Cote d'Ivoire: Pr Amoa urbain (recteur de l'université Charles Louis de Montesquieu) - " J'adhère au RHDP pour accompagner un bâtisseur "

22 Juillet 2022
interview

Le samedi 21 mai 2022, lors d'une cérémonie à Damé, dans le département d'Agnibilékrou, sur les terres de ses ancêtres, à l'Est de la Côte d'Ivoire, Pr Amoa Urbain, recteur de l'Université Charles Louis de Montesquieu, a adhéré officiellement au Rhdp. Dans cette interview, l'universitaire de haut vol et homme de gauche dit avoir opéré le choix du développement et de la culture. Entretien !

Le Patriote : Quelle plus-value l'édition 2022 va-t-elle apporter au Festirois ?

Pr Amoa Urbain : Nous revenons, après 2014, date de la tenue de la dernière édition parrainée par M. N'golo Coulibaly, alors Médiateur de la République. L'un des éléments forts qui apparaissent comme une plus-value, c'est que nous avons été heureux de voir le Président de la République, Alassane Ouattara, réunir ses frères Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo autour de lui. Là encore, le spirituel précède le réel. C'est justement parce que les prières ont préparé cette rencontre, c'est pour cela qu'elle a pu avoir lieu. Tristement, nous nous rappelons que tous sont passés par l'Hôtel du Golf. Cette édition du Festirois fait sa rentrée à partir de l'Hôtel du Golf.

LP : Quelle est la symbolique de l'Hôtel du Golf ?

Pr AU : La symbolique est que, dans nombre de pays, vous entendrez dire " les trois glorieuses ", " le 14 février ", l'hôtel du 11 mars ", etc. Pour nous, la symbolique, c'est la libération de la Côte d'Ivoire à partir de l'Hôtel du Golf. On a tous eu mal de voir ce qui s'est passé là-bas. L'hôtel même a été touché, au point que beaucoup d'Ivoiriens refusent de fréquenter ce réceptif hôtelier. Il nous appartient donc de purifier cet espace. Et c'est pour cela que nous croyons fermement que les chefs traditionnels, les guides spirituels du village d'Anono, les scouts viendront faire un rituel de célébration. L'Hôtel du Golf est un rappel, bon ou mauvais, de notre histoire. Nous espérions que d'autres voix le feraient.

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Mais, en tant qu'université, nous sommes en mission. Et le président Alassane Ouattara, vous comprendrez plus tard pourquoi j'ai adhéré au Rhdp comme militant, nous a donné trois pieds. Le premier pied, c'est quand il a repris l'université en main. En célébrant l'université, il nous a dit : " (ndlr, Il nous montre une photo sur laquelle le chef de l'Etat le félicite en sa qualité de recteur de l'Université Charles Louis de Montesquieu, lors d'une cérémonie de célébration des universités, publiques et privées de Côte d'Ivoire) " Je voudrais une université nouvelle ".

Cela donne à réfléchir au monde académique. Ce n'est pas une nouvelle université que le chef de l'Etat veut, mais " une Université nouvelle ", c'est-à-dire une université refaite qui prenne en compte, non pas les valeurs qu'on enseigne dans l'univers académique, mais, qui s'interroge sur la cité pour orienter cette dernière.

Pour moi, ce premier élément m'interpelle. C'est donc dans la droite ligne de cette université nouvelle que s'inscrit l'Université Charles Louis de Montesquieu qui contribue au renforcement des capacités, à la valorisation des compétences et de l'expérience.

La deuxième instruction qu'Alassane Ouattara nous a donnée, qu'on n'a peut-être pas entendue, c'est qu'il parle d'un " Ivoirien nouveau ", c'est-à-dire un Ivoirien tissé par sa propre culture, cultivé au sens de la culture ancienne, un homme imbibé de nos valeurs ancestrales et également au sens de la culture moderne. L'Ivoirien nouveau doit s'imprégner des Objectifs de développement durable (ODD). L'Ivoirien nouveau doit s'imprégner de tout ce qu'il y a comme révolution numérique, d'ailleurs, les réseaux sociaux le montrent.

Donc, l'Ivoirien nouveau, c'est cet Ivoirien qui connait sa culture, qui est tissé de sa culture ancestrale et celle de la modernité et métissé par la culture des autres. Que ce soit quelqu'un de la Cedeao, de l'Afrique et du monde entier, donc, quelqu'un qui est ouvert.

Alors donc, quand vous prenez l'Ivoirien nouveau et l'Université nouvelle, l'équation est trouvée. Le tout donne une Côte d'Ivoire nouvelle, c'est-à-dire une Côte d'Ivoire prenant en compte les trois phases d'un certain M. Alassane Ouattara.

Donc, quand on récapitule, la 1ère phase, c'est Alassane Ouattara le redresseur de la Côte d'Ivoire des années de sa primature. Deuxième phase, c'est Alassane Ouattara le conquérant. Il nous a démontré que, s'il est convaincu de sa bataille, de sa lutte, Si vous n'y adhérez pas, lui est sûr de sa victoire.

