Addis-Abeba — L'Afrique aura besoin de beaucoup d'énergie pour rebâtir plus solide à la suite de la pandémie de coronavirus, déclare ce mercredi, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l'Afrique (CEA), Vera Songwe.
S'exprimant lors d'un webinaire Res4Africa consacré à l'intensification des investissements dans les énergies renouvelables en Afrique, Mme Songwe déclare que les actions visant à garantir la suffisance énergétique pour alimenter les efforts de reconstruction de l'Afrique devront se concentrer sur trois aspects clés - les infrastructures, l'approvisionnement et le coût de l'énergie.
Elle indique qu'à la suite de l'éruption de la pandémie de COVID-19, le commerce, l'éducation et la santé sont passés aux plateformes TIC, consommant environ 40% de l'énergie du continent.
« Donc, pour que nous puissions avoir sur le continent un secteur des TIC viable qui permettra à nos économies de rebâtir plus solide, nous allons avoir besoin de beaucoup d'énergie », indique Mme Songwe, ajoutant que les investissements privés joueront un rôle crucial, notamment avec le lancement de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA).
La Secrétaire exécutive de la CEA déclare que la question de l'énergie du continent n'est pas la transition mais la substitution énergétique.
« Nous n'avons pas de problème de transition du même degré que l'Europe. La conversation pour l'Afrique est de remplacer les mauvais combustibles fossiles coûteux par quelque chose de plus propre et certainement moins cher. Nous devons remplacer les énergies à base de carburant par des énergies vertes et durables », indique Mme Songwe.
Elle ajoute que des partenariats et une coopération sont nécessaires pour aider les pays africains à respecter leur programme énergétique et de développement.
« Nous devons commencer à examiner honnêtement et sérieusement les structures de financement des infrastructures africaines. Nous finançons les infrastructures à des délais plus courts qu'il n'en faut pour construire ces infrastructures, ce qui entraîne des problèmes de viabilité de la dette », dit Mme Songwe aux représentants du secteur privé participant au webinaire.
Elle précise que les services publics d'électricité africains doivent passer à la vitesse supérieure s'ils veulent jouer un rôle crucial en aidant le continent à rebâtir plus solide post-COVID-19.
Seuls deux pays en Afrique, l'Ouganda et les Seychelles, possèdent des secteurs de l'électricité viables, affirme Mme Songwe, une situation qui, selon elle, doit être réglée avec seulement 19 pays fonctionnant en mode dépenses tandis que les autres fonctionnent avec des pertes excessives.
Les tarifs reflétant les coûts font partie du problème affectant le secteur de l'électricité du continent, dit-elle, ajoutant : « Nous devons veiller à ce que les tarifs sur le continent reflètent les coûts ».
Mme Songwe indique que le continent doit travailler ensemble pour garantir la viabilité des bassins énergétiques régionaux.
« Tous les pays africains ne peuvent pas produire d'énergie », dit-elle, ajoutant qu'avec la ZLECA révolutionnaire, le secteur privé peut investir dans les bassins énergétiques régionaux au profit du continent. Mme Songwe déclare que les investissements énergétiques en monnaie locale contribueront grandement à améliorer l'accès à une énergie abordable sur le continent.
Pour sa part, Francesco La Camera, Directeur général de l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), dit que les décisions énergétiques de l'Afrique sont essentielles à l'atténuation du changement climatique et au développement socio-économique. Il souligne la centralité de la transition énergétique pour la relance post-COVID-19, du Programme de développement durable à l'horizon 2030 et de la prospérité à long terme de l'Afrique.
« La nécessité d'électrifier les villes de manière durable doit être au cœur des stratégies gouvernementales », précise-t-il, ajoutant qu'il est urgent de s'assurer que « la classe dirigeante aborde la perception des risques que les investisseurs ont encore dans certaines parties de l'Afrique ».
Stefano Signore, Chef d'unité pour l'énergie durable et le changement climatique, Direction générale de la coopération internationale et du développement à la Commission européenne, déclare : « Il y a une vocation et un besoin de travailler avec l'Afrique et pour l'Afrique. Nous sommes convaincus que l'Europe et l'Afrique peuvent travailler ensemble pour respecter l'agenda climatique, entreprendre une transition énergétique propre et faire progresser le développement des énergies renouvelables en Afrique ».
Pour sa part, Amith Singh, Chef du financement de l'énergie à Nedbank en Afrique du Sud, déclare : « Si nous voulons vraiment voir l'électricité renouvelable de l'Afrique se développer, nous avons besoin d'initiatives mondiales pouvant tirer parti de la coopération et des investissements ».
Il dit que l'Europe peut atténuer les risques dans les pays africains avec des programmes durables favorables à l'élaboration de nouvelles politiques, au renforcement des capacités, à la fabrication locale et pouvant fournir une assistance financière.
Roberto Vigotti, Secrétaire général de la Fondation Res4Africa, indique que placer les énergies renouvelables au cœur de la relance post-COVID-19 en Afrique est crucial pour combler le fossé d'accès à l'énergie sur le continent.
La troisième publication phare conjointe de la Fondation RES4Africa et de la Fondation Enel, « Intensifier les énergies renouvelables de l'Afrique », dédiée à la réduction des risques d'investissement dans les énergies renouvelables en Afrique, a été dévoilée lors du webinaire.
M. Vigotti indique que la publication mettra en lumière l'importance d'initiatives de réduction des risques efficaces pour libérer le potentiel des énergies renouvelables en Afrique et appelle à un nouvel élan sur les solutions possibles pour attirer à grande échelle les investissements dans les énergies renouvelables.