Afrique: Il est temps de se remettre sur les rails!

analyse

Le rapport annuel et l'avis annuel du Bureau de l'Inspecteur général ( BIG ) sur la gouvernance, la gestion des risques et les contrôles internes, présentés lors de la réunion du Conseil d'administration la semaine dernière, couvrent un certain nombre de questions qui sont également étroitement liées au rapport sur la gestion des risques et à l'avis annuel du responsable en chef de la gestion des risques (voir article 4) ainsi qu' au rapport annuel et à l'avis du responsable de l'éthique (voir article 6).

Le présent article est basé sur le rapport annuel du BIG, les discussions et les observations des parties prenantes, ainsi que les commentaires relatifs aux rapports présentés au Comité de l'audit et des finances (AFC) avant la réunion du Conseil d'administration.

Dans sa conclusion générale, le rapport du BIG indique qu'aucune faiblesse majeure n'a été constatée dans les processus de gouvernance, de gestion des risques ou de contrôle, susceptible de compromettre la réalisation globale des objectifs du Fonds mondial. Toutes les activités du BIG ont été menées conformément à sa charte et aux normes professionnelles internationales applicables. Aucune interférence n'a été constatée en ce qui concerne la détermination de la portée des activités ou du travail effectué par le BIG, ou la diffusion des résultats de son travail; et le BIG dispose de ressources suffisantes pour remplir efficacement son mandat.

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Le BIG a pu mener à bien son plan de travail malgré la persistance des perturbations liées à la COVID-19 au cours de cette année, en tenant toutefois compte des contraintes suivantes:

La majeure partie de ses activités d'assurance ont été réalisées à distance.

des fluctuations constantes ont été observées dans les processus de gestion standard

La COVID-19 a contribué à l'augmentation du niveau global d'appétence au risque tel qu'approuvé par le Conseil d'administration.

Selon le rapport du BIG, des contraintes ont été imposées, notamment en raison de la COVID-19 et de l'instabilité dans certaines régions. En effet, certaines régions ont fait remarquer que l'instabilité croissante du contexte opérationnel à leur niveau nécessite une certaine flexibilité pour pouvoir adapter la matrice des risques dans chaque pays, en priorisant certains risques ou en retirant certaines activités de contrôle de la liste des priorités (au niveau des acteurs de mise en œuvre). Par conséquent, les profils de risque des portefeuilles des pays doivent être continuellement mis à jour dans les délais requis, et des mesures d'atténuation élaborées à cet effet.

Thèmes clés de 2021

Les programmes du Fonds mondial ont un impact mais sont entravés par les perturbations de la pandémie et les défis existants: Les obstacles à l'accès nuisent à la prévention, au traitement et au suivi du VIH et l'on constate une augmentation inquiétante des cas manquants de tuberculose.

Le mécanisme de riposte à la COVID-19 (C19RM) a considérablement évolué mais éprouve les limites des capacités du modèle du Fonds mondial: Les demandes sont traitées rapidement, mais l'adaptation du modèle de subvention triennale à une pandémie entraîne des difficultés au niveau de l'opérationnalisation, de l'absorption des fonds et de l'approvisionnement dans les pays.

Les chaînes d'approvisionnement fortement sollicitées perturbent les programmes: Une pression mondiale sans précédent s'est exercée sur les chaînes d'approvisionnement qui avaient déjà du mal à s'adapter. Ce stress supplémentaire entraîne des ruptures de stock, des péremptions et compromet l'impact. Les risques liés aux chaînes d'approvisionnement dans les pays restent élevés, mais c'est le seul domaine où le Fonds mondial a le moins de contrôle.

Le risque de fraude dans les programmes du Fonds mondial est en hausse et évolue: Les tendances de 2021 persistent en 2022 - le nombre de cas est en hausse. Le nombre d'actes répréhensibles et de plaintes a considérablement augmenté, notamment en ce qui concerne les problèmes liés à la chaîne d'approvisionnement, la qualité des produits et l'exploitation et les abus sexuels. La fraude opportuniste est plus fréquente que la fraude systémique.

En outre, le rapport du BIG a souligné la nécessité de continuer à se pencher sur la question des agents locaux du Fonds (LFA) et des agents fiscaux mise en évidence par plusieurs régions (et en particulier par la réunion annuelle des circonscriptions africaines à l'article 8), qui ont appelé à un réexamen du rôle de l'agent fiscal et à l'élaboration d'un mécanisme plus approprié pour le remplacer.

En effet, les circonscriptions africaines, tout en admettant l'existence de problèmes liés à la faiblesse de la redevabilité et des capacités dans certains de leurs pays, se sont également interrogées sur l'étendue des responsabilités des LFA, les agents fiscaux ou fiduciaires responsables de l'atténuation des risques, et ont demandé au Secrétariat et au BIG de travailler avec les institutions de reddition de comptes dans les pays pour remédier à ce problème.

