Yaoundé — La Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA) a prévu la 36ième session du Comité Intergouvernemental des Hauts Fonctionnaires et d'Experts (CIE) d'Afrique centrale, du 11 au 12 novembre 2020, virtuellement.
Elle cherchera des voies et moyens pratiques à travers lesquels renforcer le développement d'aptitudes et de compétences adéquates nécessaires à la diversification économique de la sous-région.
La session arrive dans un contexte d'exposition pénible et continuelle de la sous-région aux chocs externes causés par la surdépendance vis-à-vis de l'exportation des matières premières. Ceci, a fait valoir la CEA, est un modèle qui doit être changé en faveur de la diversification économique par le biais d'une industrialisation axée sur les ressources et induite par le commerce.
La chute libre des cours du pétrole qui a suivi la baisse de la demande de la part des centres et secteurs productifs du monde, en raison de la nouvelle maladie à virus Corona (COVID-19), a frappé très particulièrement la sous-région, aggravant ainsi son instabilité macroéconomique, puisque les sources de revenus s'y sont amenuisées, indiquant clairement que la diversification économique horizontale et verticale représente la seule option capable de permettre aux Etats membres d'élargir leurs sources de revenus et de renforcer leur résilience économique.
Le thème: « Bâtir les compétences pour la diversification économique en Afrique centrale » fournira la base qui permettra aux responsables gouvernementaux, représentants d'organismes intergouvernementaux clés (la Commission de l'UA, la CEMAC, la CEEAC), secteur privé, agences de développement latérales et multilatérales (la BAD, la Banque mondiale, etc.), entités du système des Nations unies, leaders de la société civile, ainsi qu'aux universitaires et chercheurs, de faire l'inventaire des compétences et autres ensembles de connaissances capables d'appuyer la diversification économique rapide en Afrique centrale.
Ils identifieront les défis et les opportunités y relatifs afin de proposer des recommandations sur les stratégies pouvant permettre de produire les compétences nécessaires à la diversification horizontale et verticale des économies de la sous-région.
Cette 36ième session du CIE se tiendra en deux segments. Le premier sera une session d'ouverture qui comprendra la présentation d'une étude préliminaire sur les aptitudes et compétences requises en vue de la diversification économique en Afrique centrale. Elle sera suivie d'un débat de deux heures sur le thème « une révolution des compétences pour la diversification économique en Afrique centrale dans un contexte de COVID-19 et un appel à une meilleure reconstruction ».
Le deuxième portera sur l'examen des questions statutaires relatives à l'œuvre du Bureau sous régional pour l'Afrique centrale de la CEA. Il s'agit d'un rapport sur le rendement annuel du Bureau, des progrès enregistrés dans les agendas de développement régional, d'un rapport spécial sur la zone roaming gratuite de téléphonie mobile nouvellement crée de l'Afrique centrale (pour laquelle le Bureau a joué un rôle important de plaidoyer) et de l'Outil Intégré de Planification et de Rapportage sur l'agenda 2030 et l'agenda 2063, élaboré par la CEA.
Résoudre la question de la faible implication de l'Afrique centrale dans les chaines de valeur mondiales
Alors que l'Afrique diversifie progressivement ses sources de revenus, la sous-région Afrique centrale continue de dépendre lourdement de la production et de l'exportation des matières premières, particulièrement du pétrole, dont les prix ont subi une chute vertigineuse depuis 2014 et ont récemment plongé à des niveaux les plus bas jamais enregistrés depuis des décennies, en raison de la baisse profonde de la demande des acheteurs classiques, qui se concentrent à lutter contre le COVID-19.
La sous-région contribue peu aux chaines de valeur mondiales (CVM), étant donné la faible intensité de son secteur manufacturier qui est lié soit aux ressources naturelles, soit aux activités à faible technologie, caractérisés par des niveaux limités de productivité.
Cet évènement virtuel offrira alors aux experts l'opportunité de mettre l'emphase sur la nécessité pour les pays d'Afrique centrale de capitaliser sur la Zone de Libre-échange continentale (ZLECAf), de changer immédiatement leur système productif de la collecte de rente, à travers l'exploitation et la vente de matières premières, à la création considérable de la valeur ajoutée, à travers un secteur manufacturier basé sur la technologie et numériquement amélioré, la production du savoir et les services haut de gamme.
Une telle transition produira une vibrante chaine de valeur basée sur l'avantage comparatif de chaque pays en termes de ressources naturelles et humaines. Cela devrait être possible non seulement par l'acquisition et l'usage de technologies innovantes mais par le développement et l'utilisation massif de compétences dans ces domaines.
A cette fin, les participants à la session élaboreront des propositions et des recommandations concrètes pour aider les Etats de la sous-région à renforcer immédiatement leurs mécanismes technologiques, novateurs et professionnels de renforcement de capacités, nécessaires pour les propulser à des niveaux d'industrialisation et de diversification économique qui vont alimenter la croissance inclusive et le développement durable.
Le résultat attendu sera une interruption des cycles d'instabilité dans les modèles de croissance qui sont conditionnés par la demande et les prix fluctuants des matières premières, déterminés par l'extérieur.
La Résoudre l'inadéquation entre formation et besoins industriels
« Nous avons insisté sur la nécessité d'une transformation structurelle et industrielle comme étant la stratégie primaire, si l'Afrique centrale veut se démarquer d'une croissance volatile et non durable, avec un impact minimal sur la création d'emploi et la réduction de la pauvreté », déclare Anthonio Pedro, Directeur du Bureau sous régional pour l'Afrique centrale de la CEA, impatient de voir se tenir la réunion de Yaoundé.
La focalisation pédagogique de la sous-région sur les arts, les sciences humaines et les sciences non appliquées au niveaux secondaire intermédiaire, et tertiaire de l'enseignement doit subir une transition ».
