Greta Thunberg et des centaines de jeunes ont participé samedi au Sommet de la jeunesse pour le climat au siège de l'ONU pour réclamer une action plus ambitieuse de la part des Etats en faveur du climat. Plusieurs jeunes ont prévenu les dirigeants du monde entier qu'ils devront rendre des comptes de leur action ou inaction face au changement climatique.
Dans la salle du Conseil de tutelle de l'ONU, Greta Thunberg a été ovationnée à son arrivée. La militante suédoise a été la première jeune à prendre la parole au Sommet de la jeunesse pour le climat. Celle qui s'exprimera lundi devant les dirigeants du monde entier au Sommet Action Climat, a parlé très brièvement, afin de laisser la parole à ses jeunes pairs.
« Hier, des milliers de personnes ont manifesté partout dans le monde et demandé une vraie action en faveur du climat, en particulier les jeunes », a déclaré Greta Thunberg.
« Nous avons montré que nous, les jeunes, sommes unis et que l'on ne peut pas nous arrêter », a dit la Suédoise de 16 ans qui a lancé une grève de l'école dans son pays pour protester contre le manque d'action pour le climat. Le mouvement qu'elle a lancé, seule, il y a un an, est depuis devenue une mobilisation mondiale de centaines de milliers jeunes à travers le monde.
« La crise politique, économique et culturelle de notre époque »
L'activiste Bruno Rodriguez de l'Argentine, a pour sa part, alerté sur « l'urgence existentielle » que représente la crise climatique et écologique est « la crise politique, économique et culturelle de notre époque », soulignant que les dirigeants du monde « ont l'obligation de faire des changements radicaux ».
« Mais le changement se faire rarement du sommet vers la base. Il se produit quand des millions de personnes demandent le changement », a déclaré le représentant de l'organisation des jeunes Argentins pour le climat.
« Notre mouvement comprend que le pouvoir ne verra rien sans un combat », a déclaré le jeune militant argentin. « C'est pour cela que nous avons décidé de nous battre dans les rues aux côtés de la classe ouvrière de notre pays et les communautés marginalisées en organisant des grèves massives devant notre parlement », a dit le jeune homme de 19 ans « afin de mettre fin au comportement criminel des grandes entreprises contaminées et à l'indifférence des hommes politiques ». Il a demandé aux 100 entreprises responsables de 71% des émissions de transitionner vers une voie durable.
Pour Bruno Rodriguez, la justice climatique et environnementale est une question de droits de l'homme, de justice sociale et de souveraineté nationale en lien avec les ressources naturelles. « Les leaders ne doivent plus écouter ce que dit la science mais agir en tenant compte de cette dernière », a-t-il dit.
« Nos voix et propositions doivent influer sur les décisions »
Wanjuhi Njoroge, du Kenya, s'est exprimée au nom des « millions de jeunes en Afrique dont l'avenir reste incertain à cause de la crise climatique ». La jeune femme a grandi au pied du Mont Kenya. Sa communauté rurale qui vit de l'agriculture grâce aux rivières qui coulent de la montagne n'avait jamais connu de manque de nourriture et d'eau jusqu'en janvier 2018. « Nous nous sommes rendu compte qu'il fallait agir », a-t-elle dit.
Wanjuhi Njoroge a mis à profit la force de frappe des médias sociaux en lancement le hashtagh #SaveOurForestsKE et lancé une pétition pour sauver les forêts de son pays. La jeune femme pense que le mouvement mondial des jeunes en faveur du climat « causera une révolution » et salué le fait que les jeunes soient désormais présents à la table des négociations. « Ce que nous demandons en tant que jeunes, c'est que nos voix et propositions doivent influer sur ces décisions », a-t-elle dit.
Elle a également demandé aux Etats membres de l'ONU d'appuyer la liberté d'expression et plus particulièrement la liberté d'internet pour que les jeunes puissent s'organiser et amplifier leurs voix que les questions qui comptent le plus pour eux et tout particulièrement la crise climatique. La jeune femme a rappelé que l'adaptation et la résilience ont été au cœur de efforts entrepris en Afrique pour contrer le changement climatique, rappelant une triste évidence : le continent africain est celui qui émet le moins de gaz a effet de serre mais celui qui souffre le plus du changement climatique. « Mais l'heure n'est pas de faire porter la faute aux autres, mais de travailler ensemble », a-t-elle dit. L'Afrique compte plus de 625 millions de jeunes qui demandent « un appui technique, financier et en termes de transfert compétences afin que les jeunes puissent agir et innover pour atténuer le changement climatique ».
« Nos maisons s'enfoncent et nos communautés disparaissent »
« Les jeunes de différents coins du monde vivent dans une peur constante et dans une anxiété climatique », a, pour sa part, déclaré Komal Karishma Kumar, des Fidji. Celle qui représente YOUNGO - le groupe de la jeunesse de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC) - a indiqué que les jeunes « ont peur pour leur avenir, de l'incertitude pour une vie saine ».
Les négociations sur le climat ont commencé en 1992, « avant même que ma génération ne soit née (... ) et depuis 25 ans, les émissions n'ont fait qu'augmenter », a-t-elle dit.
« Nos maisons s'enfoncent et nos communautés disparaissent », a alerté la jeune femme originaire Etat insulaire du Pacifique directement menacé par le réchauffement climatique qui représente un « menace pour notre mode de vie ».
Komal Karishma Kumar a demandé aux gouvernements de soutenir le Fonds vert pour le climat et aux dirigeants de soutenir l'Accord de Paris sur le climat « pour respecter les droits des générations futures ».
« Nous vous tiendrons responsables », leur a-t-elle lancée, prévenant qu'a défaut, la jeunesse se mobilisera de nouveau et leur montreront la sortie.
La jeune femme a dénoncé les attaques contre le multilatéralisme, la prévalence du déni du changement climatique et la criminalisation des jeunes activistes pour le climat. Nous faisons face à des arrestations, nous défilons dans nos pays », a-t-elle dit.
« Beaucoup de pays et pollueurs ne se soucient que de leurs croissances économiques a court-terme. Nous ne sommes pas des polices d'assurance, nous sommes des êtres humains, nous sommes des communautés. Est-ce trop vous demander de ne plus perdre de temps et de passer des paroles aux actes ? », a-t-elle demandé aux Etats membres.
« Le problème des dirigeants du monde, c'est qu'ils parlent beaucoup et qu'ils n'écoutent pas assez »
Participant au Sommet comme « auditeur de marque », le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a attentivement écouté les quatre jeunes orateurs. « Le problème des dirigeants du monde, c'est qu'ils parlent beaucoup et qu'ils n'écoutent pas assez », a dit Le Secrétaire général.
António Guterres a confié qu'il était plutôt pessimiste au début de son mandat il y a plus de deux ans concernant la mobilisation en faveur du changement climatique. Mais les jeunes ont depuis redonné de l'élan à cette action pour le climat, a-t-il dit, rappelant que leur mouvement mondial a simplement commencé par la mobilisation d'une jeune Suédoise manifestant seule devant le parlement de son pays.