Évaluation externe de la qualité

La dernière évaluation externe triennale du BIG a été réalisée à la fin de l'année 2021.

L'Unité en charge des enquêtes a reçu la note maximale "globalement conforme": La fonction est "gérée par une équipe hautement professionnelle et bien dotée en ressources, qui s'acquitte de ses tâches de manière sophistiquée, rigoureuse et solide" ; et "les enquêtes sont menées avec la sensibilité qui convient".

L'unité en charge de l'audit a reçu la note la plus élevée possible, à savoir "globalement conforme". La maturité globale de l'unité est "optimisée" - le plus haut niveau possible, selon le modèle "Ambition" de l'Institut des auditeurs internes (IIA). Un plan d'action complet a été élaboré pour remédier aux aspects identifiés dans lesquels le BIG pourrait encore gagner en maturité et s'améliorer.

Perspectives d'avenir: pour accroître l'impact, il est indispensable de relever les principaux défis.

La mise en œuvre dans les délais requis, une meilleure différenciation, l'évolution de la gestion des risques et la garantie de l'obligation de rendre des comptes dans l'ensemble du partenariat sont autant d'éléments qui nécessiteront des actions concertées en 2022.

Le BIG a tenu à préciser que le message à retenir de son rapport annuel était le suivant: le Fonds mondial ne pourra mener à bien sa mission que si "nous parvenons à faire sortir les produits". Il s'agit de l'aspect le plus fondamental du travail du Fonds mondial, mais c'est celui qui reçoit le moins d'attention (comme l'ont noté plusieurs circonscriptions ci-après).

Le Fonds mondial ne parviendra pas à atteindre les résultats de son ambitieuse nouvelle stratégie s'il ne garantit pas l'absorption des fonds, n'évolue pas et n'adapte pas ses pratiques en matière de gestion des risques; les risques sont connus mais doivent être mieux atténués. Le BIG doit continuer à promouvoir la redevabilité au sein du Fonds mondial et s'assurer que nous nous tenons mutuellement responsables de la réalisation des objectifs.

Discussions et commentaires des parties prenantes et du conseil d'administration

Les parties prenantes ont apprécié le rapport complet du BIG, qui, selon elles, fournit des détails pertinents ainsi que des graphiques et des résumés pratiques. Elles ont été ravies de lire l'avis général du BIG selon lequel, malgré l'impact de la pandémie, aucune faiblesse majeure n'a été constatée dans les processus de gouvernance, de gestion des risques ou de contrôle du Fonds mondial, qui pourrait compromettre de manière significative la réalisation globale de ses objectifs.

Les thèmes stratégiques clés abordés par le BIG dans le rapport doivent être traités comme une priorité élevée. Aussi, les parties prenantes ont-elles été satisfaites de voir des évaluations franches dans certains domaines où des améliorations pourraient être apportées.

Une déclaration particulière a retenu l'attention: "La visibilité du Fonds mondial concernant la disponibilité des produits de santé dans les pays reste limitée en termes de couverture, de qualité et de profondeur de l'information". Même si la COVID-19 a rendu la surveillance plus difficile, cette évaluation suggère que des mesures sont nécessaires dans ce domaine essentiel des investissements du Fonds mondial.

Les actions convenues (AMA) ont fait l'objet de nombreuses discussions. Les participants ont été stupéfaits par la statistique selon laquelle seulement "20% des AMA ont été mises en œuvre par le Secrétariat à la date prévue entre janvier 2020 et le 31 décembre 2021". Bien que cette situation soit en partie attribuée à la charge de travail liée à la COVID-19, les parties prenantes espèrent que des efforts seront déployés pour rattraper le retard accumulé.

Lors de l'examen du plan de travail 2022 du BIG, les parties prenantes ont apprécié l'accent mis sur les risques et l'impact. Elles ont été particulièrement satisfaites de constater que le BIG a planifié de mener sa première étude sur l'optimisation des ressources, afin d'évaluer dans quelle mesure les investissements du Fonds mondial produisent les résultats escomptés. Espérons que cette étude s'avérera utile et qu'elle ne sera pas la seule du genre.

Préserver l'indépendance

De nombreuses parties prenantes ont réitéré la nécessité pour le BIG de rester totalement indépendant. Cette indépendance constitue l'un des socles de la confiance des partenaires envers le Fonds mondial, car elle donne de l'assurance et de la confiance aux acteurs de mise en œuvre, aux ICN, aux comités et aux membres du Conseil d'administration.

