Afrique: L'industrie du tabac en pleine mutation malgré les dispositions réglementaires liées à la santé publique

Cigarettes
20 Juin 2022

Dans plusieurs pays, avec des taxes, des restrictions sur la publicité et des campagnes de sensibilisation, l'industrie du tabac aurait connu une réduction de son marché. Tel n’est pas le cas dans d’autres où ce secteur continue d'être florissant - du point de vue économique et en termes de consommation avec les compagnies de tabac qui se mobilisent dans la protection de leur "marché" à travers une nouvelle stratégie de transformation.

Au cours d'une session animée le vendredi le 17 juin 2022 en marge du Forum mondial sur la nicotine (Global Forum on Nicotine-GFN) tenu cette semaine à Varsovie en Pologne, plusieurs experts ont salué les stratégies adoptées par certaines industrielles qui se mobilisent désormais dans la production du tabac à moindre risque sur la santé humaine.

« Ces innovations sont destinées à satisfaire la demande sur le marché international avec les produits du tabac qui contiennent et émettent des substances moins nocives », a déclaré Flora Okereke, responsable de l'unité Perspectives et Prévisions Globales au sein du groupe British American Tobacco. Une compagnie qui exporte du tabac expansé à partir du Royaume-Uni vers plusieurs pays à travers le monde.

Industrie en pleine restructuration

Si la forte dépendance des Gouvernements pour la plupart des pays à l’égard des taxes sur le tabac a été un obstacle majeur aux efforts de lutte contre le tabagisme, Okereke affirme qu’il y a eu un changement profond à travers la restructuration de l’industrie compte tenu du fait que la publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac, des produits du tabac soie interdite.

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Malgré cette série de mesures en place, les participants au Forum ont déploré que certains industriels continuent de profiter du manque de régulation du tabac dans certains pays pour faire du profit.

En Afrique subsaharienne, par exemple, les pays comme le Malawi et la Zambie où l’on observe l’absence de majoration de la fiscalité sur le tabac en vue de réduire le tabagisme, la majorité des agriculteurs se ruent actuellement dans la culture du tabac parce qu’ils sont convaincus que c’est la seule exploitation économiquement viable.

« Le constat immédiat est que la viabilité économique perçue par les agriculteurs dans ces pays contribue à la culture du tabac », a fait remarquer Okereke. Pour lui, cette attitude découle notamment du fait que ces pays connaissent une absence des taxes élevées sur les produits du tabac comme c'est le cas pour d'autres régions.

Malgré les méfaits avérés du tabagisme pour la santé humaine, les avis sont unanimes pour les participants au Forum mondial sur la nicotine. « Les fabricants de tabac sont parmi les premiers contribuables dans de nombreux pays ».

Transformation industrielle

Le protocole en vigueur ratifié par l’Organisation mondiale de la santé (Oms) met en place l’octroi de licences pour tous les participants au commerce du tabac, un système mondial de suivi et de traçabilité. Ce qui, selon l’organisme onusien, permet de recenser la fabrication et l’importation légale et illicite de produits du tabac, des méthodes de paiement avec suivi, un contrôle des zones franches et des pénalités financières importantes pour le commerce illicite.

Pour la réussite de cette transformation industrielle face à la politique actuelle pour lutter contre le tabagisme, il a été démontré que ces mesures n’ont jamais eu le moindre impact négatif sur les industries de tabac.

Selon Dr Peter Stanbury, un des panélistes et expert dans le domaine des Affaires et en économie à l’Université d’Oxford en Grande Bretagne, les mécanismes de contrôle actuels doivent être fondés sur des renseignements à jour et en temps opportun sur les caractéristiques des produits du tabac ainsi que les pratiques de cette industrie qui incombent aux pouvoirs publics.

La fiscalité en vigueur pour la plupart des pays notamment en Afrique subsaharienne est composée d’une TVA et de taxes spécifiques appelées droits de consommation.

Si la forte taxation des produits du tabac permettrait aux yeux de certains experts de réduire leur consommation, d’autres observent avec satisfaction que des mesures de transformation adoptées par les industriels sur base de preuves scientifiques ont permis de réduire de manière significative les effets sur le risque pour la santé dues au tabagisme chez les consommateurs.

Les dangers de la nicotine

Pour le moment, l’industrie du tabac a fait face à un certain nombre de restrictions, mais Sacha Sadan, un autre panéliste, responsable chargé de l’environnement, du social et de la gouvernance au sein de de l'Autorité anglaise “Financial Conduct Authority” estime que les fabricants ont toujours besoin de commercialiser ces produits à risques réduits et qui donnent satisfaction aux consommateurs.

« Les industriels ont besoin de développer le marché des cigarettes, tout en connaissant parfaitement leur nocivité majeure », a souligné l’expert.

Si les industriels du tabac ont toujours caché la toxicité de la cigarette en cherchant à en nier publiquement les dangers, les participants au forum ont estimé que l’heure est venue pour les fabricants de mettre en évidence le rôle majeur de la nicotine dans la dépendance au tabac.

« Nous avons opté pour cette transformation industrielle, car la révélation de la nocivité du tabac sur la santé humaine inquiète toujours », a souligné Okereke.

Alors que la plupart des participants au forum exigent qu’il y ait une politique anti-tabac pour certains pays à l’égard des industriels, Okerere pense que l’interdiction plus stricte dans la production du tabac soit la voie à suivre.

« Il devrait y avoir un effort combiné et constructif dans tous les sens », a-t-elle fait remarquer.

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