Cote d'Ivoire: Passe d'armes entre MGC et PPA-CI - La guerre des Gbagbo aura bel et bien lieu

11 Septembre 2022

Camarades militants hier, compagnons de lutte politique, couple présidentiel, ils sont devenus des challengers voire des rivaux jurés aujourd'hui.

Entre pro-Laurent et pro-Simone, la guerre des Gbagbo, comme beaucoup d'observateurs s'y attendaient, a bel et bien commencé. Alors que les deux époux sont en instance de divorce conjugal - qui n'en est en réalité qu'au stade de la séparation de corps -, ils ont consommé, on peut dire entièrement, leur divorce politique, chacun des deux conjoints ayant décidé de voler de ses propres ailes.

L'un est désormais président du Parti des peuples africains Côte d'Ivoire (PPA-CI) et l'autre présidente du Mouvement des générations capables (MGC). Les deux opposants ont toutefois ceci de particulier qu'ils devront pêcher dans le même marigot politique, à savoir la gauche. " Nous sommes lancés. Et comme un flot puissant, nous atteindrons la berge de la Côte d'Ivoire nouvelle... Que vraiment nous soyons tous éternellement unis, victorieux, combatifs, entreprenants, lancés comme une vague de la mer qui déménage tout sur son passage ", avait déclaré Simone Gbagbo samedi dernier, lors du lancement officiel de sa formation politique.

Car si l'ancienne députée d'Abobo en a profité pour faire le procès du pouvoir Ouattara, elle a surtout ouvertement volé dans les plumes de ses anciens camarades restés fidèles à son mari et tenté de déconstruire toute la charpente de la nouvelle maison PPA-CI. Elle s'est ainsi proposé de mettre en mouvement toutes les générations, refusant de s'accommoder de " la dégradation des mœurs dans notre société, tout en ayant un idéal de construction d'une Côte d'Ivoire réconciliée, pleine de justice et d'équité ; une Nation ivoirienne plus forte, moderne et prospère ; une Nation ivoirienne ouverte à l'Afrique et au monde mais souveraine dans tous les domaines d'activités stratégiques ".

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Depuis, la passe d'armes entre pro-Simone et pro-Laurent est montée d'un cran. En meeting à la mi-août à Soubré, dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, Stéphane Kipré, vice-président en charge de l'implantation, n'a pas été du tout tendre à l'endroit de Simone Gbagbo qu'il a attaquée à mots voilés. " On ne crée pas un parti pour s'attaquer à un parti d'opposition. On crée un parti pour conquérir le pouvoir ", avait-il lancé. Bien entendu, ces propos s'adressaient à la présidente du MGC qu'il invite ainsi à changer de fusil d'épaule en s'attaquant directement au parti au pouvoir et non à l'opposition.

La réaction du camp Simone Gbagbo à ces propos ne s'est pas fait attendre. Dans une longue interview accordée à un quotidien de la place, Kouamé Sécré Richard, ex- baron du FPI et soutien de Simone Gbagbo, s'est voulu clair quant au choix opéré entre les deux personnalités. " Je me suis senti plus à l'aise avec la Première dame Simone Gbagbo ", avait-il déclaré, laissant ainsi sous-entendre que dans le camp Gbagbo l'air était pour le moins irrespirable et que l'avenir de la gauche était plutôt du côté du MGC. Pis, qu'au PPA-CI, certains engagements, certaines valeurs jusque-là inhérentes au socialisme étaient désormais dévoyées et de nature à semer le trouble dans certains esprits.

Le 20 août déjà, Hanny Tchelley, une autre proche de Simone Gbagbo, dans une vidéo publiée sur sa page Facebook s'en était prise, au vitriol, à l'entourage de Laurent Gbagbo, qui l'accusaient d'ingratitude vis-à-vis de l'ancien président. " Quand le Président Gbagbo venait au pouvoir, je n'étais pas une nécessiteuse. Je ne suis pas de ceux qu'il a faits. J'avais ma propre boîte qui a été montée par mon ex-patron, un Américain et sa femme pour qui je travaillais. Là-bas, j'étais la directrice de production. Je n'étais pas n'importe qui. On vous doit tout ? Même le souffle de vie qu'on respire on vous doit ça ?", s'était-elle offusquée.

Sur la toile, ces attaques entre anciens camardes sont récurrentes. Il ne se passe pas un jour sans que l'on n'enregistre une volée de bois vert d'un pro-Gbagbo contre une pro Simone et vice-versa. Ces clivages entre les camarades d'hier, en réalité, ne datent pas d'aujourd'hui. Déjà durant les dix années de règne du FPI, les clans s'étaient dessinés entre pro et anti de l'un ou l'autre des deux époux. Le fossé s'est creusé avec la perte du pouvoir et l'incarcération du natif de Gagnoa.

Dans un premier temps, la cible était Affi N'guessan. Elle s'est ensuite dirigée vers Simone Gbagbo et après Charles Blé Goudé. Alors qu'il revenait le plus logiquement du monde à Simone Gbagbo de prendre la tête du FPI des Gbagbo ou rien à la mort, le 3 novembre 2018, d'Abou Drahamane Sangaré, alors président par intérim de la frange dirigée par Laurent Gbagbo, personne n'a compris par quelle alchimie ce poste lui a échappé en sa qualité de 1ère vice-présidente.

La gestion du parti avait été confiée contre toute attente à Assoa Adou. Depuis cet épisode, la paix n'est plus revenue dans cette famille des Gbagbo ou rien. L'humiliation qu'a subie Simone Gbagbo le 17 juin 2021 et le procès en divorce intenté par l'ex-prisonnier de Scheveningen n'ont pas été faits pour arranger les choses. Comme ne l'a pas été la création par chacun d'un parti politique. Aujourd'hui, c'est dans la presse et sur les réseaux sociaux que les deux camps se livrent un combat sans merci.

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