Cote d'Ivoire: Mama - Quand Gbagbo verse encore et toujours dans la démagogie devant ses parents

16 Septembre 2022

Une cérémonie de réjouissance très vite transformée en tribune politique. Le samedi 3 septembre dernier, Laurent Gbagbo a été reçu à Mama par ses parents qui organisait une fête pour lui souhaiter un bon retour à la maison et " une bonne sortie de prison ".

Plutôt que de les remercier pour cette initiative, l'ex-chef d'Etat s'est adonné à son jeu favori. Celui du populisme et de la démagogie. Il a distillé des contre-vérités sur plusieurs points, notamment la vie chère, la situation des fonctionnaires ivoiriens, et la détention de 49 militaires au Mali dont trois soldates viennent d'être libérées. Laurent Gbagbo a rappelé le confort dans lequel étaient installés les fonctionnaires au début des années 70.

" Nous étions des fonctionnaires et nous avions de l'argent. Le gouvernement lui-même faisait des efforts pour qu'on s'en sorte. Le gouvernement nous logeait, nous les enseignants ", a-t-il dit. Si les propos tenus par Laurent Gbagbo sont vrais, il a, toutefois, manqué de dire que l'Etat providence de cette époque a pris fin depuis belle lurette et qu'il y a longtemps que les enseignants n'étaient plus logés comme il le prétend. De plus, l'enseignant qu'il est n'a pas jugé utile de loger ses camarades une fois parvenu au pouvoir de 2000 à 2010.

Laurent Gbagbo devait donc donner l'exemple. Il ne l'a pas fait durant son mandat, parce qu'il était conscient que le faire est utopique et irréaliste. Pourquoi veut-il que ce qu'il n'a pas réussi à faire en son temps soit fait aujourd'hui par Alassane Ouattara. Surtout qu'aujourd'hui, le pays compte plus de 250.000 fonctionnaires et agents de l'Etat. Dans aucun pays au monde, tous les fonctionnaires et agents de l'Etat ne sont logés, contrairement à ce que veut faire croire Laurent Gbagbo.

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A l'époque, les enseignants étaient logés parce qu'ils n'étaient pas nombreux. Félix Houphouët-Boigny avait instauré cette politique pour intéresser les Ivoiriens à ce corps professionnel. Aujourd'hui, force est de reconnaître qu'il y a une explosion démographique en Côte d'Ivoire et que le pays ne peut plus se permettre cela. S'agissant de la vie chère, il faut le dire tout net, Laurent Gbagbo est mal placé pour donner des leçons en la matière à qui que ce soit. En mars 2008, à l'époque chef d'État, il était lui-même monté au créneau pour appeler au calme après des manifestations contre la cherté de la vie à Abidjan.

Des tirs de la police avaient fait un mort et plus d'une dizaine de blessés, notamment à Cocody et Port-Bouët. Aujourd'hui, le gouvernement a pris plusieurs mesures pour accentuer les effets de la vie chère sur les populations, notamment avec le plafonnement des prix de plusieurs produits de première nécessité. Il est aussi bien de souligner que le phénomène est mondial. La survenue de la Covid-19 et la crise en Ukraine ont empiré la situation au niveau mondial obligeant certains pays à travers le monde à connaître un taux d'inflation inquiétant.

L'inflation, faut-il le mentionner, n'en finit pas d'augmenter. Elle était de 5.8% à la fin août 2022 dans l'Union européenne. Elle est repartie à la hausse depuis janvier 2021. Ce retour de l'inflation est principalement dû au prix de l'énergie qui a augmenté de 22.2% depuis les 12 derniers mois. Laurent Gbagbo s'est, par ailleurs, prononcé sur la situation des 49 militaires ivoiriens détenus au Mali. Il a souhaité qu'une enquête parlementaire soit ouverte sur le dossier.

Là aussi, Soro Kanigui, député membre de la commission défense et sécurité, président du groupe d'amitié Côte d'Ivoire-Cambodge dans une contribution, a rafraîchi la mémoire de Laurent Gbagbo et des Ivoiriens. Rappelant que sous le règne du président du PPA-CI, la Côte d'Ivoire a connu en 2002 une rébellion armée et en 2006 le déversement des déchets toxiques.

Malgré la sérieuse catastrophe environnementale qui avait occasionné la mort de 10 personnes et la contamination de près de 100.000 autres suite au déversement des déchets toxiques, il n'y a pas eu la moindre enquête parlementaire bien qu'une session du parlement l'avait envisagée sous la pression de l'opinion publique. De même, il n'a pas eu d'enquête parlementaire après l'éclatement de la rébellion. Et voici que brusquement, Laurent Gbagbo s'érige là encore en donneur de leçons là où il a failli quand il était au pouvoir.

Laurent Gbagbo médiateur ?

Toujours sur la question des militaires incarcérés, Laurent Gbagbo veut s'ériger en médiateur, en négociateur. Avec l'ex-chef d'Etat, il le diton " il est plus facile de dire que de faire " prend tout son sens. Car, Laurent Gbagbo n'a jamais été un homme du dialogue. On le voit, actuellement, avec la gauche ivoirienne qui a désormais quatre têtes. De plus, Laurent Gbagbo n'est pas l'homme idéal pour dialoguer avec les autorités maliennes ou celles d'un autre pays de la sous-région. Pour la simple raison, qu'il n'a jamais eu un bon commerce avec les pays voisins.

A l'époque de sa gloire, leurs ressortissants étaient pourchassés. Ses partisans avaient pris pour cible certains d'eux. D'ailleurs, beaucoup de ces infortunés ont malheureusement perdu la vie. De plus, comment Laurent Gbagbo qui n'a pas pu faire le dialogue avec son épouse de longue date peut-il prétendre dialoguer avec les autorités maliennes.

Ce sujet en appelle un autre. Il s'agit de l'inculpation de Pulchérie Gbalet. Là encore, le patron du PPA-CI a servi à son auditoire une version qui n'a rien à avoir avec les faits qui sont rapprochés à cette dame. Selon lui, elle a été arrêtée pour avoir rencontré Guillaume Soro. Ce qui est absolument faux, l'ex-chef d'Etat fait donc fausse route.

Le chef d'accusation ne mentionne nulle part une rencontre entre Pulchérie Gbalet et Guillaume Soro à moins que Laurent Gbagbo en sache un peu plus sur le séjour au Mali de celle qui se présente comme membre de la société civile. Enfin, Laurent Gbagbo a évoqué les mesures sociales prises par son successeur en faveur des fonctionnaires et agents de l'Etat, le 6 août dernier en oubliant, sciemment, de dire qu'elles sont historiques comme le reconnaissent l'ensemble des syndicats.

Par exemple, depuis 1960, l'allocation familiale, qui était de 2500, n'avait jamais connu de hausse. Elle est passée aujourd'hui à 7500 par enfant, une première en Côte d'Ivoire et qui porte la marque Alassane Ouattara. Que dire de la prime spéciale de fin d'année qui n'a jamais existé en Côte d'Ivoire, une autre prouesse du chef de l'Etat. Si Laurent Gbagbo n'a pas le courage de féliciter son successeur pour toutes ces actions qui contribuent au bien-être des Ivoiriens, qu'il se garde au moins de travestir l'histoire récente de la Côte d'Ivoire.

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