Tunisie: Le Pr Amine Mahfoudh sort de son silence - " L'échec du référendum créera une catastrophe institutionnelle "

- Au cas où le Président Kaïs Saïed changerait le texte de la Constitution qui lui sera soumis par la commission, je présenterai ma démission

- Il n'existe pas de Constitution déjà rédigée que les participants à la commission n'auront qu'à avaliser

- J'accorde un soutien critique au processus du 25 juillet et je relève les erreurs et les dysfonctionnements

- Il est impératif de publier le texte de la nouvelle Constitution avant la tenue du référendum

"Si Amine, pourquoi gardez-vous le silence, pour quelle raison on ne vous entend plus à la radio et on ne vous voit plus à la TV ?". C'est Noureddine Taboubi, secrétaire général de l'Ugtt, qui adressait ces trois questions, un jour avant la publication du décret présidentiel n°30 en date du 19 mai 2022, au Pr Amine Mahfoudh, l'un des membres de la troïka des juristes et constitutionnalistes (Sadok Belaïd, Mohamed Salah Ben Aissa et Amine Mahfoudh) qui ont entouré le Président Kaïs Saïed, l'ont conseillé et l'ont poussé à déclencher le processus du 25 juillet 2021.

Et c'est bien Amine Mahfoudh qui a révélé, hier, lui-même, sur Radio Diwan FM, l'appel téléphonique de Noureddine Taboubi qui s'inquiétait de son silence et aussi de son absence dans les médias, plus particulièrement lors des dernières audiences que le Président Kaïs Saïed accordait aux doyens Sadok Belaïd et Mohamed Salah Ben Aissa.

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Hier, donc, le Pr Amine Mahfoudh a accepté de parler à la radio Diwan FM pour jeter la lumière sur son absence, pour relever les points de désaccord entre lui et le Président de la République et pour lancer une bombe selon laquelle il s'engage à refuser le texte de la prochaine Constitution au cas où il serait radicalement métamorphosé par le Président Kaïs Saïed.

Il faut publier le projet de la nouvelle Constitution avant le référendum

Et le Pr Amine Mahfoudh de parler à cœur ouvert pour annoncer que son soutien au processus du 25 juillet est "un soutien critique", ce qui "ne m'empêche pas de souligner que des erreurs ont été commises depuis le 25 juillet".

"Nous avons proposé que tout devrait être achevé en février 2022. Malheureusement, le retard pris par le Président de la République dans la prise des décisions qu'il fallait annoncer à chaud a fait que le soutien populaire au Chef de l'Etat est en train de se rétrécir de jour en jour", précise le Pr Mahfoudh.

A la question de savoir ce qu'il pense du refus des doyens des facultés de Droit de participer à la commission chargée de rédiger la nouvelle Constitution, il répond : "Les universitaires ont participé en 2011 à l'instance connue comme étant l'instance de Yadh Ben Achour et ils ont accepté d'y participer à titre consultatif. Moi-même, j'ai fait partie de cette instance et j'y ai exprimé mes positions en toute liberté".

Le texte de la Constitution est-il déjà écrit ?

Amine Mahfoudh est tranchant dans sa réponse : "Il n'existe pas de texte déjà rédigé auquel les participants au dialogue n'auront qu'à accorder leur aval. Il existe certains principes généraux que nous aurons à discuter avec tout le monde".

Il précise encore : "Au cas où le Président Kaïs Saïed introduirait des changements radicaux sur le texte du projet de la Constitution que la commission lui soumettra, je démissionnerai de cette commission. D'ailleurs, j'appelle à ce que le projet de Constitution qui sera élaboré par la commission soit publié avant la tenue du référendum du 25 juillet prochain".

Et si le référendum programmé le 25 juillet aboutit à un refus de la part des électeurs, que doit faire le Président ?

Le Pr Amine Mahfoudh fait remarquer : "Ce sera un chaos institutionnel et il faudrait retourner à la Constitution de 2014. Quant à savoir si le Président aura à démissionner ou à parachever son mandat, c'est à lui que reviendra le dernier mot".

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