Tunisie: IPv6 - Le passage inévitable

Le passage à l'IPv6 est la nouvelle clé pour garantir la continuité et l'accélération d'une transformation numérique réussie que l'on souhaite dans la région arabe

Le coup d'envoi de la première édition du Sommet interrégional sur le passage de l'IPv4 vers l'IPv6 a été donné avant-hier, lundi, à Tunis en présence de plus de 70 délégués/participants de haut niveau représentant la Tunisie, l'Afrique ainsi que d'autres pays arabes. Organisé par l'Organisation arabe des technologies de l'information et de la communication (Aicto), en partenariat avec l'Union africaine des télécommunications (UAT) et sous le haut patronage du ministère des Technologies de la communication, cet événement se propose de détailler la feuille de route d'une stratégie de transition efficace vers l'IPv6 et présenter certaines expériences réelles issues de pays de la région.

Epuisement des adresses IPv4

Dans son mot d'ouverture, Mohamed Ben Amor, secrétaire général de l'Aicto, a précisé que l'organisation de cet événement découle de l'engagement et de la volonté de l'Aicto à mettre en exergue l'importance du passage à la version 6 du protocole de l'internet, vu son rôle et sa capacité à résoudre le problème d'épuisement des adresses IPv4 auquel est confronté l'actuel protocole, ce qui représente un catalyseur pour une accélération intelligente de la transformation numérique avec plus de sécurité et de mobilité.

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"Aujourd'hui, nous sommes au milieu de la quatrième révolution industrielle, caractérisée par les vagues de technologie et d'innovation, d'où la transition vers un mode de vie intelligent par l'essor des villes, des entreprises et des maisons intelligentes. Ce passage nécessite une adaptation massive des technologies, tels que l'internet des objets, le réseau 5G, l'intelligence artificielle, le Big Data... , et pleines d'autres innovations technologiques. Nous sommes aussi tous d'accord que l'internet, associé à l'intelligence, stimule et soutient la croissance accélérée de l'économie dans son ensemble et surtout celle numérique.

Cependant, l'utilisation accrue d'internet dans tous les domaines, qui a commencé dans les années 1990 et se poursuit encore atteignant aujourd'hui plus de 5 milliards utilisateurs dans le monde, et la prolifération des terminaux intelligents exercent une énorme pression sur les réseaux existants et accélèrent la baisse du nombre d'adresses disponibles. Ce qui signifie que nous sommes au bord de l'épuisement imminent des adresses IPv4 et il est urgent de passer au réseau de la nouvelle génération IPv6... Et là, nous sommes conscients que c'est le moment opportun de joindre les efforts autour de ce sujet stratégique. Le passage à l'IPv6 est aussi la nouvelle clé pour garantir la continuité et l'accélération d'une transformation numérique réussie que l'on souhaite dans la région arabe", a-t-il souligné.

Un déploiement déséquilibré

Sur un autre plan, M. Ben Amor a précisé que dans la région arabe, l'état de déploiement de l'IPv6 est extrêmement déséquilibré, où on trouve certains pays qui ont entamé, bel et bien, le processus de migration comme l'Arabie Saoudite, les Émirats, le Koweït, la Jordanie, la Tunisie... , alors que pour les autres, les efforts doivent être doublés par toutes les parties prenantes (gouvernement, fournisseurs d'équipements, fournisseurs de dispositifs réseaux, fournisseurs de contenus... ), pour pouvoir poursuivre la vitesse de la transition mondiale vers IPv6 et ne pas être laissé-pour-compte, et ce, afin de contribuer à réduire la fracture numérique dans la région, à laquelle sont confrontés certains pays arabes.

Un avis partagé par Bilel Jamoussi, chef du département des commissions d'études, bureau de normalisation à l'UIT (Union internationale des télécommunications), qui a ajouté que si on compare la Tunisie à d'autres pays dans notre région, l'Arabie Saoudite a 16 millions d'utilisateurs IPv6, contre 4 millions aux Emirats, 2,2 millions en Egypte et près d'un million en Afrique du Sud. Mais cette transition n'est plus un choix, c'est une obligation et une opportunité à saisir parce qu'il n'y a plus d'adresses IPv4.

