Tunisie: Réformes structurelles - Parer à l'urgence économique pour éviter le pire

5 Août 2022

Selon les simulations de l'Ocde , la stabilisation de la dette publique et sa mise sur une trajectoire ascendante passent, si les réformes structurelles sont correctement mises en œuvre, par la génération d'un léger excédent primaire (0,3% du PIB) d'ici le milieu de la décennie.

Il faut sauver l'économie tunisienne : il n'y a pas d'autres mots pour décrire la situation économique. Le redressement de l'économie nationale passe forcément par la mise en œuvre des réformes structurelles, toujours en suspens. Il va sans dire que la succession des chocs exogènes a mis à rude épreuve une économie essoufflée, au terme de dix années de croissance atone.

Peser lourd sur les finances publiques

Le choc de la guerre en Ukraine, qui a entraîné une hausse durable des prix des matières premières, continue de peser sur les finances publiques qui ont connu d'importants dérapages depuis plusieurs années. Rien que pour les dépenses au titre des subventions de l'énergie, les besoins en financements pour le rééquilibrage de la balance énergétique ont grimpé de 5.200 millions de dinars à 10.200 millions de dinars.

Les risques d'un défaut de paiement ou de l'engagement d'un processus de rééchelonnement de la dette n'ont jamais été aussi réels. "Avec un déficit budgétaire de près de 10%, l'une des masses salariales du secteur public les plus élevés au monde, la Tunisie est le pays africain le plus à risque de faire défaut sur sa dette", a prévenu la Banque américaine Morgan Stanley dans un rapport récent.

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En mars dernier, la banque américaine indiquait que "dans un scénario où la détérioration budgétaire se poursuit, il est probable que la Tunisie fasse défaut sur sa dette, l'année prochaine, à moins qu'elle ne parvienne à conclure un programme avec le FMI et procède à d'importantes réductions des dépenses".

S'inscrivant dans la même veine, la récente publication de l'AFD MacroDev Flash, intitulée " La Tunisie à l'heure des réformes : d'une négociation complexe avec le FMI à un impératif de résultats ", souligne que " les incertitudes sur la capacité de la Tunisie à honorer les échéances sur sa dette externe sont croissantes ", ajoutant qu'une restructuration de la dette ne peut être exclue pour restaurer la soutenabilité des finances publiques même s'il ne s'agit pas pour l'heure d'un scénario central. " Les modalités d'un éventuel traitement de dette resteraient largement à définir, alors que la Tunisie n'est pas éligible au Cadre commun de traitement de la dette", explique le rapport.

Générer un léger excédent primaire

Les réformes structurelles sont ainsi la clé pour restaurer la stabilité macroéconomique et celle de la dette publique, bien que, dans un contexte de ralentissement de l'activité économique, d'augmentation des besoins de financements externes et d'exposition de la dette au risque de change, "la faisabilité d'une inflexion de la trajectoire d'endettement pose problème", souligne la publication de l'AFD.

D'ailleurs, selon les simulations de l'Ocde , la stabilisation de la dette publique et sa mise sur une trajectoire ascendante passent, si les réformes structurelles sont correctement mises en oeuvre, par la génération d'un léger excédent primaire (0,3% du PIB) d'ici le milieu de la décennie. La nécessité de rationaliser les dépenses de gestion de l'Etat n'est plus à démontrer.

Une entreprise difficile

A en croire le communiqué qui a été publié, le 18 juillet à l'issue d'une mission réalisée par les services du FMI en Tunisie, les réformes structurelles dont le programme a été dévoilé par le gouvernement au mois de juin dernier, auraient été mises sur orbite. " Des progrès considérables sont faits par les autorités concernant leurs objectifs économiques et une bonne coordination se dégage entre les ministères et les organismes autour d'une vision commune qui est saine. Il convient à présent d' accélérer la mise en œuvre de cet agenda ", précise le communiqué.

L'institution financière a ajouté que "les autorités tunisiennes et les services du FMI ont réalisé des progrès satisfaisants concernant les paramètres des politiques et réformes économiques des autorités qu'encadrera un programme appuyé par le FMI. Les discussions se poursuivront au cours des prochaines semaines".

Plusieurs observateurs se sont, d'ailleurs, félicités de la déclaration des équipes des services du FMI, estimant que la conclusion d'un accord avec le FMI est probable dans les mois à venir et augurant que la situation pourrait commencer à se décanter. Et c'est dans ce cadre que l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica) a salué l'avancée des négociations entre la Tunisie et le FMI, tout en appelant le gouvernement à engager rapidement les réformes socioéconomiques et financières structurelles.

Mais même si la Tunisie parvient à conclure un accord avec le FMI, et à mobiliser des financements auprès de ses créanciers, parviendra-t-elle à remettre l'économie sur les rails et à infléchir la trajectoire de la dette ? Selon les experts et les observateurs, l'entreprise s'annonce difficile d'autant plus que les perspectives économiques mondiales s'assombrissent.

"Quand bien même un accord serait prochainement trouvé et un programme avec le FMI signé, la capacité de ce dernier à restaurer rapidement et durablement le cadre macroéconomique et la soutenabilité de la dette publique interroge face à l'ampleur de la tâche et aux faibles performances des précédents programmes", précise la publication de l'AFD.

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