Dakar — Le cours de l'IDEP sur « Politique migratoire » s'est tenu du 12 au 16 novembre 2018. La formation a réuni 25 participants provenant de 21 pays différents, dont 11 pays francophones (Bénin, Burundi, Cote d'Ivoire, Guinée, Guinée-Bissau, Madagascar, Mali, Niger, Sénégal, Togo et Cameroun,) ; 8 pays anglophones (Gambie, Lesotho, Libéria, Namibie, Nigéria, Sierra Leone, Soudan et Zambie) et deux communautés économiques régionales et sous régionales (Union Africaine et COMESA) représentées.
Le taux de participation féminine de 36%. Ce cours est dirigé par Prof. Ndioro Ndiaye, présidente de l'Alliance pour les Migrations, le Leadership et le Développement et son équipe de personnes ressources ; le bureau de l'OIM Sénégal et l'OIM Afrique de l'Ouest et du Centre est également présent avec un groupe 3 experts ayant une connaissance approfondie sur les questions de migration. La cérémonie de clôture du cours a été présidé par le Prof. Ndioro Ndiaye et Mme la Directrice de l'IDEP, Mme Karima Bounemra Ben Soltane.
Selon le Prof. Ndioro Ndiaye, les migrations constituent une des données majeures de notre époque. Elles sont aujourd'hui au centre des relations internationales et des perspectives de construction d'un nouvel ordre migratoire qui tient compte des configurations de notre système international. En effet, on estime que les migrants internationaux représentent pas moins de 258 millions de personnes en 2017, soit 3,4% de la population mondiale.
La complexification du phénomène migratoire, intensifiée par des bouleversements géopolitiques majeurs, s'accompagne de plusieurs faits symptomatiques. D'une part, il y a l'existence de flux mixtes composés de réfugiés, de migrants réguliers et irréguliers, de déplacés internes, apatrides, etc. que les Etats et les parties prenantes à la gouvernance des migrations doivent adresser impérativement. De même, les raisons de migrer se diversifient devenant aussi bien économiques, politiques, climatiques, que familiales, sociales, religieuses, personnelles, etc. D'autre part, outre l'inobjectivité et la non maitrise de la migration irrégulière, en particulier pour ce qui concerne les victimes de la traite, les défis protéiformes et corrosifs viennent s'agréger solidement à l'architecture nationale, régionale, continentale et globale de gouvernance des migrations.
Les pays africains reconnaissent dorénavant qu'il est nécessaire, de formuler des réponses holistiques, et inclusives ( Ex :Le cadre de politique migratoire de l'Union Africaine et la Position africaine commune sur le Pacte Mondial sur les Migrations)qui comprennent les fondamentaux nécessaires à la compréhension de la migration, et qui prennent en compte les tendances lourdes, qui caractérisent le fait migratoire dans notre continent et les germes de changement sur lesquels les autorités politiques des Etats et Gouvernements, les acteurs non étatiques peuvent se baser pour une gestion adéquate des problématiques posées par la migration.Cependant, les africains n'ont pas des positions politiques ; des positions qui leur permette d'être des décideurs dans les organisations internationales. Les plus gradés sont des D1 pour le cas de l'OIM, mais l'Afrique n'a pas d'experts venant des universités, d'experts modernes qui allient théorie et pratique pour prendre des positions de stratégies dans les organisations internationales. Le cours a été utile et nécessaire dans la formation de cadres africains en politique migratoire et j'encourage l'IDEP à le multiplier et l'approfondir et donner un peu plus de temps et de moyens pour avoir un cours beaucoup plus large l'année prochaine. a-t-elle rajouté.
