Afrique de l'Ouest: Mali/Côte d'Ivoire - Montée des enchères pour les 46 militaires détenus

Arrêtés le 10 juillet 2022, la quarantaine de militaires ivoiriens détenus à Bamako n'en finit pas d'alimenter la chronique de l'actualité. Quand on pense que le dénouement de cet imbroglio administratif, judiciaire, politique et diplomatique est proche, il y a comme un grain de sable qui vient enrailler la machine.

Dernier développement en date, l'exigence des autorités maliennes pour que des opposants politiques qui seraient réfugiés en Côte d'Ivoire soient extradés au Mali en contrepartie de la libération des 46 soldats. Et comme pour marquer leur exigence du saut de la plus haute importance, c'est ni plus ni moins un communiqué de la présidence malienne publié vendredi dernier, qui l'annonce. Colère ou tout le moins agacement perceptible à Abidjan où l'on parle à présent de " prise d'otages et de chantage " de la part de Bamako.

Faut-il en conclure que la voie de la négociation cède le pas à un bras de fer à l'issue incertaine entre le Mali et la Côte d'Ivoire? On se garde bien de toute conclusion hâtive même si dans le règlement de ce différend, il y a comme une évolution au rythme du un pas en avant deux pas en arrière.

En effet, du côté ivoirien, on a évolué de la " libération sans conditions " des militaires arrêtés, à la négociation, allant jusqu'à endosser des manquements aux procédures administratives idoines pour le déploiement de ces soldats au Mali. Pour contenter les autorités maliennes, qui voulaient des excuses et un engagement écrit, le gouvernement ivoirien a, par la voix du directeur de cabinet du président Alassane Ouattara, reconnu que "des manquements et des incompréhensions aient été à l'origine de cet événement fortement regrettable. La République de Côte d'Ivoire, soucieuse de maintenir des relations de bon voisinage avec le Mali, s'engage à respecter les procédures des Nations unies, ainsi que les nouvelles règles et dispositions maliennes édictées, relatives au déploiement des forces militaires au Mali. "

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Cette déclaration de Fidèle Sarassoro, le 3 septembre dernier à l'occasion de la libération de 3 soldates parmi les 49 militaires ivoiriens arrêtés, si ce n'est pas un mea culpa public et un engagement écrit des autorités ivoiriennes à mieux s'y prendre dans le déploiement de militaires au Mali, elle y ressemble fortement.

Abidjan fait donc profil bas dans ce dossier. Tout le contraire de Bamako qui, avec sa dernière exigence d'extradition d'opposants, donne à penser qu'il pousse le bouchon un peu loin. Pourquoi ? D'un, ce n'est pas sûr que les autorités ivoiriennes contrôlent entièrement les mouvements des 3 personnalités mises en indexe par le Mali ; de deux, lier le sort des soldats arrêtés à celui de fugitifs politiques a quelque chose d'indécent, d'inélégant ; de trois, beaucoup d'observateurs sont dubitatifs sur la thèse de mercenaires mandatés pour porter atteinte à la sûreté des institutions du Mali.

Confrontés à une insécurité chronique et à des difficultés économiques post-Covid et à la guerre en Ukraine, les pays de la CEDEAO ont besoin de relations de coopération sereines entre eux. Gare donc à la guéguerre diplomatique induite d'un nombrilisme souverainiste aigu d'où qu'elle vienne. A ce jeu, entre le Mali et la Côte d'Ivoire, la seconde ne manque pas d'arguments à opposer au premier. Si elle venait à mettre dans la balance sa fourniture d'électricité, l'accès au port d'Abidjan et les millions de Maliens qui vivent sur son sol, cela va faire mal au bon voisinage et au processus d'intégration régionale. Alors, balle à terre à Koulouba et sur la lagune Ebrié, toute la CEDEAO y gagne !

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