Burkina Faso: Damiba nouveau ministre de la Défense - Un pari politique risqué

Il faut croire qu'il n'a pas réussi à son examen. Une semaine seulement après la fin de la première évaluation de son équipe effectuée du 29 août au 5 septembre par le chef du gouvernement Albert Ouédraogo, le ministre de la Défense et des Anciens combattants a été débarqué.

Il est en effet la seule victime du réajustement ministériel entrepris le lundi 12 septembre dernier par le président Paul-Henri Sandaogo Damiba et son Premier ministre. Un peu à la surprise générale, dans la mesure où pas plus tard que le dimanche 11 septembre 2022, il avait accompagné le président à Niamey. Est-ce donc pour insuffisance de résultats que le général Simporé a été défenestré ?

Tout porte à le croire, même si dans son premier bilan d'étape fait le 4 septembre, le chef de l'Etat burkinabè s'était félicité d'avancer dans la lutte contre le terrorisme et la reconquête des parties de notre territoire occupées, quoique les résultats de ces victoires ne soient pas encore perceptibles par la majorité des Burkinabè.

Exit donc le général Simporé qui avait été appelé à ce poste par l'ancien président Roch Marc Christian Kaboré en juin 2021, après la tragédie de Solhan dans le Nord-Est du pays où 132 personnes, des civils, avaient été massacrées par des hordes barbares, selon le gouvernement, 160 selon des sources locales.

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Contre toute attente, il avait été maintenu par les putschistes du 24 janvier 2022, ce qui avait fait dire à certains qu'il a pu jouer leur jeu, quand il a engagé les pourparlers avec les soldats mutins, un mouvement d'humeur qui avait débouché sur le putsch de Sandaogo.

Plus que le départ de Simporé, l'évènement dans ce lifting gouvernemental aura, en effet, été la récupération du portefeuille par Damiba lui-même, qui a pris le soin de se flanquer d'un ministre délégué, le général Silas Keïta, jusque-là secrétaire général du ministère en charge de la Défense.

Rien de bien nouveau en fait sous le soleil du Burkina, dans la mesure où cette formule avait été expérimentée à plusieurs reprises. Sans remonter à Mathusalem, on se rappelle que ce fut le cas de Blaise Compaoré après les mutineries qui ont secoué les casernes et les populations en avril 2011.

Roch Marc Christian Kaboré qui ne voulait pas d'abord de militaires dans son gouvernement a lui aussi pris le maroquin en juin 2021, faisant de Simporé son ministre délégué avant qu'il ne soit titularisé.

Son éviction intervient alors que la situation continue de se dégrader. La vermine est même en train de se sanctuariser à Solenzo dans les Banwa, et le détachement militaire de Déou a encore été la cible d'attaque qui a fait deux morts et dix autres blessés le lundi 12 septembre dernier.

L'objectif pour le chef suprême des armées est toujours de s'impliquer davantage dans la gestion du ministère et d'avoir un œil sur (presque) tout. Sauf que le résultat n'est jamais garanti, surtout depuis que nous faisons face à un péril qui menace les fondements mêmes de l'Etat et de la Nation.

A dire vrai, le pari est même toujours politiquement risqué, car quand bien même il n'occupe pas la Défense, le premier magistrat est toujours comptable des contre-performances de son armée, surtout quand il est lui-même issu de ses rangs comme c'est le cas présentement.

De ce point de vue, quand bien même le ci-devant ministre de la Défense serait responsable de la chienlit sécuritaire dans laquelle nous pataugeons, le président Damiba est encore plus responsable que lui, puisqu'il s'est battu pour sa " chose ", est parvenu à prendre sa " chose ", parce que pensent les Burkinabè, il avait la solution clé en main de leurs problèmes.

Nous touchons du bois, mais on fait quoi maintenant si la situation ne s'améliore considérablement pas, et donc visiblement pas ?

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