AEC 2018 - Préconise un Accord de libre-échange continental africain inclusif

6 Décembre 2018

Kigali — Une mise en œuvre vraiment réussie de l'accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine ne peut être réalisée sans la « dimension humaine », une garantie que le processus d'intégration ne conduit pas à un creusement des inégalités ou à l'exclusion.

Lors d'une séance plénière tenue le dernier jour de la Conférence économique africaine, les délégués ont participé à une séance interactive avec des experts et des décideurs, qui avait trait aux risques de l'intégration : fragilité, augmentation de la population jeune, chômage et faim, ainsi que des exemples de bonnes pratiques et recommandations pour éviter ou atténuer les risques.

Au total, 44 pays africains ont signé l'accord historique de libre-échange continentale-africaine (ZLECA) plus tôt cette année, qui vise à créer un marché continental unique pour les biens et les services, avec la libre circulation des hommes et femmes d'affaires et des investissements, ouvrant ainsi la voie à une accélération de la création de l'Union douanière continentale et de l'Union douanière africaine.

Mais l'accord n'est pas sans inconvénients et les possibilités d'exclusion et l'inégalité potentielle ont été au centre de la séance plénière intitulée : « Équité, inclusion et innovation, principes fondamentaux pour la transformation de l'Afrique grâce à l'intégration régionale ».

La faim, les déséquilibres entre les sexes et une population croissante, des jeunes s'écartant de l'agriculture et de la production primaire sont les sujets prioritaires de Monique Nsanzabaganwa, Vice-Gouverneure rwandaise à la Banque nationale du Rwanda.

« Un tiers de la région de l'Afrique de l'Est est touché par la faim, déclare-t-elle, tandis que l'écart de rémunération entre hommes et femmes implique que 75% des femmes travaillent sans salaire.

« Les femmes peuvent être laissées pour compte », dit la Vice-Gouverneure de la banque.

D'autres panélistes soulignent la fragilité, l'importance d'une gouvernance et des institutions fortes et s'assurer que les décideurs n'excluent pas les femmes et les citoyens ordinaires impliqués dans l'agriculture, ce qui jouerait un rôle unique dans le processus d'intégration.

Ngone Diop, de la Commission économique pour l'Afrique, met en garde que plus de la moitié de la population est laissée pour compte et fait savoir qu'il faut veiller à assurer la sécurité alimentaire et à protéger les femmes « au cœur du processus ».

La discussion a été ponctuée de contributions émanant des participants.

Isaac Shinyekwa, Chef du département du commerce et de l'intégration régionale du Centre de recherche sur les politiques économiques en Ouganda, souligne le besoin de formation et d'industrialisation.

Yague Samb, Expert en résolution de conflits, indique que les conditions socio-économiques sont les principaux facteurs de l'extrémisme et de la radicalisation, qui constituent également une menace sérieuse pour un continent intégré réussi.

Selon elle, des études montrent que la radicalisation au Niger, au Mali et au Nigéria est directement liée à la frustration liée aux conditions socio-économiques.

Migration, fragilité, problèmes de bien public régional

Un autre aspect clé de la réussite de la ZLECA concerne une bonne gouvernance, associée à une perspective d'intégration régionale et à une prise en compte de zones potentielles, font savoir les panelistes. La fragilité, qui a provoqué la migration des jeunes et qui touche surtout les enfants et les femmes, doit être abordée et minimisée, tout comme la question des conflits fonciers, qui a un impact considérable sur la production agricole d'une région.

Temitope Oshikoya, Stratège économique, dit que la migration des éleveurs de bovins des pays voisins vers le centre du Nigéria est à l'origine des tensions et de l'insécurité.

« Il faut aborder cela dans une perspective de bien public régional », informe Oshikoya, ajoutant qu'il faudra prévoir des mesures incitatives à l'action collective pour les décideurs.

D'autres facteurs, tels que les faibles niveaux actuels du commerce intra-africain et la forte dépendance des pays africains vis-à-vis des importations, peuvent également avoir un impact négatif sur les efforts d'une intégration réussie, soulignent les participants.

L'éducation et le développement des compétences sont deux autres domaines clés qui nécessitent une intervention prioritaire.

En conclusion de la discussion, le Directeur de pays du PNUD, Stephen Rodrigues, met en exergue qu'une intégration réussie impliquera la détermination des deux régions à faire face aux risques qui entravent la mise en œuvre de la ZLECA.

« Nous savons qu'il existe de multiples failles et risques... de nombreux problèmes sont transfrontaliers. Les questions d'intérêt public régional doivent être traitées comme un bien public. L'éducation et la formation professionnelle doivent être considérées comme un programme continental », dit Rodrigues.

La Conférence économique africaine, qui se tient chaque année, est le principal forum du continent qui encourage le dialogue et l'échange de connaissances en vue de trouver des solutions aux problèmes de développement du continent. Il réunit des universitaires de haut niveau, des représentants gouvernementaux de haut rang et des praticiens du développement du monde entier.

L'AEC 2018 avait pour objectif « des initiatives transformatrices visant à accélérer les progrès en matière d'intégration d'infrastructures tenant compte de l'équité, y compris de la suppression des obstacles à la circulation des personnes, des biens et des services à travers les frontières ».

La prochaine conférence de l'AEC aura lieu en décembre 2019.

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