Afrique de l'Ouest: Quand les dépenses de sécurité continuent de grever les budgets nationaux au Sahel

Session spéciale sur la démographie, la paix et la sécurité (Dps) organisée le mercredi 19 mai 2021 à Bamako
19 Mai 2021

Des recherches sur « démographie, paix et sécurité » faites dans les pays de la zone du Liptako-Gourma (Mali, Burkina Faso et Niger) montrent que les dépenses de sécurité ont connu une forte augmentation, au détriment des dépenses de santé. La révélation a été faite par M. Mabingué Ngom, directeur régional de l’UNFPA Afrique de l’Ouest et du Centre. C’était lors de la session spéciale sur la Démographie, la paix et la sécurité au Sahel, organisée ce mercredi 19 mai dans la capitale malienne, en marge de la 21ème Édition du Forum de Bamako.

(Envoyé spécial) – Les pays du Sahel continuent de consacrer plus de places aux dépenses de sécurité alors qu’ils avaient tous pris l’engagement d’allouer 15% de leur budget national respectif à la santé.

Le Directeur régional du bureau Afrique de l’Ouest et du Centre de l’UNFPA qui l’a révélé prend l’exemple du Niger qui est passé de 10,3% des dépenses financées sur ressources intérieures de l’État en 2010 à 15,3% en 2017.

Une situation jugée paradoxale du moment où le chômage des jeunes dans ce pays a connu une hausse significative passant de  13% de la population active en 2011 à 17% en 2014.

Sur cette même lancée, M. Mabingué Ngom brandit une étude monographique récente de l’UNFPA sur le Mali qui rassemble des données renforçant le constat amer fait sur le manque de perspectives d'avenir des jeunes.

Selon lui, « le gouvernement consacre près de 25% de son budget national au secteur de la défense et de la sécurité ».

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Les conséquences, fait-il remarquer, « une demande sociale croissante non satisfaite (en effet, comment construire des salles de classes pour faire face à une augmentation du nombre d’enfants à scolariser, du nombre d’écoles et de salles de classes à construire, et du nombre d’enseignants à former et à prendre en charge si une part aussi importante du budget national est consacré à d’autres postes de dépenses?) ».

Pour la frange des jeunes, qui intéresse les acteurs, plus particulièrement au sein de l'UNFPA, « les données, là aussi, ne mentent pas: plus de 19.6% de ceux entre 20 à 24 ans sont au chômage », se désole-t-il.

Devant cet état de fait, M. Ngom plaide pour une lecture et une compréhension commune des défis à relever, mais surtout la définition d’une réponse collective et solidaire pour la stabilité de la région du Sahel.

Cette rencontre qui est la deuxième que l’UNFPA convoque dans la capitale malienne se tient dans un contexte de la zone du Sahel en général qui est marqué par d’importants défis sécuritaires, socioéconomiques qui interpellent sur la nécessité d’une réflexion profonde sur les liens entre la démographie, la paix et la sécurité.

Ceci, au moment où la communauté internationale est plus tournée vers pandémie à covid 19.

Les attaques terroristes répétées dans le Sahel entrainent de nombreuses pertes en vie humaine, des déplacements massifs de population et des conflits communautaires.

Ce qui oblige les populations à quitter leur milieu de vie vers des horizons incertains, abandonnant leurs maigres ressources, traumatisées par les exactions et freinant ainsi les efforts consentis par les États et gouvernements pour la réalisation de nobles engagements pris en faveur du développement durable.

Gouvernements et partenaires appelés investir massivement dans la jeunesse

Le secrétaire général du ministère de la jeunesse, de la promotion de l’entreprenariat et de l’emploi du Burkina Faso, M. Jean Philippe Dakoure fait état d’analyses qui montrent qu’une des causes possibles de ce contexte difficile est le facteur démographique.

En effet, poursuit-il, la jeunesse de la population du Sahel induit une forte demande sociale à laquelle les ménages et les pouvoirs publics peinent à faire face.

Selon lui, des jeunes, plus ou moins formés doivent faire face à un marché du travail peu dynamique en termes de création d’emplois décents qui, du reste est inaccessible pour beaucoup d’entre eux.

Devant cet état de fait, M. Dakoure pense qu’ils restent donc en proie au chômage et exposés  à une certaine vulnérabilité.

Le ministre de la jeunesse, des sports et de l’entrepreneuriat du Tchad, M. Routouang Mohamed Ndonga Christian pense que pour un pays comme le sien dont la seule population âgée de 15 à 35 ans représente six millions sur 16 millions et un taux de natalité de 6,3 enfants par femme, mérite une attention particulière.

Ceci, du point de vue de la satisfaction des besoins, des attentes et aspirations dans le but de réduire sinon éliminer sa vulnérabilité face aux bandes criminelles, aux marchands d’illusions et autres trafiquants.

Pour lui, les gouvernements des pays du Sahel et les partenaires doivent réfléchir ensemble pour trouver les solutions idoines aux problèmes des jeunes, qu’il s’agit de l’accès à l’éducation, à l’information, à la formation, à l’emploi décent, à l’appui à l’autonomisation et à la prise de décision les concernant.

Dans cette dynamique, M. Ngom pense que le défi majeur est de mettre les jeunes au cœur des décisions publiques.

Pour lui, il s’agit de changer les grandes tendances en faisant des jeunes la priorité pour consacrer des investissements à grande échelle pour changer les vécus des jeunes.

A son avis, les problèmes au Sahel ne peuvent être réglés sans des investissements massifs dans les jeunes pour accélérer la capture du dividende démographique.

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