Gabon: Jean Christophe Owono Nguema "La Seeg elle-même, n'a pas fait ce qu'il fallait comme investissement pour optimiser son outil de production"

27 Juillet 2022

Dans un libre propos, l'ancien Sénateur Jean Christophe Owono Nguema appelle toutes les parties prenantes à se ressaisir, pour endiguer définitivement le phénomène d'interruption de fourniture en eau et en électricité les villes d'Oyem, Bitam dans la Province du Woleu-Ntem et Ovang dans la province sœur de l'Ogooué Ivindo.

Mesdames et Messieurs de la Presse,

Depuis près d'un mois, les villes d'Oyem, Bitam dans la Province du Woleu-Ntem et Ovang dans la province sœur de l'Ogooué Ivindo, connaissent une alimentation irrégulière en électricité et en eau, inconnue des populations qui y vivent depuis des lustres.

Fait sans précédent depuis 1961, année d'électrification de la ville d'Oyem et 1963 pour celle de la ville de Bitam, un Directeur Régional de la Société d'Energie et d'Eau du Gabon (Seeg), a cru bon de devoir arrêter toutes fournitures des services d'électricité et d'eau pendant plusieurs jours, sans autre forme de procès.

Il viendra l'annoncer tout bonne à la population de la manière la plus laconique qui soit, avec la vague promesse " d'un retour à la normale dans les meilleurs délais ". Sans à aucun moment, tenir compte du risque de trouble à l'ordre publique que créerait une telle initiative, dans une Province réputée " frondeuse ".

Tout ceci se produit sous le regard bienveillant du gouvernement. Sans qu'à aucun moment, celui-ci ne rappelle à la Seeg, son obligation de Résultat dans la gestion de la concession de service public de l'eau et de l'électricité que lui a octroyée l'Etat.

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La Première Ministre, ne trouve pas encore le temps, pour se pencher sur une question aussi cruciale pour la sécurité physique, sanitaire et alimentaire pour les habitants des localités concernées. Près de 150 000 âmes. N'est-elle pas responsable du décès de notre fille et de son enfant survenu à l'hôpital Canadien d'Oyem suite aux coupures intempestives d'électricité dans une structure aussi vitale qui se retrouve sans groupe de secours.

L'administration et les entreprises ne pouvant plus fonctionner, ou au plan des liens sociaux distendus, par la difficulté de pouvoir téléphoner à un membre de sa famille ou à un ami. Dans cette indécision de la Cheffe du Gouvernement, son ministre de l'Energie, a cru réunir les dirigeants de la Seeg. Cette rencontre n'accouchera qu' " un sauve qui peut ", en guise de solution pérenne, pour mettre un terme à cette situation dramatique.

Les responsables du secteur énergétique gabonais, à cette occasion ont tout simplement filé " la patate chaude " au ministère du Pétrole. Le post publié par le Ministre de l'Energie dans les réseaux sociaux, en son nom, impute la situation actuelle au ministère du Pétrole qui serait incapable via la société gabonaise de raffinage (Sogara), d'alimenter le marché national en produits pétroliers. Pendant ce temps, les ministres originaires du Woleu-Ntem, ont été signalés durant le week-end écoulé à Oyem et à Bitam, pour se livrer à des activités politiques politiciennes dans l'obscurité la plus totale. Un bel exemple de cohésion et de solidarité gouvernementale.

Au regard de ces batailles de cours de récréations, la vérité est que le gouvernement a choisi de laisser pourrir une situation qui aurait pu être explosive. Laissant aux autorités locales que je loue l'action, le soin de se débrouiller comme elles peuvent, pour calmer les tensions.

La question est de savoir dans quel intérêt ? Quel est le but visé en accentuant autant, la pression du joug autour du coup des Woleu-Ntemois ? Cette population fait face déjà, à l'insécurité sans que les forces de l'ordre ne s'en préoccupent. Du racket quotidien par les mêmes éléments de la force publique. D'un chômage endémique. De l'absence des soins de santé. Bref des privations de toutes les libertés fondamentales politiques, économiques et sociales auxquelles elle a droit au nom de la Constitution de notre pays le Gabon. Dans son préambule faut-il le rappeler à nos gouvernants, elle renvoie à la Déclaration universelle des droits de l'Homme.

Cette situation, il faut le craindre, ne trouvera pas d'issue avec ce pouvoir. Ce qu'il faut faire n'est tout simplement pas compatible avec une politique assumée de détournement de fonds publics. J'ai été député et sénateur, je sais de quoi je parle.

En 2015, dans son Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE), le pouvoir PDG, avait promis la construction de six barrages pour renforcer nos capacités de production d'énergie de près 650 Mégawatts. Parmi lesquels, le barrage FeII sur la rivière l'Okano à Mitzic. 7 ans après rien n'a été fait. Ce n'est pas l'argent qui a manqué. Nos ressources budgétaires ont frôlé 22000 milliards de Fcfa sur cette même période. Ne pouvait-on pas dégager sur cette masse 1500 milliards de Fcfa sur une telle manne, pour construire les six ouvrages ?

De même, la Société gabonaise de raffinage (Sogara), à qui revient de couvrir la demande nationale en produits pétroliers, n'est plus en mesure de le faire. Il faut une raffinerie capable de traiter près de 10 millions de barils de pétrole par an. La Sogara n'a qu'une capacité de 1 millions de barils par an. Le projet de nouvelle raffinerie également contenu dans le PSGE n'ayant pas aussi abouti.

L'entreprise doit recourir aux importations en produits raffinés sur le marché international. Or, il faut payer cash les " traders pétroliers internationaux ", avant qu'ils ne consentent à vous livrer les précieux liquides. Sogara mal gérée à cause des détournements qui s'y opèrent, n'a toujours pas les moyens pour intervenir sur ce marché. D'où de nombreuses interruptions de fourniture de produits pétroliers. Le pire est à craindre.

La Seeg elle-même, n'a pas fait ce qu'il fallait comme investissement pour optimiser son outil de production. C'est ainsi qu'il n'existe pas d'interconnexion entre les différent RIC de production d'électricité au plan national. Les zones excédentaires en énergie, ne peuvent pas pallier à celles déficitaires dans un tel schéma.

La Seeg préfère mettre ses ressources, elles sont importes - 220 milliards de Fcfa de chiffres d'affaires annuelle en moyenne-, dans des projets funestes sans aucun rapport avec son objet social. A l'exemple de cet immeuble de la SNBG à Libreville, que la Seeg a voulu acheter au prix de 8 milliards de Fcfa, alors qu'elle valait 4 milliards de Fcfa selon les spécialistes. Cette opération a été initiée à la demande de qui vous savez.

Bref, le niveau requis des investissements pour avoir un service de qualité et efficient, n'a pas été atteint par le Seeg. Dans son rapport d'activité pour l'année 2021, la société n'a consacré que 27 milliards de Fcfa aux investissements (12% de son chiffre d'affaires), contre 40 milliards de Fcfa en charges salariales (20% du chiffre d'affaires). Cette dichotomie en dit long sur les priorités de cette entreprise publique.

J'appelle donc, toutes les parties prenantes à se ressaisir, pour endiguer définitivement ce phénomène d'interruption de fourniture en eau et en électricité. Outre qu'il fait du Gabon la risée du monde au-delà de ses frontières, il occasionne des nuisances à la population pouvant conduire à la mort. A moins que le génocide des habitants du Woleu-Ntem, devienne un nouvel objectif politique du pouvoir.

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