Un cadre réglementaire se précise

Pour le cas de la Tunisie, M. Jamoussi a indiqué qu'on a constaté des efforts importants étant donné que le passage vers l'IPv6 nécessite une grande volonté politique et un leadership qui donne, par exemple, un délai de déploiement de la nouvelle version aux opérateurs et aux institutions du gouvernement. "L'engagement de l'Etat tunisien se traduit aussi par l'organisation de deux événements de taille. Il y a tout d'abord le workshop national sur l'IPv6 tenu au mois de février dernier durant lequel un dialogue a été fait auprès des trois opérateurs téléphoniques afin de prendre les mesures nécessaires pour déployer la version 6 du protocole de l'internet en Tunisie.

Deuxièmement, on a vu le décret gouvernemental qui incite les institutions publiques à transformer leur réseau en version IPv6. Et là, il n'est pas inutile de rappeler que le cadre légal est toujours le premier pas pris par les pays pour inciter au changement... Le code est là, il est déjà actif et prêt à être déployé par toutes les institutions. Il suffit donc de passer à l'action", a-t-il précisé, dans une déclaration accordée à La Presse, tout en ajoutant que ce séminaire interrégional arabe et africain a aussi comme objectif de mettre en œuvre l'expérience tunisienne, qui, en peu de temps, a accéléré la transition vers IPv6 dans les réseaux des opérateurs et dans les institutions publiques avec ce décret.

A une question sur les infrastructures nécessaires pour assurer ce passage, M. Jamoussi a affirmé qu'il y a généralement des changements de logiciels, parce que la majorité des hardwares sont adaptés et sont prêts pour la version 6. Il y a aussi la question de la capacité des ressources humaines (les ingénieurs qui gèrent le réseau), qui sont d'habitude adaptés à gérer la version 4 et qui doivent mettre à jour leur capacité de gérer le réseau IPv6 et là, il faut préciser que l'ATI a les ressources, les capacités et l'expertise nécessaires pour assister et assurer cette transformation et cette formation.

Pour les entreprises, ce passage donne et offre une meilleure sécurité parce que chaque utilisateur aura son adresse IP. Ça donne aussi une meilleure gestion de réseau et une meilleure stabilité. "Selon l'UIT, on a plusieurs résolutions pour soutenir les Etats membres à faire cette transition ; on a des ressources pour la création des capacités, la formation des ingénieurs, donner des modèles de politiques pour leur assurer les outils nécessaires pour faire cette transition, on a un nombre de rapports qu'on publie pour aider à faire cette transition... ", a-t-il précisé.

30 à 40% de couverture en 2023

Pour sa part, Philippe Wang, vice-président exécutif de Huawei Northern Africa, a indiqué que le géant chinois travaille sur ce sujet depuis plus d'une dizaine d'années et aujourd'hui, on parle de plus en plus de la transformation digitale dans différents secteurs en utilisant les nouveaux services qui se basent sur l'IPv6, considéré comme un axe stratégique dans cette révolution numérique.

"En Tunisie, nous sommes présents depuis plus de 20 ans et on connaît de près ce marché et les réseaux qui sont là dans les différents domaines. Mais ce passage vers l'IPv6 est aujourd'hui inévitable avec notamment le soutien affiché du gouvernement qui pousse vers cette transition. De l'autre côté, le secteur privé -- notamment les opérateurs téléphoniques -- n'a pas caché sa volonté pour accélérer ce passage. Pour ce faire, on ne cesse de travailler en amont dans nos laboratoires afin d'assurer les équipements et les solutions nécessaires qui devraient s'adapter aux besoins et aux spécificités du marché tunisien.

Dans ce pays, on est bel et bien avancé par rapport à d'autres pays au niveau de la stratégie, de l'exécution, du déploiement de l'infrastructure, du cadre réglementaire... , et maintenant il suffit de passer à l'action pour assurer cette transition digitale dans tous les secteurs. Huawei est là pour accompagner et assurer ce passage qui se fait, toujours, selon les besoins des entreprises et des citoyens et selon l'évolution du rythme dans différents secteurs...

Il faut juste avancer ensemble. Au niveau du coût, ça ne sera pas trop cher, car l'infrastructure est déjà installée grâce à un travail d'anticipation bien établi. Le réseau actuel peut répondre à une grande partie des besoins et au fur et à mesure on peut l'étendre selon le besoin. Une fois que tout ce chantier est bien entamé, la couverture d'un nœud d'équipement qui a besoin de moderniser son réseau sera aux alentours de 30% à 40% pour l'année 2023", a-t-il précisé.

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