On l’attendait au niveau de l’opinion publique malienne mais aussi sous régionale. C’est maintenant chose faite. La charte de la transition vient d’être publiée dans le journal officiel de la République du Mali a travers le décret N°2020-0072/PT-RM du 1er Octobre 2020 portant promulgation de la Charte de la Transition.
A vrai dire, beaucoup d’observateurs de la scène politique malienne se demandaient, vers quoi allait aboutir les tractations entre le Conseil National de Salut Public (CNSP) et le médiateur de la CEDEAO sur la désignation de l’équipe de la transition.
Entre les prétentions de la Junte pour diriger la transition et l’intransigeance de la CEDEAO qui avait déjà fixé un embargo financier et sur certaines marchandises en provenance et à destination du Mali, les difficultés économiques fortement perceptibles ont arbitré.
Il est vrai qu’entre temps des signes de dégel sont apparus avec la nomination du diplomate Moctar Ouane comme premier Ministre de la Transition, chargé de former un gouvernement pour une durée fixée à 18 mois par la charte de la transition.
Celle -ci a été jusque-là tenue au secret, notamment à cause de la disposition sur la vice-présidence. En effet, selon des sources proches de la CEDEAO, dans la mouture initiale le vice-président, notamment le Colonel Assimi Goita, pouvait remplacer le Président civil choisi en cas de vacance ou d’incapacité.
Le veto de la CEDEAO sur ce point a sans doute retardé l’issue des négociations, car pour la CEDEAO il n’était pas question de lever le verrou pour un éventuel retour provoqué des militaires au pouvoir.
Tout compte fait, le Colonel Major à la retraite Bah Ndaw fut un bon compromis à la Présidence de la Transition, de même que le 1er Ministre Moctar Ouane qui semble faire l’unanimité. Il reste le savant dosage à opérer pour la composition du gouvernement de transition qui, on peut le présager déjà fera certainement des frustrés dans les rangs du M5- RFP, aujourd’hui divisé et qui a porté la contestation ayant abouti à la chute du pouvoir du Président Ibrahim Boubacar Keita.
La publication de la Charte de la Transition est à coup sûr le premier acte de clarification des intentions de la junte militaire en tout cas si l’on en juge par les dispositions de l’art 2 qui consacre de façon limitative les 8 missions de la transition à savoir :
- Le rétablissement et le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national ;
- Le redressement de l’Etat et la création des conditions de base pour sa refondation ;
- La promotion de la bonne gouvernance ;
- La refonte du système éducatif ;
- L’adoption d’un pacte de stabilité sociale ;
- Le lancement du chantier des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives ;
- L’organisation des élections générales ;
- La mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.
C’est une tâche herculéenne qui attend ce nouveau gouvernement de transition avec autant d’urgences, y compris la mise en œuvre des accords d’ALGER, en 18 mois seulement. Le challenge est quasi hors de portée sans le soutien de la CEDEAO et de la communauté internationale.
Espérons que ce soutien sera à la hauteur des attentes du peuple malien, mais aussi des pays de la sous- région qui traversent une crise économique et sécuritaire aigue, aggravée par la COVID19. Faute de quoi on pourrait craindre un nouveau basculement.
D’ores et déjà la charte de la transition a fixé le cap en ce qui concerne la gouvernance avec un article 10 qui indique de manière claire tous ceux qui sont assujettis à une déclaration de patrimoine.
Un pas de plus vers la bonne gouvernance, la transparence et la lutte contre la corruption qui ont été les leitmotivs des contestations contre le régime de IBK.
On peut espérer avec ce nouveau gouvernement qui fera moins de politique politicienne, parce qu’exclu du champ des prochaines compétitions électorales, ses membres n’étant pas éligibles, le jeu politique normal sera de retour au Mali, avec espérons le retour de Soumaila Cissé