumère les difficultés rencontrées par les jeunes Africains, « ... même pour un voyage de courte durée pour assister à une conférence, voir leur famille ou assister à un séminaire de formation ».
Pour M. Amir, cela montre que « tout Africain qui voyage est un migrant irrégulier potentiel ». Il exhorte le HLPM à accorder une attention particulière à cette inégalité et à cette discrimination, car cela écarte les Africains des avantages de la mondialisation.
Donald Cochrane, Ministre conseiller à la Mission permanente du Canada auprès des Nations Unies, à Genève, s'exprimant au nom de l'Hon. Ahmed Hussen, Ministre de l'immigration, des réfugiés et de la citoyenneté, Canada, note qu'avec l'attention mondiale concentrée sur l'augmentation alarmante dans les régimes dangereux de migration irrégulière, la contrebande, et le trafic humain, « il est important de garder à l'esprit que la plupart des migrations internationales d'Afrique sont conduites par des voies légales ».
Il déclare également que l'Afrique est reconnue comme l'une des régions où la négociation d'accords continentaux et régionaux visant à réduire les obstacles se poursuit, « face à la montée du protectionnisme ailleurs ».
Serigne Ndiaye, représentant l'ancienne Première ministre sénégalaise, Aminata Touré, souligne l'importance de « relater le véritable récit des chiffres pour combattre les stéréotypes persistants sur l'invasion de l'Europe par l'Afrique ». Il décrit les médias comme un « mythe politiquement alimenté » qui doit être combattu « parce qu'ils déclenchent la discrimination et le racisme contre les migrants africains subsahariens ».
Sur 235 millions de migrants internationaux en 2013, ajoute M. Ndiaye, « environ 21 millions proviennent d'Afrique subsaharienne, ce qui signifie que sur 10 migrants un seul est subsaharien ». Il met au défi les gouvernements africains de « mieux communiquer leur propre succès », d'encourager l'afro-optimisme et de canaliser les revenus d'une croissance élevée du PIB vers des mécanismes d'appui spécifiques » afin que les jeunes Africains puissent croire aux opportunités nationales ».
Parlant par liaison vidéo, le Président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, informe que les idées fausses sur les vagues de réfugiés africains envahissant l'Europe continuent de dominer l'actualité, malgré le fait que les données disponibles démontrent le contraire. Soulignant quelques « vérités dures » dans le discours sur la migration, il exhorte les participants de reconnaître que les taux de croissance actuels en Afrique « ne sont pas assez élevés » pour décourager la migration.
M. Adesina demande au Panel d'éviter « la paralysie de l'analyse » en identifiant certains points chauds de la migration irrégulière et en proposant quelques actions pratiques. Il propose également que le rapport du HLPM soit axé sur des messages positifs, notamment en faisant valoir que « l'Afrique est ouverte aux migrants » et en soulignant la contribution positive de la diaspora africaine, qui dépasse actuellement l'aide publique au développement.
Le Panel de haut niveau sur les migrations a été créé a la suite d'une résolution de la Conférence africaine des ministres des finances et de la planification économique de 2016, convoquée par la Commission économique pour l'Afrique et la Commission de l'Union africaine.
Le Panel comprend 15 personnes éminentes, y compris des représentants du gouvernement, du secteur privé, du monde universitaire et de la société civile et de tous les continents qui souhaitent promouvoir une migration sûre, ordonnée et régulière en Afrique pour le développement du continent.
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