Discours du Représentant des Stagiaires, M. Houssein Guedi ABSIEH, Expert en Immigration, Libre-circulation et droit du travail, COMESA, Lusaka, ZAMBIE : « J'exprime notre gratitude envers le gouvernement du Sénégal et l'IDEP de nous avoir permis de prendre part à cette formation sur « Politique Migratoire ». Les 25 candidats sélectionnés pour ce cours, sur les 96 candidatures reçues sont les meilleurs ; ils ont beaucoup de connaissances et sont très professionnels. Votre présence et notre présence témoignent clairement de l'Afrique que nous voulons tous. Durant ces 5 jours de formation, nous avons appris que l'histoire des migrations date aussi longtemps que l'humanité existe et ça a façonné le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. La migration est multidimensionnelle avec à la fois des avantages et des besoins. D'une part, les trafics d'êtres humains qui causent des pertes de vie de milliers de personnes et des tragédies, le long de la méditerranée par exemple montre que la crise politique, les violations des droits de l'homme et les catastrophes naturelles, le manque d'opportunités politiques et la pauvreté structurelle poussent beaucoup d'africains à migrer, pour rechercher un futur meilleur, au prix de leur vie. D'autre part, on a appris cette semaine les énormes avantages de la migration, tels que les transferts des migrants ; les transferts de compétences qui offrent diverses opportunités économiques tels que le développement, la cohésion sociale, l'enrichissement culturel, le développement de l'agriculture etc. pour les africains et les non-africains. Une politique migratoire bien gérée est une source de prospérité économique, d'innovation et de cohésion sociale. Nous avons aussi appris que beaucoup de pays africains sont signataires d'accords, de libre-circulation, mais des difficultés résident à cause du manque de volonté politique et des capacités des pays africains à implémenter les décisions prises ; le manque de dialogue institutionnel au niveau national, régional et continental. Les pays africains n'ont pas pu développer une politique migratoire croissante au niveau national ; l'absence de données est aussi criante, le manque de fonds a aussi handicapé les efforts des pays en matière de migration. »
Mme Karima Bounemra Ben Soltane a déclaré : Durant la semaine qui vient de s'écouler, nous avons pu ensemble regarder les questions relatives aux politiques de migration aussi bien au niveau des pays, des communautés économiques régionales et du travail remarquable que fait l'Union Africaine pour que ces questions de migration ne restent pas anecdotiques comme nous en avons parlé lors de la cérémonie d'ouverture, qu'elle soit intégralement prise en compte dans les politiques de développement de notre continent. Nous avons parlé en début de semaine de la manière dont ce cours a été conçu et délivré, là vous venez Prof Ndiaye de nous donner des pistes sur la manière dont ce cours va pouvoir s'enrichir des activités futures de chacune et chacun de nos participants pour que ce qui a été discuté au cours de la semaine puisse s'intégrer dans leur travail au quotidien, mais aussi qu'ils puissent faire bénéficier des nouveaux concepts, des nouvelles idées qui ont été partagés cette semaine avec leurs collègues dans d'autres départements. Nous avons ici des représentants des ministères des finances, du plan, et beaucoup de statisticiens avec nous ; donc tous ces éléments sont imbriqués et interconnectés et on ne peut pas isoler les questions de migration dans un seul département. Il est important qu'on puisse regarder les questions de migration du point de vue du développement des ressources, de l'intégration dans les plans de développement, des changements climatiques, au développement de l'agriculture, aux relations entre les pays, à la circulation des personnes etc..
Nous avons eu dans cette même salle, il y a deux heures de temps la clôture du cours sur « Mobilisation des Ressources Domestiques et Investissements en Afrique ». Dans le cadre de ce cours, nous parlons beaucoup des transferts des migrants. Il faut aller au-delà de deux clichés, le premier est que la migration est un problème pour le continent ; il faut dépasser ce premier cliché pour voir que le verre n'est même pas à moitié plein, il est complétement plein d'opportunités, d'idées et c'est à nous de définir ces opportunités et de mettre ces idées en pratiques. L'autre cliché, c'est quand on parle des migrants qui viennent de la diaspora, on ne parle que des transferts ; on regarde les conditions dans lesquelles les pays peuvent communiquer avec ces migrants pour qu'ils deviennent de vraies forces qui impactent le développement qui apportent de la valeur ajoutée et des idées au niveau du pays. Comment faire pour que nos compatriotes qui vivent en dehors de nos pays puissent avoir une parole. Si je ne me trompe pas l'Union Africaine parle des migrants et de la diaspora comme de la sixième région de l'Afrique. Comment cette sixième région peut être mis à profit ?
Nous avons discuté de beaucoup d'idées en début de cours, que vous soyez d'un pays enclavé, d'un pays avec un littoral ou une île ; en fonction de vos priorités de développement, la question de la migration peut être développée et utilisée de mille manières. Le principal c'est que ce soit approché et abordé de manière constructive réellement comme une opportunité. Le compact mondial va se réunir dans quelques semaines, il y'a les travaux du haut panel sur la migration et beaucoup sont discutés au niveau régional, avec la CEA, la commission de l'UA, mais aussi au niveau international. Les idées ne convergent pas toutes, c'est donc à nous ; à vous les stagiaires, à partir d'aujourd'hui de vous faire ambassadeur de cette nouvelle approche de la migration et des politiques migratoires.