Afrique de l'Ouest: ITW-Bilan avec Brahim Fassi Fihri, Président de l'Institut Amadeus – « Le forum des MEDays est devenu le Davos de l'Afrique »

12 Novembre 2018

La 11ème édition du Forum des MEDays a vécu. Après quatre jours d'échanges, le président de l'Institut Amadeus qui en est  l'initiatrice a tiré un bilan qu'il a jugé satisfaisant. Dans une interview qu'il a accordé AllAfrica.com et Vox Africa, M. Brahim Fassi Fihri estime que ce forum du Sud a maintenant pris une dimension internationale qui lui donne les attributs d'un « Forum du Davos de l'Afrique ». Revenant largement sur la demande d'adhésion du Maroc dans la CEDEAO, M. Fassi Fihri qui juge légitimes les inquiétudes que suscite cette question, insiste sur le fait que le Royaume chérifien est certes demandeur mais pas quémandeur. Il a ainsi loué les potentialités que le secteur de l'art et du design offrent au continent. Interview.

A l'issue de cette 11ème édition des MEDays, quel bilan pouvez-vous tirer de ces quatre jours d'échanges ?

Au terme de cette conférence, tout d'abord permettez-moi de me réjouir du succès de cette 11ème édition qui confirme que le forum MEDays est définitivement installé dans l'agenda international des grandes conférences mais aussi de l'agenda africain. Le Forum des MEDays est pour l'ensemble des participants devenu le Davos de l'Afrique. Nous avons toujours voulu dans notre ADN promouvoir la coopération sud-sud. Aujourd'hui, lorsqu'on voit que près de 40 pays africains sur 70 au total, étaient présents ici à Tanger, c'est une grande satisfaction et je ne peux que m'en réjouir.

Depuis 18 mois l'Institut Amadeus se penche sur la demande d'adhésion du Maroc dans la CEDEAO avec différentes rencontres organisées dans des pays de l'Afrique de l'Ouest. Quelle est la posture que le Maroc adopte par rapport à cette adhésion ?

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Le Maroc a exprimé sa volonté d'adhérer à la CEDEAO en février 2017. Il a reçu un accord de principe du Sommet des Chefs d'Etats et de gouvernements de la CEDEAO en juin 2017. Aujourd'hui, le Maroc est évidement dans l'attente des négociations qui doivent arrêter une décision à la Commission de la CEDEAO, suite au Sommet d'Abuja, afin de définir les paramètres de négociation pour son adhésion. A travers les différentes conférences que nous avons organisées en début d'année dans plusieurs pays membres de la CEDEAO, il était question d'assainir le débat, l'apaiser et comprendre certaines réticences. Il est évident dans pareil cas d'une adhésion d'un pays considéré comme une puissance continentale au sein d'une organisation citée comme une référence en terme d'intégration, il est tout à fait naturel qu'il y'ait des questionnements, des interrogations. Notre objectif à travers les événements organisés en Afrique de l'Ouest était de permettre cette interaction, d'expliquer la démarche marocaine mais aussi le fait que le Maroc n'est pas quémandeur. La démarche adoptée est celle de sa Majesté Le Roi Mohamed VI (Que Dieu l'assiste) en Afrique de l'Ouest à travers la présence marocaine qui s'intensifie depuis une quinzaine d'années et qui fait du pays, le premier investisseur africain en Afrique de l'Ouest ; qui fait du Maroc le premier pays signataire d'accords bilatéraux avec les Etats membres de la CEDEAO. Ce n'est pas rien et l'objectif du Maroc, in fine, c'est d'institutionnaliser cette relation parce qu'il est de facto membre de la communauté ouest-africaine.

Quelle réponse apportez-vous pour rassurer les agriculteurs ouest-africains qui, à travers cette future adhésion, redoutent une inondation de leur marché par les produits marocains?

Il est tout à fait légitime d'avoir des inquiétudes. Quand le Maroc lui-même négociait des accords de libre échange avec les Etats-Unis, il y avait des inquiétudes et des interrogations. Je crois qu'il ne faut pas aussi surestimer la puissance économique du Maroc. Il a certes une puissance continentale mais il n'est pas la Chine, ni la Turquie, pour le moment. J'espère que le Maroc pourra prétendre à ce statut. Je crois qu'il ne faut pas non plus se tromper de débat. Il faut savoir qu'avec ou sans le Maroc dans la CEDEAO, nous avec les pays membres de cette communauté seront liés par l'accord de libre échange continental africain, la ZLECA. Donc, je crois qu'il faut se concentrer sur d'autres sujets afin de faire avancer les négociations d'autant plus qu'aujourd'hui, il y a un consensus sur la légitimité de cette demande. De toute façon, l'objectif c'est de permettre une co-convergence du Maroc vers la CEDEAO mais aussi de cette communauté vers les acquis et des spécificités du Royaume. Je me réjouis du consensus qui s'est dégagé ici à Tanger sur la nécessité, pour le Maroc de contribuer à parfaire cette intégration régionale ouest africaine qui est certes l'une des communautés les plus intégrées du continent mais elle reste à parfaire en termes d'intégration. Dans de nombreux domaines, le Maroc peut apporter son expertise notamment en matière agricole, d'investissement, de sécurité, de la banque…

Est-ce que vous pouvez revenir sur les grandes innovations qui ont rythmé cette édition 2018 des MEDays ?

Les innovations c'était de continuer dans cette spécificité du forum c'est-à-dire permettre cette interaction entre pays africains, pays européens, pays d'Amérique Latine, pays du Nord, d'Asie. Cette interaction entre leaders politiques, société civile, experts, membres de la communauté des affaires. Il y a aussi les étudiants. Nous en avons reçu sur les quatre jours près de 4500 participants dont 2000 étudiants. Les MEDays est le seul forum à ma connaissance en Afrique et dans le monde arabe qui permet cette interaction, qui assume totalement sa vocation pédagogique parce qu'il permet aussi de chalenger les leaders politiques.

Pour la première après 10 ans que l'art et le design africain vecteur de développement, font leur entrée dans le forum des MEDays. Qu'est ce qui explique ce choix ?

Pour une raison évidente, aujourd'hui, la thématique du Forum MEDays était construite autour du mot disruption. Je crois que l'art africain est en train d'émerger d'une forme discruptible. De plus en plus d'artistes du continent sont reconnus pour leur talent et il nous paraissait utile de promouvoir cet art africain très prisée et qui est demandée. A travers une session consacrée à cette question, c'est une nouveauté mais il est aussi intéressant dans un cadre non officiel, certes, mais qui discute de sujets prioritaires de l'agenda international, de promouvoir aussi des thématiques qui nous concernent en tant qu'Africains et qui sont importantes. Ce sont des thématiques que l'Afrique réussit et il est important de mettre en lumière cette Afrique loin des clichés, une Afrique novatrice et positive. C'est aussi la mission du Forum MEDays.

Quel est votre message pour la prochaine édition ?

On vient tout juste de conclure et on se félicite du succès de cette édition. Nous nous félicitons aussi de la contribution des médias comme AllAfrica et Vox Africa qui nous permettent transmettre des messages en faveur du continent.

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