Exploitation sexuelle, abus et violations des droits de l'homme

De nombreuses parties prenantes ont signalé l'augmentation significative des notifications d'exploitation et d'abus sexuels, et de violations des droits de l'homme (SEAH), et ont estimé que ce phénomène pouvait être imputable à une augmentation des notifications et non à une tendance sous-jacente à la hausse. En 2021, le Fonds mondial a élaboré un cadre pour la prévention de l'exploitation et des abus sexuels: les délégués ont demandé au Fonds mondial de mettre l'accent sur la mise en œuvre du cadre de l'exploitation et des abus sexuels (interrompu en raison de la pandémie) au niveau des pays et en particulier dans les environnements à haut risque, en réitérant leur tolérance zéro envers l'inaction contre l'exploitation et les abus sexuels.

Toutefois, comme le montrent le feedback des circonscriptions africaines (article 8), de nombreux pays ont également estimé qu'il s'agissait d'une question complexe nécessitant une session spécifique pour traiter le sujet de manière judicieuse.

Fraude et lutte contre la corruption

Les circonscriptions ont apprécié les efforts et les progrès accomplis concernant les mécanismes de lutte contre la corruption et la fraude, mais ont exprimé leur inquiétude pour ce qui est de la mise en œuvre de la politique dans les délais requis et appelé le Fonds mondial à faire le point sur la question. Tous souhaitaient éviter une répétition du retard dans la notification des cas de fraude possibles par le Secrétariat, comme cela a été le cas avec le Libéria. Les recommandations du BIG concernant l'activation d'un suivi périodique, l'adaptation des mesures d'atténuation et le développement d'une approche formelle de suivi des risques de fraude ont été approuvées. Ainsi, ils ont accueilli favorablement l'appel du BIG à mettre en place des processus et des procédures robustes ainsi que des mesures d'atténuation visant à empêcher l'utilisation abusive des ressources du Fonds mondial et à développer une approche formelle de surveillance des risques de fraude, mais ont également souhaité obtenir des informations plus détaillées sur le plan du Secrétariat à cet effet.

En lien étroit avec ce sujet, les parties prenantes ont apprécié le recrutement d'un cadre pour le Bureau de l'éthique et ont appelé le Fonds mondial à intégrer la gestion de l'éthique et des risques dans les processus opérationnels de base. Tel que mentionné dans les conclusions préliminaires de l'évaluation du Fonds mondial par le Réseau d'évaluation des performances des organisations multilatérales (MOPAN), les parties prenantes ont réitéré les appels précédents du Conseil d'administration à accélérer la mise en œuvre de la politique de lutte contre la corruption et la fraude, étant donné que la réalisation de près d'un tiers des AMA est en retard.

Problèmes de la chaîne d'approvisionnement

Avec la mise en place du Cadre de façonnage du marché NextGen, les parties prenantes s'attendaient à voir des propositions tangibles sur les moyens de résoudre les problèmes de chaîne d'approvisionnement, qu'ils soient liés à la pandémie ou préexistants, qui perturbent les programmes du Fonds mondial. Dans ce contexte, elles ont souligné l'importance de lier l'expansion de wambo.org en tant que plateforme du mécanisme d'achats groupés (PPM) au renforcement des capacités des pays en matière d'achats et de chaîne d'approvisionnement. Ils ont souhaité voir des propositions spécifiques sur les modalités par lesquelles le Fonds mondial peut contribuer à renforcer/soutenir la fabrication locale/régionale en vue d'améliorer la sécurité des approvisionnements sanitaires.

Toutes les défaillances ne sauraient être imputées à la COVID

De nombreuses parties prenantes sont déçues de constater que, deux ans après le début de la pandémie, la COVID-19 continue de figurer en bonne place dans les documents et les discussions du Fonds mondial, au détriment d'un recentrage sur les trois maladies ou, à tout le moins, d'une meilleure compréhension de l'intersection de la COVID-19 avec le VIH, la TB et le paludisme. La plupart des délégations estiment qu'il est grand temps pour le Fonds mondial et ses partenaires de se remettre sur les rails en accordant une attention renouvelée aux programmes de lutte contre les trois maladies. S'il est juste de dire que la COVID-19 a effectivement freiné les progrès des pays et limité les opportunités, il n'en reste pas moins que les défis substantiels liés à la gestion des subventions et affectant les rôles et les performances des Instances de coordination nationale, des récipiendaires principaux et des agents locaux du Fonds ne sont pas des sujets nouveaux. Certains de ces problèmes sont apparus bien avant la pandémie, et le Fonds mondial ne peut plus se permettre d'imputer chaque problème de performance à la COVID-19.

Le document GF/B47/07 du Conseil d'administration, intitulé "Office of the Inspector General Update", devrait être disponible très prochainement sur le site https://www.theglobalfund.org/en/board/meetings/47.

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