Afrique: L'OTAN à Madrid

La rumeur enfle depuis des jours : l'OTAN discutera la possibilité d'intégrer les deux présides occupés de Sebta et Mellilia au sein de son alliance militaire. Certains médias espagnols évoquent même l'existence d'un avant-projet censé être discuté lors du sommet de l'OTAN en cours à Madrid.

De son côté, le président du gouvernement local de Mellilia a saisi l'occasion des derniers événements survenus au niveau de la barrière séparant ce préside occupé du reste du Maroc, pour propager de nouveau l'idée d'intégrer Sebta et Mellilia au sein de l'OTAN afin de faire face aux flux migratoires irréguliers.

Le directeur général de la politique de défense, le lieutenant-général Fernando López del Pozo, a indiqué, pour sa part, dans une interview à la presse espagnole, qu'il n'y a "aucun doute que Ceuta (Sebta) et Melilla (Mellilia) auraient la protection collective de l'OTAN " en cas d'attaque, " bien qu'elles soient en dehors " de la zone géographique de l'OTAN.

Spéculations médiatiques

" Ces propos sur l'avenir des deux préside occupés ne sont que des spéculations relayées par une certaine presse. Il s'agit donc d'un débat plutôt médiatique qui se passe sur les colonnes des journaux et des sites d'informations. On évoque un document ou un avant-projet mais il n'y a rien de concret. D'autant que l'OTAN n'a pas déclaré clairement que les deux présides occupés constituent une partie de l'UE et qu'ils sont sous une législation européenne ", nous a indiqué le chercheur Abdellah Rami, du Centre marocain des sciences sociales. Et de préciser : " D'autant que nous n'avons pas observé des réunions ou des mouvements au niveau de l'Espagne, de l'OTAN ou de l'UE.

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A noter également que les relations avec l'Espagne sont au beau fixe et nous n'avons pas relevé des signes de malentendu ou de conflit entre le Maroc et l'Espagne ou avec l'UE ". Pour notre interlocuteur, les Espagnols parlent de la sécurisation de la rive sud de l'Europe contre les menaces de migration, de terrorisme et de crime organisé et non pas d'une intégration pure et nette de Sebta et Mellilia dans ladite alliance militaire. " En effet, l'Espagne ambitionne de profiter de l'organisation du Sommet de l'OTAN à Madrid pour imposer sa thèse concernant les dangers en provenance du Sud ", nous a-t-il souligné.

Et d'expliquer : " Il y a aussi l'objectif de chercher à calmer une certaine élite espagnole au pouvoir et certaines composantes politiques de la société (armée, renseignements, politiciens,... ) qui s'obstinent à lier dans une trop curieuse transaction le dossier de Sebta et Mellilia à celui du Sahara. En effet, la position de Pedro Sanchez en faveur du Maroc dans le dossier du Sahara et son soutien au plan marocain d'autonomie pour les provinces sahariennes, jugé comme la "base la plus sérieuse, crédible et réaliste" pour résoudre "un conflit trop long", dans le cadre de l'ONU ont remis en cause cette équation. Bref, tout ce qui circule dans les médias n'est qu'une épaisse fumée destinée à la consommation médiatique interne".

Oui, mais

Notre source soutient, par ailleurs, qu'il n'y a pas d'unanimité sur ce sujet en Espagne puisqu'il n'y a pas une position unique et unifiée. A noter à ce propos que la ministre de la Politique territoriale et porte-parole du gouvernement, Isabel Rodríguez, a évité de préciser si le sommet de l'OTAN qui prendra fin jeudi à Madrid inclut expressément dans ses documents la protection de l'Alliance pour Sebta et Mellilia.

Selon elle, aucun pays de l'OTAN ne doute de l'importance de contenir les menaces qui pourraient venir du Sud, où la Russie a déjà une forte présence dans des pays comme la République centrafricaine ou le Mali et où l'instabilité est croissante dans la zone sahélienne. "Si ces pays ne sont pas aidés à contrôler leur territoire, ça va empirer", prévient-elle dans une déclaration à la presse espagnole. Et de préciser qu'en tout état de cause, cette aide ne prendra pas la forme de bases de l'OTAN sur le territoire africain, mais plutôt celle d'une coopération et d'une multiplication des "partenariats" avec des pays démocratiques qui ne font pas partie de l'Otan mais qui partagent ses postulats, comme la Mauritanie.

Un non catégorique

Mais, loin de ces spéculations politiques et médiatiques, le scénario d'intégration de Sebta et Mellilia à l'OTAN est-t-il possible ? " Une telle hypothèse sera gênante pour le Maroc qui n'acceptera catégoriquement pas un tel projet. Et l'Espagne sait très bien que Rabat ne peut en aucun cas céder ces deux villes. L'intérêt pour les deux présides occupés est identique à celui du Sahara.

Il s'agit d'un dossier stratégique tranché qui relève de la sécurité nationale. En effet, l'intégrité territoriale est sacrée et Sebta et Mellilia sont deux lignes rouges à ne pas franchir", nous a répondu Abdellah Rami. Et de conclure : " Il est sûr que l'Espagne va éviter d'évoquer ce dossier. Les derniers événements de Mellilia ont démontré à l'UE et à l'Espagne l'importance de la place et du rôle du Maroc dans la gestion du dossier de la migration. Le Maroc s'impose aujourd'hui comme point d'entrée pour l'Europe comme pour l'Afrique ".

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