Addis-Abeba — Un forum de quatre jours réunissant les dirigeants et organisé par le Conseil des entreprises privées sur l'Afrique (Corporate Council on Africa - CCA) a débuté ce mardi, avec le Président rwandais Paul Kagame, déclarant que l'Afrique et les États-Unis resteront des partenaires commerciaux et d'investissement clés, après la pandémie de coronavirus paralysante.
M. Kagame, dans ses remarques liminaires au cours du forum qui a pour thème, « Un engagement commercial résilient entre les États-Unis et l'Afrique pour stimuler la relance post-COVID-19 », dit : « Le monde est plein d'incertitudes en ce moment, mais il ne fait aucun doute que l'Afrique et les États-Unis continueront d'être d'importants partenaires commerciaux et d'investissement l'un pour l'autre ».
Les États-Unis, indique le Président, sont un fervent partisan du développement en Afrique par le biais du commerce, en particulier la Loi sur la croissance et les perspectives économiques en Afrique (AGOA).
M. Kagame souligne ce qu'il dit être les trois domaines d'intérêt commun entre les États-Unis et l'Afrique. Ceux-ci concernent la lutter contre la pandémie ; la nécessité urgente d'une action coordonnée pour garantir un espace budgétaire adéquat à l'Afrique ; et le commerce.
« Hier marquait le 100ème jour depuis l'apparition du premier cas de coronavirus au Rwanda. Nous avons heureusement réussi à maîtriser la pandémie jusqu'à présent grâce à une combinaison de politiques de confinement et de tests et de recherches rigoureuses », dit-il.
« Cependant, l'approvisionnement en fournitures adéquates de matériel pour effectuer des tests et d'équipements de protection a été un véritable défi pour chaque pays africain. La semaine dernière, l'Union africaine a lancé une plate-forme africaine de fournitures médicales pour récupérer les achats d'articles de santé essentiels. Il s'agit d'un partenariat avec le secteur privé africain dirigé par Strive Masiiwa à l'invitation de l'UA. Nous saluons la participation du secteur privé américain à cet effort ».
M. Kagame déclare également qu'il est urgent de coordonner les efforts visant à lutter contre la pandémie sans précédent afin de garantir un espace budgétaire adéquat à l'Afrique.
« Ceci est essentiel à la fois pour la riposte sanitaire et pour préserver les emplois et les moyens de subsistance. Les États-Unis soutiennent l'initiative du G20 de suspendre le service de la dette sur la dette publique. Il s'agit d'une première étape importante, mais à mesure que la crise se prolongera, il faudra faire davantage. L'Union africaine a nommé six envoyés spéciaux pour représenter notre continent dans ces négociations. Une fois de plus, le soutien des États-Unis à des mesures opportunes et innovantes sera vital », affirme-t-il.
M. Kagame précise que le lancement de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) est également essentiel, ajoutant que l'Afrique se concentre sur la lutte contre la pandémie en tant qu'entité unie pour éviter des efforts dispersés.
« Alors que ces obstacles au commerce intérieur en Afrique continuent de tomber, nous comptons sur l'engagement ferme des entreprises et des investisseurs américains travaillant en collaboration avec les entreprises africaines », déclare-t-il.
Mme Vera Songwe, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l'Afrique, salue pour sa part les efforts collectifs de l'Afrique dans la lutte contre la crise sanitaire.
Elle dit qu'il n'y a rien de mal à ce que les nations africaines demandent un moratoire de la dette pour donner un élan immédiat et sauvegarder les emplois et les moyens de subsistance alors que le continent se prépare à rebâtir plus solide.
« Le besoin de liquidités immédiates n'est pas un problème spécifique à l'Afrique. C'est un problème mondial », révèle Mme Songwe, ajoutant que la CEA continuera à travailler dur pour garantir que les pays africains disposent de plus de ressources immédiatement disponibles pour aider à combattre la pandémie de COVID-19.
Elle dit qu'il est crucial pour l'Afrique de sauver les petites et moyennes entreprises qui constituent 70% de son économie.
« Si les banques ne disposent pas des liquidités dont elles ont besoin, les PME fermeront. Nous devons nous assurer que ces 70% de nos PME qui sont aujourd'hui opérationnelles le restent », déclare Mme Songwe, ajoutant que 20 millions d'emplois en Afrique sont actuellement en jeu en raison de la pandémie.
Elle dit que l'Afrique doit mettre en place des institutions solides qui arrêteront les Flux financiers illicites (FFI) alors que les nations s'efforcent de mieux mobiliser les ressources nationales.
« Tant que nous continuerons à avoir des fuites dans nos systèmes, nous continuerons à en pâtir », affirme la Secrétaire exécutive de la CEA, ajoutant que c'est une excellente chose que les dirigeants africains se soient clairement prononcés pour dire qu'ils utiliseront de manière transparente les ressources allouées au COVID-19 qui leur parviendront.
Mme Songwe déclare qu'en plus de la dette extérieure, les gouvernements africains doivent également payer le secteur privé du continent, qui est largement non rémunéré pour le travail effectué pour les entités étatiques.
Elle fait également allusion à l'Initiative de suspension du service de la dette (DSSI) du G20 et à la création d'un Véhicule à usage spécial pour financer la dette de l'Afrique envers les créanciers commerciaux, qui, selon elle, seront essentielles pour financer la dette du secteur privé et, par conséquent, élargir l'espace budgétaire des pays africains.
L'Afrique, dit Mme Songwe, peut tirer parti de la ZLECA qui est conçue pour stimuler le commerce intra-africain, les emplois, les investissements dans les infrastructures et le financement du développement de l'Afrique dont l'objectif est de rebâtir plus solide après la crise sanitaire.
Les autres panélistes hormis Mme Songwe étaient M. Akin Dawodu, Directeur général, Chef de l'Afrique subsaharienne, Citi ; l'ancien Président de la Banque africaine de développement et Envoyé spécial de l'Union africaine sur le financement du Fonds pour la paix et la réponse au COVID19, M. Donald Kaberuka ; le Président du Conseil américain des entreprises privées sur l'Afrique et PDG chez Rabin Martin, Jeffrey L. Sturchio ; et M. Albert G. Zeufack, Économiste en chef de la Banque mondiale pour l'Afrique.