L’affaire des 49 militaires ivoiriens interpellés le dimanche 10 juillet 2022 à l’aéroport international Modibo Kéita de Senou, à Bamako par les autorités maliennes, continue de faire des vagues entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Les réactions s’amplifient avec leur inculpation le 13 août 2022 au Mali. « Les 49 militaires ivoiriens ont été inculpés vendredi pour tentative d’atteinte à la sûreté de l’état et mis sous mandat de dépôt. Avant d’être écroués ». Rapporte l’Afp dans une de ses dépêches.
Alors que des observateurs très au fait de la diplomation régionale et le bon voisinage pensaient que le dialogue et la négociation fermeraient la parenthèse de cette affaire militaire. Malgré tout et en dépit de certains va- en- guerre, sur les réseaux sociaux, le ton des politiques en Côte d’Ivoire, est à l’apaisement et à l’appel au dialogue : Le « Djenkafo » comme on le dirait au Mali.
Au cours de son message à la nation, le 06 août 2022, à la faveur de la célébration des 62 ans de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, le Président Alassane Ouattara est revenu sur l’engagement des militaires ivoiriens sur les théâtres d’opérations militaires en Afrique. Il a annoncé que « ce sont plus de 850 soldats ivoiriens qui risquent quotidiennement leur vie pour restaurer la paix et la sécurité au Mali et ceci depuis 2013 dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. » A sa suite, c’est Joel N’guessan, cadre du Rhdp(formation politique de Ouattara), qui invite à l’apaisement. Dans une déclaration parvenue à la presse, M. N’Guessan se demande donc « alors comment comprendre que les autorités maliennes se focalisent sur nos 49 soldats (en mission officielle) au risque de mettre à mal durablement, les relations entre nos deux États et créer des tensions inutiles entre les populations ivoiriennes et maliennes qui vivent en parfaite harmonie en Côte d’Ivoire. J’encourage toutes les médiations politiques et diplomatiques actuellement en cours pour trouver une issue heureuse à cette inutile crise entre la Côte d’Ivoire et le Mali. »
Car pour lui, « (…) vivent sur le sol ivoirien, plus de 2 millions 500 mille de nos frères originaires du Mali. Ils se sont établis en Côte d’Ivoire et prospèrent économiquement, financièrement, socialement, culturellement et religieusement sans que surviennent des tensions entre nos deux peuples. D’ailleurs, je fais remarquer qu’ils se sentent plus ivoiriens que maliens, car eux et leurs familles sont en Côte d’Ivoire depuis au moins 70 ans » Sans oublier que les pays sont interdépendants en ce qui concerne la fourniture d’électricité, l’approvisionnement en carburants (pétrole et gaz), la livraison d’ovins et caprins. Les ports d’Abidjan et de San Pedro en Côte d’Ivoire sont les meilleurs partenaires des opérateurs économiques du Mali.
Embouchant la trompette de la négociation et du dialogue, d’autres voix s’élèvent pour étouffer les échauffements au sein de la population, surtout au niveau des jeunes. Qui ont fait capoter le week-end de l’assomption, un concert d’artistes maliens qui voulaient prestés ont été contraints de reporter à une date ultérieure leur concert, compte tenu du mécontentement qui commence à grandir au niveau des populations ivoiriennes.
Danièle Boni-Claverie, Présidente de l’Urd, pour sa part, invite le Président Ouattara à mettre tout en œuvre pour le retour des 49 militaires ivoiriens en prison au Mali. « Cette affaire militaire relevant d’un domaine hautement sensible doit nous pousser, nous, opposition et société civile, à être extrêmement prudents et réservés. Il y a des usages. Lorsque son pays est attaqué et l’image de la Côte d’Ivoire est fortement entamée par les accusations portées contre elle une union sacrée, ponctuelle se met en place et amène l’ensemble des forces politiques à adopter une position commune. Pour se faire, il aurait été souhaitable que le Pouvoir initie une rencontre d’information avec les responsables des partis de l’opposition, échanges dont la confidentialité aurait été assurée, ce que ne peut garantir un débat parlementaire » Préconise-t-elle.
Qui mieux qu’un militaire pourrait éclairer en partie, la lanterne des ivoiriens. Le Général à la retraite Michel Gueu, ancien cadre de l’ex- rébellion ivoirienne ne dit pas autre chose. Il demande aux ivoiriens, d’aller à l’essentiel. Face à l’évolution de ce feuilleton qui n’a pas fini de livrer tous ses secrets, il sur un ton martial il dit : « Arrêtons d’être de simples imitateurs de ce qui se fait ailleurs, d’autant que la forte communauté malienne présente sur notre sol nous incite à la modération. Le sport et la culture doivent rester des terrains à préserver pour pouvoir jouer éventuellement les têtes de ponts dans l’accélération de retrouvailles entre deux pays frères » Avant d’ajouter : « Nous demandons au Président Ouattara et à son gouvernement de tout mettre en œuvre pour que nos fils reviennent à la maison et retrouvent leurs familles. La paix, l’apaisement ne sont pas de simples mantras thérapeutiques. Au pays d’Houphouët-Boigny, ils traduisent une culture et une volonté de tourner résolument le dos à l’escalade de la peur et aux tensions incontrôlables. »
Bien avant toutes ces prises de positions, l’ex- Président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, Guillaume Kigbafori Soro, est allé dans le même sens, quand il avait appelé à une « solution diplomatique négociée(…) ».Non sans ajouter dans un communiqué : « J'ai appris avec gravité l'arrestation le dimanche 10 juillet 2022 de 49 soldats ivoiriens à Bamako... J'en appelle au calme et à l'apaisement. Je demeure fermement convaincu qu'une solution diplomatique négociée est possible »