La troisième dimension de l'homme que nous sommes en train de voir, c'est Alassane Ouattara le bâtisseur, le continuateur de l'œuvre d'Houphouët-Boigny, celui qui donne envie d'être sur les routes, qui donne envie de vivre dans un univers, bien évidemment, nous n'avons pas encore atteint le summum de sa marche, mais, ce que nous voyons déjà à travers les infrastructures, à travers sa volonté, nous édifie.

LP : Cela a-t-il un lien avec votre choix politique ?

Pr AU : C'est la raison pour laquelle j'ai volontairement adhéré au Rhdp.

LP : Une rétrospective nous ramène en 2008 où au sortir de l'édition de votre festival, vous êtes entendu par les Renseignement généraux !

Pr AU : C'est très simple. Nous sommes en 2008-2009. Le pouvoir en place avait quelques appréhensions par rapport à la volonté de conquête du pouvoir par M. Alassane Ouattara.

Moi, ma conviction a toujours été que c'est le culturel qui peut souder la Côte d'Ivoire avec ses clivages. Et je marche, volontairement, à cette époque, sur les traces de M. Alassane Ouattara. C'est là où les gens ne me comprennent pas. Je n'ai pas besoin d'être aux côtés de M. Ouattara pour lire sa vision et mener mon action. Je ne fais aucun calcul de retombées matérielles.

J'ai senti qu'el était porteur d'une vision et je décide de lancer le festival sur ses traces en passant par Dabou, quand j'étais au Lycée moderne de Dabou, je voyais la famille de M. Ouattara dans cette ville. Nous sommes allés à Mopoyem, le village de Harris Mémel Fotêh ; nous sommes allés à Yamoussoukro. En 2009, M. Ouattara a décidé de parrainer l'édition. Nous avons franchi les barrières de la Côte d'Ivoire, rompues par la crise et nous sommes allés jusqu'à Kong où j'ai été fait Prince honoraire avec le nom de " Bassidi Ouattara 2 ".

Mon rôle, pour la génération que je représente, je ne peux plus voir toutes ces sommités de la culture : Zadi Zaourou, Jean Adiaffi, Bernard Dadié... donc, je suis une transition. J'estime que mon action, en créant cette université qui porte le Festirois, est d'apporter une plus-value à la marche de la nation. C'est pour cela le festival est allé d'Abidjan à Kong, en passant par Dabou et Yamoussoukro.

Effectivement, j'ai été interpellé par les services des Renseignements généraux de cette époque, d'une autre gouvernance. Ce que je n'ai pas compris d'ailleurs ! Heureusement que le Commissaire chargé de l'interrogatoire était d'un très haut niveau. " Professeur, nous avons reçu l'ordre de venir... " Je leur ai montré toutes les réalisations effectuées dans le cadre du festival depuis 2003.

Et quand il retrouve tout cela, il me dit : " Ah ! On nous a dit que vous envoyez le festival à Kong (Ndlr : une vingtaine de rois, chefs et universitaires d'ici, de l'Afrique et d'ailleurs) pour faire la campagne de M. Ouattara ! "

Et c'est ce que certaines personnes autour du président ne savent pas entre ce que nous faisons et la politique du président Ouattara. Un homme politique donne sa vision, chacun selon son domaine de compétences illustre cette vision pour aller vers la convergence.

Moi, je demeure intellectuel, j'ai enseigné à mes étudiants qu'il faut savoir faire, en toute chose, la thèse et l'antithèse. Je considère que le pouvoir en place est toujours la thèse, il m'appartient d'être l'antithèse, pour aller vers la synthèse et l'équilibre.

En réalité, je n'ai pas changé. Notre rôle à nous, en tant qu'universitaires, c'est d'être, par endroits, des antithèses du système en place. On a vu cela avec Jean-Paul Sartre. En posant un tel acte avec le Festival, je voulais faire savoir que la culture peut servir de trait d'union.

Voilà ce qui est de la parenthèse de mon audition. On m'aurait arrêté, tranquillement, mais le commissaire étant d'un très haut niveau, a vu la réalité des faits et l'a qualifié d'événement mineur.

LP : Pourquoi vous adhérez au Rhdp ?

Pr AU : Quand on parle d'Amoa Urbain, tout de suite, on dit que c'est un opposant, mais, l'homme est caractérisé par plusieurs mouvements de la vie. En étant dans un parti d'opposition, en étant leader d'opinion, j'ai adopté la thèse et l'antithèse. Plus tard, l'antithèse, donc l'opposition, est arrivée au pouvoir. Là encore, j'ai été dans la thèse, c'est-à-dire même quand le pouvoir-opposition était aux affaires.

