Burkina Faso: Retour de Blaise à Ouaga - Une visite aux multiples interrogations

Blaise Compaoré , Ex chef d'Etat burkinabè.
éditorial

Trêve de conjectures, ce qui se murmurait depuis le mardi 5 juillet 2022 a revêtu hier le sceau officiel.

Un communiqué de presse émanant de la direction de la Communication de la Présidence du Faso annonce en effet une rencontre demain vendredi entre le président Paul-Henri Sandaogo Damiba et ses prédécesseurs. Soit, du plus récent au plus ancien dans la fonction, Roch Marc Christian Kaboré, Michel Kafando, Yacouba Isaac Zida, Blaise Compaoré et Jean-Baptiste Ouédraogo.

Il faut espérer, au regard de la liste de présence, que Michel Kafando et Jean-Baptiste Ouédraogo ne vont pas jouer les "forces tampon" entre les quatre autres qui ont tant de ressentis les uns envers les autres.

Selon les communicants de la Présidence, il s'agit d'une "rencontre de haut niveau autour des questions liées à l'intérêt supérieur de la Nation" entre l'actuel locataire de Kosyam et le "club des ex" qui fait suite à une première rencontre initiale entre lui, Roch et JBO le 21 juin dernier.

S'il est deux personnalités dont la présence à cette entrevue est problématique, c'est d'abord Zida, mais surtout Blaise Compaoré.

Le premier, comme on le sait, après avoir habilement manœuvré à l'insurrection populaire de fin octobre 2014 pour se hisser au sommet de l'Etat après la chute et l'exil forcé du tombeur de Thomas Sankara, a fini lui aussi, après son passage à la Primature, par prendre la route du Canada en 2016. Le lieutenant-colonel qui s'était fait bombarder général de division avant de prendre la poudre d'escampette est depuis septembre 2016 sous le coup de poursuites judiciaires pour "désertion en temps de paix".

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Quant au beau Blaise, qui a aujourd'hui perdu de son charme, il est depuis longtemps dans de beaux draps. Exilé à Abidjan depuis qu'il a dû fuir Ouagadougou en plein midi le 31 octobre 2014, il a été jugé par contumace pour l'assassinat de Thomas Sankara et condamné à la prison à perpétuité. " Et nombreux sont ceux, notamment dans la galaxie sankariste, qui ne désespèrent pas d'accrocher sa tête à un croc de boucher. Toute la question reste donc de savoir quel type d'accueil on lui réservera si d'aventure le projet devait se concrétiser", écrivions-nous dans notre édito d'hier. On ne pensait pas si bien dire.

Le collectif des avocats des ayants droit de Thomas Sankara et de ses 12 compagnons d'infortune ont en effet effectué un tir de barrage contre cette arrivée de l'ex-enfant terrible de Ziniaré.

Dans un communiqué signé de Me Bénéwendé Stanislas Sankara, les "avocats des parties civiles interpellent avec insistance les autorités judiciaires à prendre toutes leurs responsabilités, notamment faire arrêter et déférer Monsieur Blaise Compaoré à la justice du Burkina Faso afin que force reste à la loi".

Pour la galaxie sankariste, celui qui s'est fait octroyer la nationalité ivoirienne pour parer à tout risque d'extradition et qui fait toujours l'objet d'un mandat d'arrêt devrait donc, s'il débarquait, aller directement de l'aéroport à la Maison d'arrêt et de correction des armées (MACA) pour y retrouver son ancien bras droit, le général Gilbert Diendéré.

Le communiqué de presse de la Présidence du Faso précise d'ailleurs que la rencontre de vendredi "n'entrave pas les poursuites judiciaires engagées contre certains".Une petite phrase destinée sans doute à rassurer ceux qui rêvent de voir le frère de François derrière les barreaux mais qui n'a rien de rassurant pour ce dernier. Ni pour Zida d'ailleurs.

Certainement Sandaogo a-t-il pris des engagements pour que Blaise puisse revenir et repartir sans être inquiété, et il s'en donnera les moyens.

Mais il faut craindre que le conclave de Kosyam, censé contribuer à la réconciliation nationale, ne vienne au contraire nous en éloigner un peu. Ce que beaucoup de gens craignent également dans ces retrouvailles, ce sont ces petites combines entre ex. Un entre-soi politique qui n'aura pas d'impact réel sur la cohésion sociale et le vivre-ensemble dont nous avons tant besoin en ce moment.

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