La non fréquentation et le manque de visibilité du village artisanal de Rufisque sont durement vécus par les pensionnaires. En attendant de voir d'éventuels visiteurs et des conditions de travail meilleures, ils travaillent sur commande. Pour l'heure, aucune coalition politique n'est passée sur le site pour les voir.
Casquette bien vissée sur la tête, la mine sérieuse, Demba frappe lourdement sur le pan de bois rouge qu'il tient avec sa main gauche. De temps à autre, quelques fagots de bois tombent au sol. Pensionnaire du village artisanal de Rufisque, Demba est sculpteur de métier. Mais comme beaucoup d'acteurs qui évoluent dans ce centre, il vit des heures difficiles. " Le travail ne marche pas ici. Il n'y a pas de visiteurs ", fait-il savoir. Une fois son travail terminé, Demba est obligé d'écouler ses produits à l'extérieur. Parfois, il travaille sur commande.
C'est aussi le cas de son collègue tapissier, Chérif Assane. En bon " baye fall ", ce dernier est en plein dans son travail " door waar ". Un grand collier de perles autour du cou, bonnet noir nouant ses grosses mèches, le bonhomme a vécu des moments plus heureux. " On est toujours là à faire le travail, mais je dois avouer qu'on travaille plus sur commande qu'à exposer nos produits pour la vente ", reconnait l'artisan. La non fréquentation du village est unanimement décriée par les pensionnaires.
Pour avoir passé plus d'une vingtaine d'années dans ce village, le tailleur Cheikh Baba Ndiaye en sait quelque chose. " Ce village ressemble plus à un cimetière qu'à autre chose. Quand vous parlez du village artisanal de Rufisque, les gens pensent à Soumbédioune. La plupart des Rufisquois ne connaissent pas le site. C'est regrettable ", déplore cet homme.
Coincé entre le foirail de Rufisque et les chemins de fer, le village artisanal vit dans un parfait anonymat. Rarement des manifestations y sont organisées. Il n'est pas un lieu de fréquentation pour les visiteurs. " Ce travail de publicité du village incombe à nos responsables, mais on dirait que cela ne les intéresse guère ", accuse Cheik Baba Ndiaye qui déplore le laisser-aller qui existe dans le site. " Si on organisait des foires ici, peut-être que les gens vont commencer à venir ici ", estime Cheikh Baba Ndiaye.
Madiagne Sarr Ndiaye qui s'active dans la cordonnerie est dépité. Comme beaucoup de ses camardes, il passe ses journées sous l'ombre d'un arbre. Mais il souhaite que les choses bougent. " Les gens sont laissés à eux-mêmes. Il ne reste qu'à réagir pour donner à ce village une certaine vie ", dit-il. Le soutien des autorités et surtout des mairies du département est attendu.