Congo-Kinshasa: Embargo pour groupes armés - pure distraction... /Le vrai embargo ne s'applique qu'aux Etats !

opinion

*Aux yeux de tout gouvernement dont le pays est membre de la Communauté internationale, tout groupe armé est une organisation politico-militaire, une organisation insurrectionnelle, voire une organisation terroriste. C'est la raison pour laquelle à son article 190, la Constitution de la RDC interdit, sous peine de haute trahison, l'organisation des formations militaires et para-militaires, des milices privées ou d'une jeunesse armée...

Prenons, pour être au cœur de l'actualité, l'exemple simple et concret du M23. Comment doit-il opérer pour se procurer des armes ? Au départ, il a amplement conscience de ne pouvoir s'adresser à un fabricant d'armes avec une commande portant son papier à en-tête.

On n'imagine toute de même pas un fabricant de la trempe de Lockheed Martin, Raytheon Technologies, Northrop Grumman, General Dynamic, Aviation Industry Corporation, BAE Systems, L3Harris, Almaz-Antey ou Thales prendre un tel risque.

Il a davantage conscience de ne pouvoir payer par virement bancaire puisqu'on voit mal une banque accepter d'ouvrir un compte à son nom. Même avec des mallettes pleines de dollars ou d'euros, la transaction a peu de chances de passer.

Mettre alors sous embargo le M23 et le clamer tout haut n'a pas de sens...

Des Etats sont des premiers et principaux fournisseurs des groupes armés

Depuis le 30 juin 2022, les diplomates en poste à Kinshasa se livrent à une sorte de passe d'armes qui se révèle gênante pour l'opinion avisée.

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En effet, pendant que les Congolais attendent leur activisme sur le terrain des infrastructures de développement, les cinq pays membres du Conseil de sécurité de l'Onu se lancent dans un débat " pédagogique " sur le fonctionnement de leur organe.

On sait, à ce propos, que 3 des 5 pays membres permanents ont voté pour la prorogation de l'embargo, 2 pour l'abstention.

Dans le langage diplomatique, le fait de n'avoir pas utilisé le droit de veto, même si on s'est abstenu, revient à dire non, fait valoir un ambassadeur s'exprimant à titre individuel et qui, on ne sait pas trop pourquoi, s'époumone à convaincre les Congolais que l'embargo concerne uniquement les groupes armés et non le Gouvernement congolais soumis seulement à la certification de la traçabilité. Soit.

Comment font cependant ces groupes pour se procurer alors les armes ?

L'histoire aligne des preuves de fournitures d'armes de guerre à des organisations insurrectionnelles par certains pays membres du Conseil de sécurité de l'Onu. Pour ne pas citer les organisations de l'Amérique latine, du Moyen et du Proche Orient, l'Afrique a eu notamment, ses Unita en Angola et Fpr au Rwanda.

Ceux qui opèrent sur le territoire congolais savent, eux, qui les approvisionnent. Ils ne convaincront personne qu'ils ne se fournissent qu'en rachetant des armes destinées aux Fardc ou en ramassant celles abandonnées sur le terrain des affrontements par les éléments des forces gouvernementales.

Quand bien même ces dérapages déplorables se produisent, une chose est au moins vraie : on ne fait pas la guerre avec des armes de récupération, et encore une guerre s'étendant sur plusieurs années.

Ainsi, l'essentiel des armes des groupes armés s'obtient des canaux officiels qui doivent nécessairement être des Etats et/ou des structures reconnues par des Etats.

En d'autres mots, des Etats sont les premiers et principaux fournisseurs des groupes armés.

Au regard de cette évidence, il y a lieu de s'interroger sur ce qui a tout d'une discrimination dans le chef de la communauté internationale.

En effet :

- de la RDC, est exigée la certification de la traçabilité des armes qu'elle entend acheter au motif de la levée de l'embargo. La conséquence est que si une arme tombe entre les mains du M23, on sait vite en identifier le détenteur initial,

- du Rwanda, par contre, cette certification n'est pas exigée, si bien que si une arme non-tracée se retrouve entre les mains du M23, on ne sait pas engager la responsabilité de ce pays.

Voilà ce qui rend sans effet l'embargo appliqué aux groupes armés.

Le moment de songer à une industrie nationale d'armement

Pourtant, depuis trentaine d'année qu'elle est sous embargo, et en dépit de très bonnes raisons qu'elle peut avoir de rendre coup pour coup, la RDC n'entretient aucun groupe armé pour attaquer ses voisins.

Curieusement, c'est ce pays qu'on met sous embargo tantôt durci, tantôt allégé, tantôt levé mais, soumis à la certification de la traçabilité !

Devant l'obsession de plusieurs pays membres du Conseil de sécurité de l'Onu à consolider son affaiblissement depuis 1990, la RDC ne doit pas traiter la question d'embargo avec légèreté.

Elle est obligée de l'admettre : la sécurité de tout pays est tributaire de la capacité de son armée, de sa police et de ses services des renseignements de disposer et de savoir manier l'arme létale en temps de paix ou de guerre.

Partant, tout Etat, fut-il voisin ou ami, ou toute institution communautaire dont elle est membre ou pas, qui initie ou cautionne toute forme d'embargo sur elle doit être considéré pour ce qu'il (elle) est, entendez un Anti-Congo.

Hier, l'embargo s'est appliqué aux infrastructures de développement, aux investissements industriels et à l'armement.

Demain, ça peut être pire.

A quelque chose malheur étant bon, le moment est indiqué pour la RDC - si elle veut (sur)vivre comme Etat indépendant et libre - de mettre à profit cette épreuve en commençant à développer, elle aussi, son industrie d'armement.

Bon nombre de pays autrefois du " Tiers-monde " à l'avoir fait sont aujourd'hui respectés.

Des embargos leur imposés, ils en ont fait des opportunités leur garantissant l'autonomie.

Et dès lors qu'aucune loi en droit national ou international ne l'interdit, la balle est dans le camp des Congolais.

Fardc, Pnc, Anr, Demiap, Inpp, Universitaires, Etudiants, Investisseurs, Forgerons,... au boulot !

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