Afrique de l'Ouest: Embargo de la Cédéao et de l'Uemoa sur le Mali - Comment les ports de Conakry et de Nouakchott ont profité de la situation

3 Juillet 2022

Tout comme le Sénégal l'a fait durant la crise politico-militaire de septembre 2002 à Avril 2011, pour capter le gros lot du trafic malien à l'import-export qui passait par les ports ivoiriens, l'ouverture faite par la Guinée Conakry et la Mauritanie au Mali a profité aux ports des deux premiers pays cités.

Certainement par solidarité régionale, le Mali, a profité pour faire passer son coton principalement et recevoir des produits comme l'engrais, le phytosanitaire destinés aux cotonculteurs, mais aussi le fer à béton et le Clinker pour l'approvisionnement de l'industrie locale notamment  les cimenteries de la Cimaf basées au Mali.

Les bonnes affaires des Ports de Conakry et de Nouakchott….

Visiblement, le port de Conakry, se frotte les mains. Des informations reçues de certains transitaires et confirmées par  la presse guinéenne, du fait de l'embargo économique et financier de la Cédéao et l'Uemoa  sur le Mali, le Port de Conakry est devenue une plateforme en pleine mutation dont l'objectif est de capter le transit malien. Challenge réussi ? On ne peut en dire plus. Mais une chose est sure, depuis l'entrée en vigueur des sanctions, dès début Janvier 2022, les opérateurs économiques maliens appuyés  par le gouvernement, ont exploré toutes les voies  de substitution qui pouvaient éviter l'étouffement  au Mali.

En Guinée Conakry, grâce aux  offensives commerciales, plusieurs accords ont été scellés entre la Société Alport Conakry et certains opérateurs économiques maliens. Pour lier l'acte à la parole, onze mille tonnes de blé en transit pour le Mali ont été reçus par la Société Alport Conakry (concessionnaire du Terminal Conventionnel) le Dimanche, 29 Mai 2022 aux environs de 16h 40 minutes et les opérations de déchargement ont commencé à 19h. Il est à préciser que ces onze mille tonnes de blé appartiennent au Groupe KÉÏTA (7000 tonnes), aux Grands Moulins du Mali (2000 tonnes) et aux Moulins du Sahel (2000 tonnes).

Pour améliorer sa capacité opérationnelle et attirer davantage les opérateurs économiques maliens, la société Alport Conakry accorde des avantages aux chargeurs maliens notamment, les tarifs concurrentiels, la priorité d'accostage, la facilité du traitement des marchandises pour ne citer que cela. Aux  détriments  des ports ivoiriens et  sénégalais. Sans oublier les expéditions de fibres de coton  de la Compagnie malienne pour le développement  des textiles, (Cmdt). Le Mali, faut-il  préciser est  un grand producteur  de coton en Afrique de l'Ouest.  En 2020/21, le Mali était le deuxième producteur ouest-africain de coton avec 1,4 million de balles,  derrière 1,5 million pour le Bénin.

Les ports ivoiriens en ont  traité plus  de  320 mille tonnes de fibres de coton malien. Ce qui voudrait dire que  le reste est passé par le port de Dakar certainement. Par ailleurs, les chiffres du Département américain de l'Agriculture, souligne que « le Mali a fait un bond fantastique l'année dernière après une année de boycott, ses superficies cotonnières atteignant 795 000 hectares, soit une hausse de 382% sur la campagne précédente lorsque seulement 165 000 ha avaient été emblavés »  Malheureusement, Conakry et la Nouakchott, ont capté ce gros trafic coton qui est la locomotive des imports et exports du Mali.

Ayant  tiré les leçons des sanctions de la Cédéao et de l'Uemoa, le Mali a décidé  de diversifier ses débouchées maritimes. Désormais, en plus de la Côte  d'Ivoire, le Sénégal, le Togo, le Benin, la Direction générale des Entrepôts  maliens,(  structure étatique  en charge  des la facilitation  des  imports et exports),   a mis le cap  sur le redimensionnement    de ses installations    en Guinée Conakry et en Mauritanie.

Les chargeurs maliens vont-ils retourner aussi tôt dans les ports ivoiriens et Sénégalais ?

Mais passé la crise et l'embargo levé, ports  sénégalais et ivoiriens  pourront-ils atteindre leurs  niveau  de trafic global avec le Mali ?  Nous  avons interrogé M.D. Il est expert en transports maritimes  bien connu dans la communauté portuaire d'Abidjan et de San Pedro.  Son  analyse est sans ambages : «Compte tenu du fait que les  chargeurs  maliens et  leurs partenaires ont la possibilité d'utiliser d'autres ports notamment celui de la Guinée Conakry, nous assistons aux « détournements  » de trafics vers le port de ce pays qui n'a certes pas de grandes infrastructures comme  ceux  d'Abidjan et  de  Dakar.

Ils ont  profité de l'occasion pour  se redimensionner, se positionner davantage, pour capter une partie du trafic traditionnel destiné aux ports ivoiriens et sénégalais. Cela va  continuer et leur retour sur les routes ivoiriennes et  sénégalaises comme par le passé  pourrait prendre du temps » Et d'ajouter: « La Guinée Conakry commerce déjà avec le Mali. L'axe Conakry – Bamako n'est pas entièrement bitumé. Les travaux en cours, ont connu un coup d'accélérateur. Un peu comme le Sénégal a profité de la crise politico-militaire ivoirienne, qui a éclaté  en septembre2002, pour  s'ouvrir davantage aux opérateurs économiques maliens. Avec qui, il fait de bonnes affaires depuis quelques années »

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