Plus tard encore, nous voyons cette position du Président Alassane Ouattara, il connaissait mes positions, les actes que j'ai posés pour dire que je n'étais pas d'accord. Mais, quand vous regardez quatre ou cinq personnes marcher, il y a deux attitudes au moins qui se dégagent. Ou bien, vous faites la synthèse de la qualité positive de marche, ou bien vous choisissez de suivre la marche.

LP : Comment jugez-vous la gouvernance Ouattara, au-delà du leader politique ?

Pr AU : En l'état actuel des choses, j'ai déterminé trois axes ou les trois pieds de l'action du Président Alassane Ouattara : Alassane Ouattara le redresseur que nous avons admiré parce qu'il était venu pour accompagner un programme économique en Côte d'Ivoire.

L'axe 2, c'est Alassane Ouattara le conquérant. A ce niveau, nous l'avons combattu avec force et détermination, pour dire que je n'étais pas d'accord avec lui. L'axe 3, c'est le bâtisseur. Là, nous avons décidé de l'accompagner et agir avec lui positivement, ce, en prenant appui sur les trois pieds : l'Ivoirien nouveau, la Côte d'Ivoire nouvelle et l'Université nouvelle qui est mon champ de prédilection. Le Président Ouattara est un conquérant, un bâtisseur ; voilà le sens de mon engagement volontaire au Rhdp.

LP : Comment s'est faite votre adhésion ?

Pr AU : C'est à partir de mon village natal, à Damé, sur les terres de mes ancêtres que j'ai déclaré et matérialisé mon adhésion au Rhdp. Cela, pour dire que je rennais pour accompagner un bâtisseur. Je ne renais pas pour aller quémander ! Parce que, je renais, après une analyse sciatique, objective, j'ai apprécié les trois phases du Président Ouattara.

Je l'ai combattu quand il le fallait, selon moi, et le chef de l'Etat aime ceux qui osent. J'admire le bâtisseur qui permet que nous allions à un consensus à l'Assemblée nationale, à une rencontre du président au pouvoir et ses deux prédécesseurs.

Je suis convaincu que tout autre leader n'aurait pas accepté que le Président Ouattara ait pu être invité à une telle rencontre, on se connait dans ce pays. Donc, quand quelqu'un est en train d'avancer de cette façon, l'humilité aurait voulu que nous accompagnions ce qui est bon, dans l'intérêt de la nation.

LP : Vous adhérez au Rhdp, maintenant, pour quel rôle ?

Pr AU : Je suis un militant de base à Damé ! Dès cet instant, je m'aligne et j'observe la discipline du parti. Je ne sauterai aucune étape. Je ne mènerai aucune action sans que je ne passe par le responsable de section de Damé, qui s'adresse à son supérieur hiérarchique au niveau d'Agnibilékrou et de la région. En attendant que mes responsables me présentent aux autorités, je suis déjà au travail. Ce serait trop tôt pour moi de juger la marche du parti.

LP : Que répondez-vous à ceux qui vous taxent de " venir au restaurant ", maintenant que le parti est au pouvoir ?

Pr AU : Je n'emploierai jamais ce concept. Ceux qui l'utilisent ont leurs raisons. C'est un jargon qui est en dessous de là où je me place. Pour aller là où ils indiquent par ce mot, je n'avais pas besoins d'adhérer au Rhdp. Je suis Prince honoraire de Kong, je suis baptisé " Bassidi Ouattara 2 ". L'une des personnalités ayant cru en nos actions, c'est le président Ouattara lui-même qui a dit, en 2009 : " si j'arrive aux affaires, mon jeune frère Amoa Urbain, j'appuierai ce que vous faites, je créerai une Chambre ". Et il l'a fait ! Aujourd'hui, il a octroyé un statut constitutionnel aux rois et chefs, il a créé une Chambre pour eux qui est une institution.

L'un des organisateurs de l'étape du festival à Kong, Ferké, c'est l'actuel ministre d'Etat, ministre de la Défense, M. Birahima Ouattara, qui a accueilli le Festirois (Ndlr : avec les rois Félix N'tom du Cameroun ; Adjahouto Dôdô du bénin ; Lawson 1er du Togo ; Pr Pacéré Titinga du Burkina Faso et une vingtaine de rois et chefs de Côte d'Ivoire) avec toute l'élégance qu'on lui connait. Il nous a accompagné jusqu'à la fin du festival.

Donc, mes relations interpersonnelles auraient permis que je n'aille pas eu Rhdp pour bénéficier des largesses du chef de l'Etat ou du ministre d'Etat M. Ibrahim Ouattara. Si certains vont au parti pour ce que vous évoquiez, c'est leur choix. Moi j'y vais, au regard des trois cycles du président Ouattara que j'ai précédemment déterminés.

Il est le bâtisseur, chacun à ses côtés doit prendre son seau d'eau pour l'aider à continuer l'œuvre. Et moi je suis fier d'avoir fait ce choix avec conviction.

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