« Les pays d'Afrique centrale doivent rapidement reformer leurs systèmes éducatifs en mettant l'accent sur et en améliorant la formation en Science, Technologie, Ingénierie, Mathématiques et Innovation (STIMi) avec un plus grand investissement dans la Recherche, le Développement et l'Innovation (RDI), afin d'améliorer la qualité de leur main d'œuvre pour être en même de livrer de la matière pour une diversification économique sur le marché, » a-t-il fait valoir.
Les programmes de formations, maintient-t-il, devraient aussi prendre en considération la place de la pensée critique, la créativité, l'intelligence émotionnelle (qui mène au leadership) et de l'alphabétisation numérique, pour une évolution harmonieuse vers la quatrième révolution.
L'axe central de l'innovation
Une façon de gauger le capital humain que possède la sous-région, obligatoire pour tout développement substantiel de la diversification économique, est de regarder son nombre de patentes intellectuelles pour les produits industriels et innovants. Selon le rapport sur les indicateurs de Propriété Intellectuelle Mondiale 2019, par l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), l'Afrique a enregistré le plus faible nombre de patentes d'invention et de découvertes ; à savoir seulement 0,5% sur les 3,3 millions de dossiers enregistrés à travers le monde en 2018.
Bien que des données pays sur le nombre total de dossiers déposés cette année-là étaient largement indisponibles pour les Etats africains, un examen de la classification de OMPI Equivalent Applications by [National] Origin démontre une performance lamentable de l'ensemble du continent en général et de l'Afrique centrale en particulier.
Les ressortissants de 10 des 11 Etats membres de la CEEAC pour lesquels des données de dans cette catégorie étaient disponibles (seuls les données de la Guinée Equatoriale manquaient) ont déposé un total de 998 patentes en 2018. Comparativement, les ressortissants de la Corée seule étaient responsables de 232 020 demandes de patentes, tandis que ceux de la Malaisie ont déposé 2 060 demandes.
« Le fait donc que les ressortissants de la sous-région CEEAC aient enregistré si peu de patentes pour des produits inventés à travers les organisations de la propriété intellectuelle dans le monde en 2O18, est un indicateur de ce que l'innovation, qui est un facteur crucial de diversification économique du monde en développement, est faible dans la sous-région. Nos Etats membres doivent ainsi investir urgemment et promouvoir des compétences en vue de l'innovation. Ceci est crucial pour l'industrialisation et la diversification économique », Conclue Pedro.
Vers une société d'apprentissage
La session 2020 du CIE examinera également les voies et moyens de transformer les pays d'Afrique centrale en des sociétés d'apprentissage, où les institutions de formation sont liées aux industriels dans le but de mettre à niveau les apprenants par rapport aux besoins effectifs de productivité du monde réel, et de recycler continuellement les travailleurs des secteurs productifs. Cela répondra à la demande en perpétuel changement de techniques de production dans un monde tiré par le big data, la connectivité et l'intelligence artificielle.
La 36ième session du Comité Intergouvernemental des hauts fonctionnaires et d'Experts a été conçue pour prendre appui sur la dernière série de réunions du CIE qui visaient à renforcer le processus de transformation structurelle de la région à travers la diversification économique, sous-tendue par une industrialisation axée sur les ressources et induite par le commerce.
Cette série a commencé avec la 33ième session du CIE tenue à Douala, au Cameroun, en septembre 2017. Elle a abouti à l'adoption du Consensus de Douala sur la diversification économique dans la sous-région. La 34ième session, qui a été tenue à N'Djamena, au Tchad, en septembre 2018, a identifié des mécanismes novateurs en vue du financement de l'industrialisation dans la sous-région. Pour finir, la 35ième session, tenue à Malabo, en Guinée Equatoriale, en septembre 2019, a indiqué la voie à suivre pour le développement de l'Economie Numérique en Afrique centrale.
Créer une dynamique pour un évènement politique de haut calibre
En prélude à la session du CIE de cette année, deux webinaires préparatoires ont été tenus en mai et en juillet 2020, dans l'optique de poser les fondements d'une conversation bien éclairée les 3 et 4 novembre, afin d'élaborer des recommandations claires en direction des décideurs politiques et d'autres acteurs responsables de la transmission de compétences dans les mentalités de la main d'œuvre existante et à venir des Etats membres. Lors du premier wébinaire, les participants ont appelé les pays d'Afrique centrale à améliorer leurs bases de compétences, tout en plaçant l'innovation au centre de leurs projets de développement, s'ils veulent rester compétitifs, briser le cercle vicieux de la surdépendance vis-à-vis des matières premières et tirer parti des opportunités qu'offre le COVID-19 aux secteurs pharmaceutiques et alimentaires. (les détails ici: https://www.uneca.org/webinar-1-36-ice).
Au deuxième wébinaire tenu le 30 juillet, les participants ont conclu que, si les Etats d'Afrique centrale s'inspirent des expériences de l'Ethiopie, du Japon et de l'Afrique du Sud entre autres, pour baliser leur voie vers la diversification économique, ils peuvent rééquiper leurs ressources humaines pour devenir plus développés, plus prospères et plus résilients aux chocs externes (les détails ici: https://www.uneca.org/webinar-2-36-ice).
Les recommandations à l'issue desdits webinaires serviront d'ancrage pour l'examen au peigne fin des écarts qui existent dans les compétences disponibles pour la diversification économique en Afrique centrale, afin de proposer des solutions clé en main en faveur de l'adoption de politiques et de leur mise en œuvre dans les plus brefs délais possibles.
Contact Média
Abel Akara Ticha -Responsable de la Communication
Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique
637, rue 3.069, Quartier du Lac, Yaoundé, Cameroun
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