Nairobi, la capitale du Kénya, a abrité, le 21 avril dernier, un sommet sur le M23. Un sommet qui réunissait, outre le pays hôte, la République démocratique du Congo, l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi, sur la problématique de la paix, la stabilité et la sécurité dans la région.
La présence des cinq pays principalement concernés par la question, dénote de l'importance du sujet à un moment où le péril terroriste est en pleine phase de métastase sur le continent africain. Cela est d'autant vrai que récemment encore, le chef de l'Etat rwandais, Paul Kagame, appelait ses pairs de la région des Grands Lacs, à une synergie d'action en vue de relever le défi sécuritaire dans leur zone.
C'est pourquoi l'on espère que ce sommet de Nairobi ne sera pas un sommet de plus. Mieux, l'on espère qu'il permettra de crever l'abcès du M23 qui reste une problématique majeure pour avoir parfois mis à mal les relations entre pays voisins, en vue d'y trouver une solution. C'est dire si ce sommet de Nairobi est une rencontre porteuse d'espoirs.
Le mouvement constitue aujourd'hui une menace majeure pour la paix et la stabilité dans toute la région
En ce sens, il ne serait pas exagéré de dire que c'est un sommet qui n'a que trop tardé, au regard des nombreuses exactions de ces rebelles armés contre les populations civiles. En rappel, le M23 ou Mouvement du 23 mars, est un groupe rebelle armé connu pour sa violence et qui sévit principalement dans le Nord de la RD Congo. Composé de mutins entrés en rébellion contre le gouvernement congolais en 2012, ce groupe armé dont de nombreuses sources indiquent qu'il bénéficiait de soutiens extérieurs, avait réussi à conquérir une partie du territoire congolais, dont les localités de Goma, Rutshuru, Bunagana, entre autres.
Le tristement célèbre ancien chef de guerre, Bosco Ntaganda, reconnu coupable de crimes de guerre et crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale en 2019, est indexé comme étant l'une des têtes de gondole. Certaines Organisations de défense des droits humains comme Human Rights Watch, accusent les membres du M23 d'être " responsables de crimes de guerre commis à grande échelle, y compris des exécutions sommaires, des viols et des recrutements de force ". En 2013, le mouvement a été contraint à la reddition sous l'action conjuguée des forces armées congolaises avec l'appui de la MONUSCO (Mission des Nations unies en RD Congo).
Donné pour mort après sa défaite, le mouvement a su toutefois renaître de ses cendres et reprendre ses activités militaires au point de constituer aujourd'hui une menace majeure pour la paix et la stabilité dans toute la région. C'est pourquoi ce sommet de Nairobi est d'importance pour faire bouger les lignes. Ce, dans l'optique de " lever les options sur la suite à donner sur la question du M23 ". Le moins que l'on puisse dire, c'est que le moment s'y prête.
Le besoin de réconciliation des Congolais avec eux-mêmes, semble indéniable et se pose même comme une nécessité absolue
D'autant plus que cette rencontre de haut niveau intervient non seulement à un moment où les tensions ne sont plus aussi vives entre certains de ces pays voisins, mais aussi dans un contexte où les visées expansionnistes des terroristes peuvent faire craindre des connexions dangereuses voire des allégeances à des groupes extrémistes. C'est dire si sous un certain angle, Nairobi pourrait constituer une prise de conscience salutaire du péril terroriste qui menace l'ensemble du continent.
D'où l'urgence de trouver des pistes de solutions concertées à la question de ce groupe armé avant que ce dernier ne se transforme en monstre immaîtrisable dans cette région de forêts denses qui ferait le bonheur des fondamentalistes. Mais le tout n'est pas de prendre des résolutions. Encore faut-il œuvrer en aval à leur application qui demeure le talon d'Achille de bien des rencontres de haut niveau sur le continent africain.
Dans un contexte général de lutte contre l'insécurité où le tout militaire a souvent montré ses limites, le dialogue avec les insurgés et autres groupes armés reste toujours une option sur la table. Car, il s'agit de tendre la main à des concitoyens qui ont pris les armes contre leur propre pays, dans le but de les amener à rentrer dans la République. En tout état de cause, le besoin de réconciliation des Congolais avec eux-mêmes, semble indéniable et se pose même comme une nécessité absolue dans ce pays-continent longtemps déchiré par la guerre et les divisions communautaires.
En tout cas, c'est la lecture que l'on peut faire de l'organisation, par les autorités de Kinshasa, de la table-ronde sur la réconciliation intercommunautaire entre ressortissants du Katanga et ceux du Kasaï, prévue pour s'ouvrir aujourd'hui même 22 avril 2022 à Lubumbashi. Tout le mal qu'on leur souhaite, c'est de parvenir à des conclusions qui les rapprochetont davantage en tant que frères congolais.